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Culture - Théâtre

Un baroque métissage libano-tunisien

Voilà une comédie noire fort joliment troussée, écrite et jouée par Yara Abou Haydar et Wahid el-Ajami. Sur une mise en scène et une scénographie de ce dernier. Au Théâtre de Beyrouth, jusqu'au 9 septembre*.

Gestuelle dynamique et diatribe bien enlevée.  (Marwan Assaf)

Ten3ad 3leik (expression intraduisible sinon par : que cette joyeuse occasion se répète pour toi) est un travail collectif d'agréable tournure. Une pièce échafaudée depuis plusieurs mois par la Libanaise Yara Abou Haydar et le Tunisien Wahid el-Ajami dans une atmosphère marquée par le goût de l'expérimentation et du «work in progress».
Et, disons-le sans détours, l'on se réjouit aussi pour les retrouvailles. Avec le Théâtre de Beyrouth (TDB pour les intimes), d'abord, cette salle au charme inouï qu'on ne se lasse pas de redécouvrir et d'admirer. Mais aussi pour le bonheur de revoir une pièce de théâtre en tant que telle, après un été entamé avec un enchevêtrement de festivals et un mois d'août caniculaire (côté météo) et aride (côté culture).
Rafraîchissante donc cette Ten3ad 3leik. Par son métissage libano-tunisien, surtout. Barrée, baroque et drôle, comme les enfants du Nouveau théâtre de Tunis de Mohammad Driss savent le faire. Avec ces acrobaties d'une langue qui devient folle, incontrôlable, incompréhensible. Et cette particularité de picorer les mots et leurs sonorités, puis de se laisser aller à un vagabondage de l'esprit aidé par un léger hiatus cérébral.
La gestuelle dynamique, la diatribe bien enlevée. Même la moue tombante. Toutes tunisiennes.
L'histoire se déroule dans un aéroport, lieu par excellence de tous les passages, des départs comme des arrivées, bref de toutes les possibilités. Lieu idéal pour ces deux êtres qui se cherchent. Une salle d'attente. Un lieu anonyme. Un lieu rivage où ces êtres en dérive ont échoué. Un lieu de rencontre. De séparation aussi. Un lieu de grande solitude où toute la vie des deux personnages semble tenir dans un seul bagage.
Elle, attachée à sa valise et à son parapluie, telle une Mary Poppins rêvant de s'envoler. De s'échapper de la réalité trop dure, vers un ailleurs plus ensoleillé. Lui à ses ouvrages, archéologue creusant la terre, voulant s'enfoncer encore plus loin dans sa politique de l'autruche. Tous deux sèment des phrases et des mots, comme autant de bribes d'un discours, d'une histoire, leur histoire, qui se construit au fur et à mesure du spectacle. Mais chut, on n'en dira pas plus, pour préserver le suspense.
Le duo s'en donne apparemment à cœur joie dans les poncifs du genre avec, eh bien, une fraîcheur et un plaisir de jeu qui réjouissent le spectateur, et auxquels s'ajoutent les traits moins attendus d'un comique purement visuel sur certaines scènes, une ou deux références de bon aloi, un chouia de transformisme rigolard et, de-ci de-là, de brèves virées dans l'absurde qui font leur petit effet. Intermèdes loufoques, absurdités inventives fusent çà et là.
L'opposition des caractères, les ingénieuses réparties, les petits gags et les coups de théâtre donnent à la pièce ce qu'il faut pour chatouiller le public.
Le charme de l'ensemble tient finalement à un seul point : loin de jouer la grosse artillerie, Ten3ad 3leik fonctionne sans à-coups par la grâce d'un comique tirant sur le noir bien équilibré et agrémenté sinon de véritables trouvailles du moins de petits éclats bienvenus.

* Ce soir et demain, samedi 4 septembre, puis du mardi 7 au jeudi 9 septembre. À 21h00. Réservations au 03/692592 et au 01/ 363328.
Ten3ad 3leik (expression intraduisible sinon par : que cette joyeuse occasion se répète pour toi) est un travail collectif d'agréable tournure. Une pièce échafaudée depuis plusieurs mois par la Libanaise Yara Abou Haydar et le Tunisien Wahid el-Ajami dans une atmosphère marquée par le goût de l'expérimentation et...

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