Les inondations provoquées depuis un mois par des pluies de mousson d'une ampleur exceptionnelle ont affecté un cinquième du territoire pakistanais et 20 millions de personnes en ont souffert à divers degrés. Critiquée pour son absence de réaction au plus fort des pluies et des inondations fin juillet-début août, la communauté internationale semble avoir pris la mesure du désastre et la mobilisation de l'aide d'urgence s'est accélérée, demeurant toutefois largement insuffisante. Les donateurs internationaux ont versé près de 500 millions de dollars en aide d'urgence, via les Nations unies ou sous forme bilatérale, selon des chiffres livrés vendredi par l'ONU. « Il est très probable que le besoin de financement augmente fortement car, depuis notre première estimation (du 11 août), le nombre de personnes ayant besoin d'une aide humanitaire immédiate est passé de 6 à 8 millions », a expliqué samedi à l'AFP Maurizio Giuliano, porte-parole du Bureau de coordination des Affaires humanitaires de l'ONU (OCHA) à Islamabad.
Samedi, le FMI a annoncé qu'une réunion avec les dirigeants pakistanais étudierait la semaine prochaine les conséquences économiques des inondations, laissant planer la possibilité d'un assouplissement des conditions de remboursement d'un prêt de 10 milliards de dollars en 2008.
Parallèlement, les inondations ont fait monter d'un cran la défiance, déjà forte, de la population à l'égard du fragile gouvernement, laissant redouter des émeutes. L'impact social des flots boueux s'annonce dévastateur pour un pays déjà en difficulté, dont un quart de la population vit sous le seuil de pauvreté.
La colère vis-à-vis de l'impopulaire gouvernement du président Asif Ali Zardari, jugé corrompu et inefficace, est très vive dans les camps de fortune et le long des routes où la majorité des sinistrés attendent toujours nourriture et médicaments, voire un abri pour six millions d'entre eux, selon la dernière estimation de l'ONU.
Avant les inondations, la population se plaignait de fréquentes et interminables coupures d'électricité et d'une inflation galopante. Certaines zones sont désormais totalement privées d'électricité et les prix atteignent de nouveaux sommets, décuplant les frustrations.
L'autre inquiétude, moins immédiate, concerne la façon dont les mouvements islamistes radicaux, dont les ONG sont très actives et souvent plus efficaces que le gouvernement sur le terrain, pourraient tirer profit de la situation pour élargir leur audience, à l'image du Hezbollah ou du Hamas. « À terme, cela peut conduire les gens à penser que les groupes religieux sont plus efficaces que l'État, et renforcer le pouvoir des mosquées et des madrassas (écoles coraniques) », explique Qaiser Bengali.