« La flore intestinale abrite un nombre de bactéries supérieur à celui (contenu dans tout le reste) de notre organisme, explique-t-il. Elle porte plus de gènes différents que nos propres cellules. Et son poids est supérieur à celui de notre cerveau. Voilà qui montre bien l'importance de ce monde vivant, hébergé par notre corps. Nous interagissons avec lui. Nous pouvons le modifier par notre façon de nous alimenter, de vivre, par notre environnement. »
Lancé en France en 2008 par l'Institut national de la recherche agronomique (INRA), MetaHit pour Metagenomics of Human Intestinal Tract est un projet international à part entière. Il est soutenu par l'Union européenne, qui assure plus de la moitié de son financement : 11,4 millions d'euros pour un coût global estimé à 21 millions. Le reste provient du secteur privé. En moins de deux ans, les scientifiques ont identifié plus de 3,3 millions des gènes du microbiote intestinal. « Nos recherches visent à en établir la cartographie, mais aussi à identifier ses liens éventuels avec certaines affections. En particulier la maladie de Crohn et l'obésité, précise le Pr Goulet. Nous connaissons désormais les mécanismes à l'origine des maladies inflammatoires chroniques de l'intestin. Et nous savons qu'elles sont en partie provoquées par un déséquilibre de notre flore intestinale. »
Dans un avenir proche et grâce à des puces ADN, il sera possible de mettre au point notre propre profil de flore intestinale. Tout comme nous faisons aujourd'hui notre bilan sanguin. « Nous pourrons donc identifier des prédispositions à certaines maladies, souligne le Pr Goulet. Nous avons devant nous un champ de recherches extraordinaire, qui à terme pourrait ouvrir de nouvelles pistes thérapeutiques. Mais aujourd'hui, nous ne connaissons que la partie émergée de l'iceberg. »
Microbiote ou flore intestinale ? Pourquoi, tout à coup, utiliser un mot nouveau pour parler de cette flore qui colonise notre système digestif ? « Le concept de flore intestinale a été utilisé pendant des années car il parle bien au public, répond le spécialiste. Je suis très attaché à cette appellation. En revanche, le consensus international de scientifiques préfère s'en tenir au terme de microbiote intestinal : micro au sens microscopique, et bios signifiant vie. »
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