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Culture - Théâtre

Ce magnifique « Visiteur » d’Éric- Emmanuel Schmitt qui passait par là !

Alors que la moitié du pays se ruait au concert de Shakira, un visiteur plus discret, mais tout aussi marquant, passait sur les planches de la salle Montaigne pour offrir, aux amateurs de pièces à textes francophones, une heure, jubilatoire, de pure intelligence.

Qui est ce visiteur (Michel Moppert) qui squatte le salon de Freud (Jean-Paul Xuereb) ? (Photo Ibrahim Tawil)

Car ce visiteur-là, créé par Éric-Emmanuel Schmitt et magnifiquement interprété par Michel Moppert, est de ceux qui apportent avec eux la grâce. Celle qui naît de la rencontre du beau, du bon et de l'intelligent.
Les trois sources mêlées dans lesquelles Éric-Emmanuel Schmitt puise son inspiration, la matière de son théâtre philosophique, au brillant mélange de réflexion, de finesse et d'humour.
S'il est une pièce étendard de la philosophie humaniste et lumineuse de cet auteur francophone contemporain qui n'est plus à présenter, c'est bien Le Visiteur. Son œuvre majeure, couronnée de trois Molières en 1994, dans laquelle il met face à face Freud et... Dieu.
Et c'est cette pièce qu'a choisi de présenter, sur les planches de la salle Montaigne du CCF, la compagnie théâtrale du Collège protestant, une troupe de comédiens amateurs, tous membres du corps professoral ou administratif du collège, passionnés de beaux textes et dont le jeu n'a rien à envier aux professionnels.
L'adaptation qu'ils en ont offert l'a largement démontré.
Depuis la belle mise en scène respectueuse du texte de l'auteur (à part quelques césures dans les tirades purement freudiennes) et, dans la mesure du possible, de ses directives scéniques, signée Houda Ghazi (professeur de lettres et de théâtre au CPF), au jeu des comédiens, tout en nuances, en souplesse, en habile expression gestuelle et faciale. Sans oublier le décor soigné composé de meubles à l'esprit d'époque.
Un salon-bureau des années 30, où vont s'affronter, en un duo magnifique, le Dr Freud (Jean-Paul Xuereb) et son visiteur (rôle magistralement interprété par Michel Moppert).
Ce dernier, sorte de dandy en frac et haut-de-forme, apparaît chez le père de la psychanalyse, à Vienne, par une nuit d'angoisse de1938, alors que la Gestapo (un soldat nazi joué par Frank Giletti) vient d'emmener en interrogatoire sa fille Anna.
Malade, affaibli, inquiet pour sa fille (Catherine Prost), Freud commence par refuser son écoute à cet homme qu'il prend pour un patient... un peu mythomane. « N'est-il pas ridicule de soigner un homme lorsque le monde entier brûle ? » Mais l'énigmatique personnage fait assaut d'intelligence. Tout en laissant entendre qu'il pourrait être l'incarnation de Dieu.
Fou, échappé de l'asile ? Affabulateur ? Projection de son inconscient ? Qui est cet homme étrange qui semble tout connaître de son hôte ? S'engage alors entre eux une discussion, à fleurets mouchetés. Un dialogue tout à la fois philosophique et joueur, étincelant de perspicacité et rieur, riche de belles envolées littéraires et de mots d'esprits...
Un dialogue qui formulera toutes sortes de questions existentielles : de la nature de l'inconscient, aux raisons du mal dans le monde, en passant par la liberté de l'homme ou encore le rôle du doute dans la foi....
De réponses, il n'y en aura point. Le propos de cette improbable rencontre entre Freud, l'athée, « le catéchumène de l'incroyance », et Dieu, n'étant pas de délivrer, au terme d'une bataille d'idées, une victoire à l'un ou à l'autre.
Ici point de thèse définitive ni de dogme à suivre.
Mais l'envie d'induire une réflexion différente, lumineuse, tout à la fois profonde et pétillante, sur la foi et l'approche que chacun peut en avoir.
Un régal pour l'esprit... et le cœur, dont aurait dû profiter un plus large public. Dommage qu'il n'y ait que deux soirées de représentation !
Car ce visiteur-là, créé par Éric-Emmanuel Schmitt et magnifiquement interprété par Michel Moppert, est de ceux qui apportent avec eux la grâce. Celle qui naît de la rencontre du beau, du bon et de l'intelligent.Les trois sources mêlées dans lesquelles Éric-Emmanuel Schmitt puise son inspiration, la matière de son théâtre philosophique, au brillant mélange de réflexion,...

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