Après une enfance passée à subir les quolibets de ses camarades en raison de son côté « intello » et de son homosexualité, Bradley Manning rejoint les rangs de l'armée en 2007. Recruté en tant qu'analyste des renseignements, ce natif de l'Oklahoma (Sud) cherche un nouveau départ dans la vie, ont raconté des connaissances au New York Times, qui publiait ce week-end une enquête fouillée sur lui. Mais très vite, le soldat première classe a découvert la rudesse des règles du Pentagone, en particulier la loi « Don't ask, don't tell » (ne rien demander, ne rien dire), qui oblige les homosexuels à taire leur orientation sexuelle sous peine de devoir quitter l'armée.
« Il s'opposait ouvertement à la loi "Don't ask, don't tell" et en parlait ouvertement à ses amis », poursuit Jeff Paterson, dont l'association coordonne la défense du soldat qui a été arrêté en mai sur sa base militaire des environs de Bagdad puis transféré en juillet dans une prison américaine.
Les autorités de Washington l'accusent d'avoir remis au site Internet Wikileaks la vidéo d'une bavure de l'armée américaine en Irak. Rendue publique en avril, elle montre le raid dans la capitale irakienne d'un hélicoptère américain au cours duquel ont été tués deux employés de l'agence de presse Reuters et plusieurs autres personnes. Depuis deux semaines, le jeune homme de 22 ans est également le principal suspect dans l'affaire des milliers de documents confidentiels portant sur les guerres en Irak et en Afghanistan, et publiés sur Wikileaks.
Pour certains de ses proches interrogés par le prestigieux quotidien new-yorkais, un tel coup d'éclat pourrait avoir été motivé par « son désespoir à se faire accepter ». Son ressentiment à l'égard du traitement imposé par l'armée aux homosexuels aurait été démultiplié après avoir rencontré son petit ami, peu de temps avant de partir en Irak. Amoureux, entouré de gens ouverts, « il avait trouvé une ambiance qui était à l'opposé de l'armée », écrit le New York Times, citant des amis du soldat.
M. Paterson met en garde : s'il s'avère qu'il est bien l'auteur des fuites, « il est difficile de croire qu'il l'ait fait pour tout autre raison que d'exposer les réalités de la guerre ».
Et sur Internet, Bradley Manning est carrément élevé au rang de « héros » du mouvement pacifiste américain. Le site antiwar.com dénonce ainsi la « campage de diffamation » menée, selon ses auteurs, par le gouvernement américain afin de « détourner l'attention » du contenu des fuites et ne pas « débattre du sens de l'occupation de l'Afghanistan ».
S'il est reconnu coupable, le jeune homme risque plus de 50 ans derrière les barreaux.
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