En début d'après-midi, on recensait déjà les premiers morts. Deux personnes ont été tuées à la sortie de la mosquée Ali ben Abi Taleb à Deir Ezzor (est) et un autre a perdu la vie lors d'une manifestation après la prière de la mosquée Mohammadi à Nawa, dans le sud de la Syrie, a expliqué Rami Abdel Rahmane, directeur de l'OSDH. Trois personnes ont également été blessées à Nawa selon l’OSDH. Les forces de sécurité syriennes ont aussi ouvert le feu sur des manifestants à Douma, un faubourg de Damas, selon des militants d'opposition. « Des manifestants nous ont téléphoné pour dire qu'il y avait deux morts, mais nous ne pouvons pas le confirmer », a dit par téléphone à Reuters un opposant joint à Damas.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, les forces gouvernementales avaient déjà tué huit personnes, selon les activistes, en réprimant des manifestations encouragées par les victoires des rebelles en Libye. Sept manifestants ont été tués près de la ville de Hama, dans le nord du pays, ainsi que dans la ville de Homs, selon les activistes. La huitième victime civile est un chauffeur de camion turc, tué par une milice pro-Assad dans la ville de Rastan alors qu'il roulait vers la Turquie, ont rapporté les activistes.
La journée de jeudi avait également été marquée par la poursuite de la répression dans l'est du pays, ainsi que par l'enlèvement et le tabassage d'Ali Ferzat, un célèbre caricaturiste syrien. L’OSDH, basé au Royaume-Uni, a précisé qu’une « bande armée » a « enlevé et agressé Ali Ferzat » avant de le jeter « d’une voiture sur la route de l’aéroport ». « Des passants, qui l’ont trouvé sur la route de l’aéroport l’ont conduit à l’hôpital », a précisé la CCL dans un communiqué. Selon l'artiste âgé de 60 ans, quatre hommes l'ont enlevé alors qu'il rentrait chez lui jeudi vers 04H30, lui ont brisé deux doigts de la main gauche, le bras droit et abîmé l'œil gauche.
Plusieurs sources de l'opposition ont accusé des membres des services de sécurité d'être responsables de cette agression car M. Ferzat est connu pour ses caricatures dénonçant la répression et l’injustice dans le monde arabe. « Le dessin, c’est mon destin. Je continuerai mon œuvre en dépit de l’agression que j’ai subie », a indiqué le caricaturiste, ajoutant que deux de ces agresseurs criaient : « Frappez-le aux mains pour qu’il arrête de dessiner et d’attaquer ses maîtres ». Alors que l'administration américaine a dénoncé jeudi l'attaque « écœurante et déplorable », la police syrienne a annoncé avoir ouvert une enquête pour retrouver les agresseurs de M. Ferzat. « Les autorités compétentes au ministère de l'Intérieur recherchent les coupables afin de les présenter à la justice », a précisé l'agence.
Sur le plan international, l'émir du Qatar Hamad Ben Khalifa Al-Thani a affirmé, hier soir, que « tout le monde sait que la solution sécuritaire est stérile et le peuple syrien ne semble pas prêt à abandonner ses demandes, après le prix qu'il a déjà payé ». « Nous tous, qui avons soutenu la Syrie dans ses temps difficiles, avons essayé d'encourager nos frères en Syrie pour qu'ils fassent de vraies réformes (...) Le peuple syrien va dans la rue dans le cadre d'un réel soulèvement civil pour demander du changement, la justice et la liberté », a encore ajouté l'émir, après avoir rencontré le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, un allié du régime du président Assad. Le président Ahmadinejad a, de son côté, appelé les pays de la région à « régler leurs problèmes (...) sans l'intervention des Occidentaux », faisant référence à la Syrie.