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Liban

Une formule simple de sainteté : « Dieu me voit »

S'il est une chose que prouve la vie d'Estephan Nehmé, c'est qu'on peut devenir saint en bêchant des vergers et en rendant de petits services à ses frères et voisins. C'est qu'avec une formule simple, « Dieu me voit », on peut sanctifier sa vie, la mettre à part, pour Dieu, jusqu'à en devenir une sorte de héros et d'en cueillir dans la vie l'union à Dieu et dans la mort la gloire des autels, comme il se fait aujourd'hui.
Sans rien présenter, de l'extérieur, de spectaculaire, la vie d'Estephan Nehmé, né en 1889, n'en est pas moins héroïque et ne manque pas d'intérêt sur le plan historique. Nehmé fut notamment témoin de la grande famine de 1915 - il avait alors 26 ans -, quand par les effets conjugués de la sécheresse, des sauterelles et de la guerre (la soldatesque ottomane confisquait le bétail et les récoltes, qui étaient destinés à l'armée du sultan), la population libanaise fut décimée aux deux tiers. Il fit souvent don de sa portion de pain et de lait caillé à des paysans affamés rencontrés en cours de journée, et recueillit même un nourrisson dont les deux parents étaient morts de faim, et qu'il vit en train de téter le sein de sa mère décédée. Le nourrisson fut adopté par le couvent.
Solidement bâti, intelligent et d'un naturel heureux, il avait l'art de faire régner la paix entre les moines et les journaliers qui travaillaient aux champs. Les couvents de l'ordre libanais maronite se le disputaient. Il en changea bien cinq ou six, passant de Kfifane à Mayfouk, de Mayfouk à Tannourine, puis de nouveau à Mayfouk, avant d'être envoyé à Jbeil puis de nouveau à Kfifane. Habile de ses mains, « il laissait rarement le manche de la scie refroidir », disait-on.
L'hagiographie voudrait qu'il ait renoncé au sacerdoce, par esprit d'humilité. La vérité est moins romantique. Ses supérieurs ne le lui proposèrent pas, et il l'accepta sans discuter. Il ne se fit pas ermite, comme Charbel, n'enseigna pas, comme Nehmetallah Hardini, ni n'endurât d'extraordinaires souffrances, comme Rafka, a rappelé le patriarche dans son homélie. Mais le soir, au retour d'une longue journée dans les champs, au lieu de reprendre son souffle comme tout le monde, il rendait visite aux moines âgés de son couvent et leur offrait ses services, en rangeant leur chambre par exemple.
À l'instar de nombreux moines de l'époque, son corps souffrit durablement du froid et de l'humidité qui régnaient dans les couvents, durant les mois d'hiver. Il mourut à 49 ans, le 30 août 1939, des suites d'une insolation. Cette date a été retenue par l'Église catholique pour la célébration de sa fête.

F. N.
S'il est une chose que prouve la vie d'Estephan Nehmé, c'est qu'on peut devenir saint en bêchant des vergers et en rendant de petits services à ses frères et voisins. C'est qu'avec une formule simple, « Dieu me voit », on peut sanctifier sa vie, la mettre à part, pour Dieu, jusqu'à en devenir une sorte de héros et...

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