De fait, le 8 Mars lui avait répondu qu'aucune porte ne serait claquée. Et qu'au cas où ses ministres ne parviendraient pas à obtenir que l'affaire soit déférée devant la Cour de justice, ils demanderaient un report de la discussion à une séance ultérieure.
D'ailleurs, nul ne semblait souhaiter un clash politique majeur à la veille de la visite du président iranien. Il était donc tacitement convenu que l'examen de l'étude Najjar se développerait en base de critères et d'arguments juridiques. Bien que des cadres du 8 Mars eussent soutenu que ce document restait, à leurs yeux, partial et politisé. Et qu'il ne réglait rien par rapport au différend sur les faux témoins. Les loyalistes répondant qu'il faut une autorité judiciaire pour identifier ces faux témoins. Ce qui ne peut se faire, en pratique, qu'à la lumière de l'acte d'accusation du TSL et de l'ouverture du procès. Ajoutant qu'on ne peut mettre la charrue devant les bœufs, ni soutenir que le procès des faux témoins doit être organisé avant l'acte d'accusation, comme le font les ex-opposants, pour qui ce serait le seul moyen de corriger la trajectoire du TSL et de l'éloigner de toute politisation. Ce à quoi les loyalistes rétorquent que cette façon d'aborder les choses n'est par elle-même que pure politisation, car c'est à l'autorité judiciaire de définir et de désigner un faux témoin, non à des parties politiques.
Les loyalistes répètent à satiété que le 8 Mars continue à tenter de faire sauter le TSL, la justice libanaise devant alors, selon lui, entrer en scène. Ce camp, ajoutent les loyalistes, s'obstine alors que la communauté internationale, les puissances occidentales ou régionales ne cessent de marteler leur soutien au TSL comme à son intangibilité, en soulignant que la découverte de la vérité, la fin de l'impunité pour les terroristes, les assassins et leurs commanditaires, sont de nature à consolider la paix civile, la stabilité et la sécurité du Liban.
À ce propos, un professionnel chevronné rappelle que s'il y a une leçon à tirer des guerres intestines libanaises étalées sur plus d'un siècle et demi, c'est qu'aucune fraction ne peut durablement en dominer, en assujettir d'autres. Quelle que puisse être sa puissance dans une phase déterminée. Pour cet ancien ministre, il reste élémentaire qu'un pays composite comme le Liban ne peut vivre qu'à l'ombre d'un système, baptisé d'ailleurs à la libanaise, de consensus perpétuel. Forgé d'arrangements et de compromis, sur base de la règle « ni vainqueur ni vaincu ». Une preuve récente étant que malgré sa victoire aux élections législatives, la majorité a dû coopter la minorité au sein de l'exécutif.
Cependant, certains cercles politiques évoquent une multitude de scénarios conflictuels pouvant aller jusqu'à des troubles de rue. Ils avancent même des dates pour cette dégradation, mais il leur est répondu que la sécurité au Liban a été décrétée ligne rouge par le sommet tripartite. Nul ne peut donc toucher à la stabilité sécuritaire ni à la formule de coexistence pacifique, et l'armée a pour instructions de réprimer toute tentative de porter atteinte à l'ordre public. Le commandant en chef, le général Jean Kahwagi, s'est gaussé de ceux qui parient sur une césure de l'institution militaire qui interviendrait dans le cas où elle aurait à réprimer des fauteurs de troubles.
En appoint, l'émissaire américain Hoff, en sus de ses discussions à Damas sur le processus de paix, aurait soulevé la question du Liban, selon des diplomates citant des responsables syriens. Pour souligner, à son tour, que la sécurité et la stabilité y sont une ligne rouge aux yeux de son gouvernement.
Tous ces messages convergent vers l'ensemble des forces locales, qui se voient rappeler avec insistance les vertus du dialogue calme pour régler leurs différends, au sein des institutions légales et loin de toute violence. Mais on verra combien ils y sont disposés après le départ d'Ahmadinejad.