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Culture - Théâtre

Le paradoxe du comédien

Ouverture de la troisième édition du Festival du Théâtre arabe à Beyrouth, qui se tient jusqu'au 15 du mois courant en divers points et salles de la capitale ainsi qu'à la Rabita Sakafia de Tripoli. Pour le premier soir, à l'affiche à l'Unesco, une pièce tunisienne, intitulée « Hakaëb » (valises) avec pour thème pertinent et d'acuité la passion des planches et le paradoxe du comédien...

Entre théâtre antique et expression moderne des acteurs en quête d’une identité dramaturgique.

Huit acteurs et actrices en quête d'une identité dramaturgique. Ce qui n'est pas une mince affaire dans le monde arabe. Et le monde tout court! Huit acteurs et actrices en noir, cheveux teints, traînant leurs baluchons de costumes sur une scène nue, avec projecteurs, chiffons et nuages fumigènes. Mais traînant aussi leurs rêves, leurs aspirations, leurs déceptions, leurs attentes, leurs combats, leurs amours. Monde de magie, de passion véhémente, d'illusions et de désillusions.
C'est la troupe du théâtre national tunisien qui règle ses comptes à l'univers des planches. Dans un style nerveux, grinçant et jeune, avec des mots (qui ne font pas toujours mouche) et des situations de bric et de broc, les acteurs s'ébrouent gaiement dans une gestuelle dynamique et tonique, entre pas de danse, gymnastique du corps et pirouettes d'équilibriste.
Pour ces acteurs chevronnés, mordus de théâtre, la scène est un lieu essentiel. Un lieu de vie et de survie. Pour eux, ces incorrigibles amoureux de la flaque de lumière, la réalité est sous les projecteurs, sous ces costumes, sous ce flot de vocables et d'histoires abracadabrantes et de tous crins.
D'Antigone la rebelle à Desdémone, victime d'un mari jaloux, en passant par la folie et le crime de Médée, le théâtre, reflet de la vie, est représentation, réflexion, témoignage mais aussi, entre larmes et rires, à la fois leçon de vie et divertissement.
Et du divertissement, il y en a dans cette pièce au rythme chaloupé et syncopé entre saynètes menées tambour battant (avec quand même certaines criailleries), mouvements d'ensemble chorégraphiques et duo ou solo pour digressions ou soliloques sur un tempo strident ou lyrique. Dans un arabe aux intonations métissées de quelques phrases en français ou saupoudré de beaucoup de «barcha», Hakaëb est la valse des valises...
Les valises de ces saltimbanques itinérants qui n'en finissent pas de conter et de raconter, à travers verbe fumeux, extraits de grands dramaturges classiques, improvisations bien rodées, costumes de fortune (trench-coats, cheveux à la Angela Davis pailletés comme pour une fête, pans de gaze blanche qui se transforment en pays de l'ombre) et un éclairage astucieux, le bonheur et le désarroi de vivre d'expédients, au nom d'un rêve tenace, exaltant, valorisant et grandiose qui s'appelle théâtre.
Sur un texte caustique, tendre, revendicateur (juste titre!), empruntant beaucoup au théâtre moderne de l'absurde et signé Youssef el-Bahri, la mise en scène, dynamique mais répétitive, de Jaafar al-Kassimi emboîte le pas, dans une atmosphère néo-expressionniste, à cette narration faussement décousue pour un ton déluré, badin, strident sans être dépourvu d'un certain sens poétique et d'humour.
Sur un fond sonore de mélancolique chant berbère (moins bien convaincantes sont les sirupeuses coulées de piano de lounge bar de la fin), les acteurs (Samah al-Dechraoui, al-Sadek Halwass, Ahmad ben Ali, Nabila Kowaider, Oussama el-Jamii, Youssef Mares, Samah al-Takawiri, al-Sohbi Omar) sont touchants de dévotion à leur métier et leur art. Sauf quand certaines actrices cabotinent avec des voix haut perchées...
Si une grande partie du public (pourtant des accros et des pros du théâtre) a quitté la salle bien avant la fin du baisser de rideau, c'est que la pièce traîne en longueur. Et est excessive dans ses répétitions, de quelques trouvailles scéniques, utilisées ici jusqu'à en user la corde...
Pour retenir l'attention des spectateurs et les garder vissés à leur siège, le théâtre arabe encore balbutiant ou détenteur de quelques fugaces éclats a beaucoup à faire...
Huit acteurs et actrices en quête d'une identité dramaturgique. Ce qui n'est pas une mince affaire dans le monde arabe. Et le monde tout court! Huit acteurs et actrices en noir, cheveux teints, traînant leurs baluchons de costumes sur une scène nue, avec projecteurs, chiffons et nuages fumigènes. Mais traînant aussi leurs rêves, leurs aspirations, leurs déceptions, leurs attentes, leurs...
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