Rechercher
Rechercher

Économie - Analyse

La Chine, clé de la présidence française du G20

Pékin et Paris contre l'hégémonie du dollar.
Nicolas Sarkozy espère rallier cette semaine la Chine à ses propositions pour un nouvel ordre économique et monétaire mondial dans le cadre de la présidence française du G20, dont il attend beaucoup sur le plan intérieur.
Le président français aura deux entretiens et deux dîners, jeudi à Paris et vendredi à Nice, avec son homologue chinois Hu Jintao, en visite d'État, pour tenter d'obtenir un soutien crucial pour le succès de sa stratégie.
Il veut que le G20 sous présidence française pose en 2011 les premiers jalons d'une réforme du système monétaire (SMI), s'attaque à la volatilité des prix des matières premières, se penche sur la gouvernance économique mondiale et promeuve des « financements innovants » en faveur de l'aide au développement.
Un programme si ambitieux qu'il fait tiquer plus d'un partenaire de Paris et n'a de chance d'aboutir à des résultats concrets que si la France s'assure la coopération de la Chine, désormais deuxième puissance économique mondiale.
Nicolas Sarkozy, qui retrouvera Hu Jintao le 12 novembre au sommet du G20 de Séoul, semble avoir retenu les leçons des négociations sur le climat, que Pékin a largement contribué à faire capoter en décembre 2009 à Copenhague.
Il s'abstient désormais de sermonner Pékin sur le yuan, qu'il accusait naguère d'être artificiellement sous-évalué et de favoriser outrageusement les exportations chinoises.
Il s'efforce d'associer la Chine à la préparation de la présidence française, qui débutera au lendemain de Séoul, et lui a proposé d'organiser un séminaire sur la réforme du SMI.
« Les Chinois sont intéressés par la démarche française parce que ça leur permet de poser la question de l'hégémonie du dollar. C'est un point de convergence avec la France », explique l'économiste Jean-Joseph Boillot, spécialiste de l'Asie.
Le gouverneur de la Banque de Chine, Zhou Xiachuan, a lancé le 23 mars 2009 un pavé dans la mare en proposant de faire des droits de tirage spéciaux (DTS) du Fonds monétaire international une monnaie de réserve « déconnectée des nations individuelles ».
Paris a pris la balle au bond : « Ce sera un des sujets que nous aborderons dans le cadre du G20 », a dit le 1er septembre dernier la ministre de l'Économie, Christine Lagarde.
La France sonde depuis quelque temps ses partenaires sur la transformation de cette unité de compte en monnaie de réserve et sur le développement d'un marché des DTS.
Selon une source gouvernementale française, Paris pousse également l'idée d'une introduction du yuan dans le panier de monnaies sur lequel repose la valeur des DTS, ce qui serait un pas vers une internationalisation de la monnaie chinoise.
Si la convertibilité du yuan est encore un horizon lointain, la Chine expérimente déjà son utilisation dans des transactions internationales en Asie et en Amérique latine.
Toute la question est de savoir jusqu'où peut aller le soutien de Pékin à la démarche française, à un moment où les dirigeants chinois sont eux-mêmes en plein débat stratégique.
Économistes et sinologues s'accordent tous sur un point : si la Chine est prête à envisager une appréciation progressive et régulière du yuan, toute proposition conduisant à un brutal renchérissement de sa monnaie sera jugée inacceptable par Pékin.
Ils s'accordent aussi à estimer que si la Chine a intérêt à jouer le jeu du dialogue multilatéral pour éviter l'isolement, les États-Unis demeurent son interlocuteur principal.
Pas plus que les Français, les Chinois ne souhaitent voir le débat dégénérer en une guerre entre le dollar et le yuan, dont « personne ne sortirait vainqueur », dit-on à Paris. « S'il y a une chose dont les Chinois ne veulent pas, c'est d'un affrontement direct avec les Américains », confirme l'économiste Michel Aglietta.
Pour Christian de Boissieu, président du Conseil d'analyse économique du Premier ministre, l'Europe aurait beaucoup à perdre à une telle confrontation : « Si les Chinois sortent de l'orbite du dollar et vont vers l'euro, cela provoquera un énorme choc sur les taux de change. Il faut faire attention. Un euro à deux dollars ne serait pas un cadeau. »
Écueil supplémentaire, l'Union européenne n'existe guère en tant qu'entité aux yeux des dirigeants chinois, malgré l'euro.
La France risque donc de n'être pour la Chine qu'« un allié tactique, un idiot utile », estime Jean-Joseph Boillot.
« L'important, pour les Chinois c'est de neutraliser tout discours sur une réévaluation du yuan et tout ce qui pourrait leur faire perdre le contrôle de leurs leviers économiques », dit-il. « L'Empire du milieu ne veut surtout pas s'ouvrir ». Enfin, les sinologues s'accordent à considérer que la France reste en observation et son offensive de charme à la merci de tout ce qui serait interprété à Pékin comme une « trahison ».
Nicolas Sarkozy, qui a scellé sa réconciliation avec les dirigeants chinois lors d'une visite d'État en Chine en avril, après une période de froid provoquée par ses positions sur le Tibet, s'efforce de mettre toutes les chances de son côté.
Il s'est ainsi abstenu de commenter l'attribution du prix Nobel de la paix à l'opposant chinois Liu Xiaobo, laissant ce soin à son ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner.
Nicolas Sarkozy espère rallier cette semaine la Chine à ses propositions pour un nouvel ordre économique et monétaire mondial dans le cadre de la présidence française du G20, dont il attend beaucoup sur le plan intérieur.Le président français aura deux entretiens et deux dîners, jeudi à Paris et vendredi...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut