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Culture - Exposition

Harun Farocki et Paola Yacoub au Beirut Art Center

En collaboration avec le Goethe Institut, le Beirut Art Center rend hommage au parcours artistique de Harun Farocki. Dans le même espace, Paola Yacoub présente ses œuvres photographiques. Une double exposition qui se déroule au BAC jusqu'au 15 avril.

Pour Farocki, il est important de déstructurer les images. (Michel Sayegh)

On serait en droit de se demander pourquoi le Beirut Art Center s'est proposé de confronter le regard de ces deux grands artistes contemporains dont la démarche ou le médium n'ont en apparence rien de commun. Mais à bien explorer le travail de l'un ou de l'autre, on finit par comprendre les points qui les relient, du moins cette correspondance qu'a établi le BAC entre les deux artistes.
Et l'on parvient à faire la connexion, ne serait-ce que par l'usage de l'image mouvante pour Farocki, ou fixe pour Yacoub, par la dissection scientifique ou la réflexion sur sa genèse, son emploi dans certains milieux spatio-temporels et par l'idée de son autoreprésentation ainsi que sa migration vers d'autres espaces dans les deux œuvres respectives.
Mais qui est au juste Harun Farocki? Vidéaste, enseignant à l'École des beaux-arts de Vienne, à Berkeley, en Californie, critique pendant dix ans dans le magazine Filmkritik et auteur de plusieurs livres, dont One Image Doesn't Take the Place of the Previous One, l'artiste, d'origine tchèque, établi en Allemagne, a au fil du temps multiplié les casquettes, mais son travail a toujours porté sur le processus de ces images mouvantes et leur histoire, d'où le nom de l'exposition «Image Works».

Laboratoire d'images
Le BAC, en collaboration avec le Goethe Institut, a réussi à faire une rétrospective sur le principal corps de ses œuvres. Des plus anciennes, comme Interface (1996), I Thougt I Was Seeing Convicts (2000) ou Eye Machine III (2003), à ses plus récentes, comme On Construction of Griffith's Films (2006) et Serious Games (2009, 2010).
Monté généralement sous forme d'installations, son travail filmique s'apparente à un laboratoire d'expériences où l'artiste utilise le plus souvent des images d'archives, issues souvent de sources hétéroclites. Cet artisan de l'image fouille et exhume des images du passé qui lui semblent importantes dans l'articulation des faits historiques. Préalablement visionnées, elles sont par la suite assemblées, découpées, recollées de manière à mettre en lumière cette image en mouvement tout en récréant la propre vision de l'histoire de l'artiste.
Reprenant un thème récurrent chez lui, «le film, une œuvre scientifique et la science, politique», la vidéo Interface montre Farocki à sa table de montage confrontant les différences et similitudes des mécanismes esthétiques de l'image avec les conditions de production.
Les vidéos, le jeu de pixellisation, les publicités et le monde virtuel sont autant de sujets qu'il traite en décryptant les codes sociaux souvent en matière de guerre. Les archives, le non-verbal, la machine et le montage sont les fils directeurs de cette œuvre prolifique.
Quant à Paola Yacoub, elle présente dans Drawing with the Things Themselves une sélection de photomontages, photo-performances, dessins, textes et vidéos, démontrant comment notre perception évolue en fonction du contexte politique et social, et comment le travail des médias parvient à donner une dimension dramatique à l'image. Après un diplôme en beaux-arts à Beyrouth, Yacoub s'installe à Londres où elle poursuit ses études en architecture. Travaillant pour l'Institut français d'archéologie du Proche-Orient, l'artiste participe aux fouilles archéologiques du centre-ville de 1995 à 1999.
Son travail reposera aussi sur des expériences scientifiques (comme dans la performance Fontaine et inondation), afin de comprendre les automatismes des images et leur perception. Dans son travail avec Michel Lasserre, également architecte de formation, Paola Yacoub collabore sur un projet d'analyse et de lecture critique de l'espace libanais - notamment Beyrouth et les paysages du Liban-Sud - et de ses transformations pendant et après quinze années de guerre.
Leur démarche s'inscrit ainsi entre pratiques documentaires contemporaines et production d'un discours critique sur la ville et le paysage, en zone et en temps de conflit. Dans le cadre de ce travail, on voit bien comment l'information et l'image entrent en résonance. Pour Yacoub, donner une information différente, voire fausse sur un lieu peut créer un impact et sensibiliser le regard en créant d'autres émotions.
On serait en droit de se demander pourquoi le Beirut Art Center s'est proposé de confronter le regard de ces deux grands artistes contemporains dont la démarche ou le médium n'ont en apparence rien de commun. Mais à bien explorer le travail de l'un ou de l'autre, on finit par comprendre les points qui les relient, du moins cette correspondance qu'a établi le BAC entre les deux...

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