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Culture - Festival de Byblos

Dulcinéa, vedette d’un Don Quichotte des temps modernes

« Don Quichotte », version 2011 libanisée, mise en scène et en musique par la deuxième génération des Rahbani (Oussama, Ghadi et Marwan), pourrait s’intituler « Dans la guerre contre la corruption, la Dulcinéa (Hiba Tawaji) est reine ».

La modernité entre dans la danse. (Press Photo)

Dans la lignée de leurs aînés, Ghadi, Marwan et Oussama Rahbani sont pleins de foi dans le rôle sociopolitique du théâtre. Pour eux, ce dernier consiste à aider, montrer, tourner en dérision, donner à voir des tranches de vies, à dénoncer, jeter une lumière crue sur les maux, les travers, les dysfonctionnements d’une société où la corruption pourrait être désormais classée «patrimoine historique».
Avec Don Quichotte, production présentée dans le cadre du Festival de Byblos, ils n’ont pas failli à la tradition des comédies musicales de Assi et Mansour Rahbani. Mais ils tentent, aussi, de nouveaux défis. Dont celui de l’adaptation d’un chef-d’œuvre de la littérature mondiale. Et celui de la modernisation, qui n’est pas des moindres.
La mythique histoire de l’ardent idéaliste ibérique créée il y a 400 ans par Cervantès est ainsi transposée dans une ville faite de tours en acier (les monstres modernes) et de lumières scintillantes (l’illusion du beau). Voyage dans le temps et dans l’espace, donc, bien que les débuts de l’histoire rahbanisée se passent à la campagne. Avec les accessoires qu’il faut, bien entendu (toute la panoplie du chevalier, le chapeau, la lance, le serviteur, etc. Et la belle dulcinée, tout droit sortie d’un livre, romantique en robe de velours rouge à crinolines...).
Côté scénographie, une large bibliothèque bien achalandée trône au milieu de la scène construite à deux niveaux. À l’étage supérieur, un écran géant où l’on voit défiler les images de campagne, de moulins à vent et de paysans travaillant la terre. Pour avoir trop lu les romans de chevalerie, cheikh Assaad Fleyhane (majestueux Rafic Ali Ahmad à la chevelure immaculée) se métamorphose donc en Don Assaad Quichotte projetant d’imposer à la société un idéal d’amour, d’honneur et de justice, au mépris de la trivialité de la vie courante.

Don Assaad, justicier des villes
Après s’être fait armer chevalier, après s’être doté d’un servant accompagnateur au caractère diamétralement opposé au sien (truculent Paul Sleiman au jugement simple et prudent), il parcourt le monde, se servant des armes et des vertus du passé pour redresser les torts du présent.
En cours de route, il rencontre la dulcinée de ses rêves, la belle Dulcinéa, campée par l’énergique et talentueuse Hiba Tawaji. Charismatique, dotée d’une belle voix puissante et profonde, la jeune fille séduit et vole la vedette à ses acolytes masculins. Même Don Assaad de Rahbani semble dévier de sa trajectoire initiale de vaillant redresseur de torts. Par amour pour elle, il est prêt à défier le gouverneur. L’amour devient le «dynamo» de son combat. Ses mésaventures vont bon train, stylisées côté grotesque. Mais il se sacrifie quand même, au final, pour ses idéaux.
Don Assaad, un justicier derrière lequel se cachent les Rahbani, contempteurs ironiques de notre siècle, de notre système politique gangrené?
Car, bien sûr, les élans de Don Quichotte (celui des champs comme celui des villes) ne sont pas si ridicules, ni grand-guignolesques qu’on pourrait le croire; ils révèlent au contraire bien d’incohérences et d’injustices.
Si la morale distillée au gré des dialogues (avec, parfois, une pique hors contexte, qui jaillit là où on l’attend le moins) est parfois pesante et naïve, le spectateur lambda ne peut qu’être satisfait d’entendre scandés des slogans anticorruption. Cette corruption qui n’en finit pas de sévir, à tous les étages de la société. Justice, santé, édiles, clergé, autorités locales, prostitution, les différents secteurs pointés ici dans les tableaux, les chansons et les dialogues donnent parfois lieu à des répliques picaresques.
Au-delà des clichés, comment ne pas voir les liens étroits qui relient ce Don Quichotte à des personnalités bien connues de la scène politique libanaise.
Son opiniâtreté, sa recherche de la justice et surtout son aveuglement apparent, ou plutôt la capacité de transformer la réalité pour qu’elle corresponde à ses rêves?
Toujours est-il que dans leur recherche de la modernité, les Rahbani ont «rock and rollisé» la comédie musicale. Outre les costumes résolument modernes des danseurs, ils ont introduit des tableaux de danse contemporaine et même un peu de «street dance». La grande innovation reste sans doute cet écran géant où, entre autres écrans de flammes ou de paysages, on y voit surgir une fois des images en gros plan d’un Don Quichotte dédoublé. Belle tentative de mise en abîme qui aurait gagné à être exploitée plus en profondeur.
Derrière le rire, les Rahbani affirment vouloir garder l’espoir. La corruption n’est pas une fatalité, semble dire ce Don Quichotte. Même vaincu, Don Assaad a peut-être laissé une marque dans l’esprit du peuple. La première pièce du domino est renversée. Le Printemps arabe qui n’en finit pas d’éclore est là pour nous rappeler que les empêcheurs de tourner en rond, tel ce Quichotte, distillent des paroles qui trouvent un écho. Quelque part, quelquefois. Pourquoi pas.

* Jusqu’au dimanche 3 juillet.
Dans la lignée de leurs aînés, Ghadi, Marwan et Oussama Rahbani sont pleins de foi dans le rôle sociopolitique du théâtre. Pour eux, ce dernier consiste à aider, montrer, tourner en dérision, donner à voir des tranches de vies, à dénoncer, jeter une lumière crue sur les maux, les travers, les dysfonctionnements d’une société où la corruption pourrait être désormais...

commentaires (1)

..c est vrai pourquoi pas!! ca fait longtemps deja que Oussama al Rahbani a compose et chante la chanson intitulee"il faut pour ameliorer ma situation en tant que citoyen,en tant qu etre humain il faut que je change le regime politique tombe en desuetude pie encore devenu corrompu.."quand j ai entendu cette chanson,il y avait la dedans du desespoir,d un mal une douleur indescriptible mais aussi une revolution legitimisee d un peuple qui ne peut plus...ca c etait le cas il y a un bon nombre d annees deja. que dire maintenant qu on a,peuple libanais,survecu jusqu a l annee 2011jQuery16109057204040284881_1309600597395! pourquoi pas changer un regime injustement despotique est toujours la bonne reponse..la reaction longtemps attendue,legitimement a adopter!

Elias Jihane

04 h 55, le 02 juillet 2011

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Commentaires (1)

  • ..c est vrai pourquoi pas!! ca fait longtemps deja que Oussama al Rahbani a compose et chante la chanson intitulee"il faut pour ameliorer ma situation en tant que citoyen,en tant qu etre humain il faut que je change le regime politique tombe en desuetude pie encore devenu corrompu.."quand j ai entendu cette chanson,il y avait la dedans du desespoir,d un mal une douleur indescriptible mais aussi une revolution legitimisee d un peuple qui ne peut plus...ca c etait le cas il y a un bon nombre d annees deja. que dire maintenant qu on a,peuple libanais,survecu jusqu a l annee 2011jQuery16109057204040284881_1309600597395! pourquoi pas changer un regime injustement despotique est toujours la bonne reponse..la reaction longtemps attendue,legitimement a adopter!

    Elias Jihane

    04 h 55, le 02 juillet 2011

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