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CD, DVD - Un peu plus de...

Je t’aime, moi non plus

J'aurais tellement aimé qu'un homme m'écrive ces/ses paroles. Au-delà de tout, de Gainsbarre en fin de vie, de son côté lubrique mais chic et de cette quête irrésolue de la femme parfaite, Gainsbourg a été, est et sera à jamais un des plus grands poètes de la langue française. Ses textes ont souvent été dédiés aux (ex) femmes de sa vie. D'Élisa (sa première compagne) à Bardot, en passant par Bambou, l'éternelle Jane, l'enfant prodigue Charlotte et toutes les autres, désirées, conquises ou pas, Lucien Ginsburg a été le plus prolifique des conteurs d'amours... souvent déchues.
Si Serge Gainsbourg est connu dans le monde entier pour une seule chansons : Je t'aime, moi non plus, sortie en février 1969, année érotique, il est considéré pour beaucoup d'artistes hors Hexagone comme une légende. Suffit de jeter un coup d'œil rapide sur la liste des interprètes de l'album Monsieur Gainsbourg Revisited, une liste qui ferait saliver n'importe quel chanteur en mal de reconnaissance: Jarvis Cocker, Cat Power, Franz Ferdinand, Carla Bruni, Placebo, Gonzales ou Karen Elson. Sans compter ceux qui l'ont susurré, revisité, réinterprété. Adjani, Paradis, Juliette Gréco, Bashung, Marianne Faithfull, Françoise Hardy, Michael Stipes de R.E.M., France Gall, Daho et j'en passe. En quelque six cents textes (260 chansons sont regroupées dans un nouveau coffret), Gainsbourg aura joué et rejoué avec la langue de Boris Vian, qu'il admirait tant. Cette écriture venimeuse et obsessionnelle, si fluide et si tordue à la fois, est une des plus belles, des plus rares, des plus troublantes, des plus pures, des plus enivrantes... ever. Oui, j'aurais aimé être Jane ou Brigitte (j'aurais vraiment pas pu), juste pour avoir le plaisir d'entendre ses mots se glisser dans mon cou et ses mélodies caresser ma peau. Si l'homme à la tête de chou, dans une interview au Nouveau Candide datée de mai 1967, confiait au lectorat gaulliste aimer les filles «d'apparence très dure, très sophistiquée et très froide», situant ainsi son idéal de beauté quelque part au confluent du «rêve de pierre» baudelairien et d'un aphorisme terrible de Schopenhauer: «Seules les bêtes à sang froid ont du venin», lui aussi a été idolâtré. Difficile de sortir d'une histoire d'amour avec Bardot? Difficile d'oublier les mots de Serge. Il suffit de se souvenir de Jane, il y a trois ans, au Music Hall, chantant à mi-voix Manon, Quoi ou Fuir le bonheur pour comprendre que l'Anglaise sera éternellement habitée par celui qui lui écrivit le plus beau livre d'amour de tous les temps, ses chansons collées les unes à la suite des autres. Dire qu'une des dernières compositions du grand Serge fut l'album Amour des feintes... J'aurais aimé qu'un homme m'écrive des chansons. Avec sa voix ou la mienne, peu importe, mais qu'il s'installe sur une table ou sur un piano et qu'il compose une œuvre en Fa majeur, et qu'il fasse rimer avec humour/amour ses maux et les miens. Et écouter et réécouter à l'envi, comme ces «groupies de pianistes», ces mots d'amour.
Avant, après et/ou pendant Gainsbourg, il y a eu Brel, Berger, Brassens, Biolay, Bashung (initiales B.B.?), mais des comme Serge, y' aura pas. Y'aura plus. Des chansons, je ne sais pas ou plutôt je ne pense pas qu'on m'en écrira. D'ailleurs on ne m'écrit pas. On ne s'écrit pas. Tout simplement. Je ne devrais pas m'étonner. Nos rares échanges se limitent à quelques mots jetés par-ci par-là, sur un wall ou par SMS, à quelques paroles arrachées à la volée. Si quelque chose ne va pas. Si un départ est imminent. On griffonne quelques mots gentils sur une carte de vœux, mais rien de vraiment plus long. Et puis, on ne prend quasiment plus de stylo. On ne rature pas. On «delete», on «cut», on «paste». On n'a même plus la bosse de l'écrivain. On tapote, on pianote, mais pas des dièses, ni des bémols. De toutes les manières, pourquoi s'écrire, quand on est désormais joignable n'importe quand, n'importe où... Alors une chanson ou quelques vers, je peux rêver. Une nuit que j'étais/ À me morfondre/ Dans quelque pub anglais/ Du cœur de Londres / Parcourant l'Amour Monstre de Pauwels/ Me vint une vision/ Dans l'eau de Seltz/ Tandis que des médailles D'impérator/ Font briller à sa taille/ Le bronze et l'or / Le platine lui grave/ D'un cercle froid/ La marque des esclaves / À chaque doigt/ Jusqu'en haut des cuisses/ Elle est bottée/ Et c'est comme un calice/ À sa beauté/ Elle ne porte rien/ D'autre qu'un peu/ D'essence de Guerlain/ Dans les cheveux/ À chaque mouvement/ On entendait/ Les clochettes d'argent/ De ses poignets/ Agitant ses grelots/ Elle avança/ Et prononça ce mot : Alméria. Initiales B.B.
J'aurais tellement aimé qu'un homme m'écrive ces/ses paroles. Au-delà de tout, de Gainsbarre en fin de vie, de son côté lubrique mais chic et de cette quête irrésolue de la femme parfaite, Gainsbourg a été, est et sera à jamais un des plus grands poètes de la langue française. Ses textes ont souvent été dédiés aux (ex) femmes de sa vie. D'Élisa (sa première compagne) à Bardot,...

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