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La Chine, porte-étendard des pays en développement ? - Diplomatie

La Chine, porte-étendard des pays en développement ?

Les autorités chinoises sont décidées plus que jamais à reprendre leur place dans le cercle des nations, à travers une diplomatie fondée sur le « soft power ».

Un panneau géant reproduisant un texte écrit par le dirigeant chinois Mao Tsé-Toung, à Zunyi, dans la province de Guizhou.

Malgré le fait que le régime communiste au pouvoir suscite toujours l'inquiétude, la Chine fait désormais rêver ! On est bien loin des stéréotypes nés après la révolution culturelle dans l'Empire du Milieu. Depuis une trentaine d'années, les autorités chinoises ont entamé un vaste programme de réformes à tous les niveaux, faisant de la Chine aujourd'hui le premier exportateur mondial et la troisième puissance économique. Face à la récente crise financière qui a secoué le monde, le pays a réussi à devenir un pôle incontournable, et les grands de ce monde se précipitent à Beijing pour présenter leur déférence aux dirigeants chinois, tout en occultant les sujets qui fâchent, en vue d'arracher des contrats juteux.
Avec une population de 1,3 milliard d'individus, la Chine est actuellement le pays le plus peuplé de la planète. Son statut de puissance nucléaire et son siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU lui confèrent un rôle de premier plan sur la scène internationale.
Toutefois le « dragon chinois » vient tout juste de se réveiller après la grande fête des olympiades en 2008, plus décidé que jamais à reprendre sa place dans le cercle des nations. Et son réveil dérange. Or les efforts colossaux réalisés par la Chine pour redorer son image sur le plan international ne semblent pas contenir les critiques qui fusent de toutes parts contre le régime chinois, malgré l'ouverture entérinée par le Parti communiste il y a 30 ans.
Face à cette situation, le gouvernement s'active d'arrache-pied à faire valoir ses droits en tant que pays en développement à travers notamment une diplomatie omniprésente à tous les niveaux. D'abord avec ses voisins, ensuite avec les pays développés, mais également et surtout avec les pays en voie de développement. Enfin, la diplomatie chinoise coopère avec les différentes institutions régionales et internationales comme l'ONU, l'UA et l'UE.

Un monde harmonieux
« La politique étrangère de la Chine n'a pas changé depuis la création de la République populaire », a affirmé Li Yingtao, professeur à l'université de Beijing pour les affaires étrangères, lors d'un séminaire consacré aux journalistes des pays en développement. « Elle est fondée sur la coexistence pacifique, la paix, le développement et la coopération entre les nations », ajoute-t-elle. Ces fondements sont illustrés par le respect de la souveraineté, la non-ingérence et l'égalité entre les pays. Les Chinois œuvrent en outre pour un principe majeur qui définit non seulement leur politique étrangère, mais également tout leur mode de vie : « Un monde harmonieux ».
Le professeur Li Xiguang, de l'université de Tsinghua, explique de son côté cette constante dans la politique extérieure de la Chine par sa situation géographique exceptionnelle et la nature démographique complexe du pays. « La Chine est un très grand pays. Nous sommes entourés par 22 voisins, dont plusieurs puissances nucléaires. Cette complexité nous pousse à œuvrer constamment pour résoudre les problèmes par le dialogue et la diplomatie », estime-t-il.
Revenant sur la dernière visite d'Obama en Chine, M. Li affirme que l'administration américaine a tenté en vain de convaincre le gouvernement chinois d'envoyer des troupes en Afghanistan. La complexité du tissu interne du pays semble lui aussi peser sur la politique étrangère de la Chine. « Il y a près de 30 millions de musulmans dans notre pays. Et toute action contre un pays musulman pourrait heurter les sentiments religieux d'une partie de la population », ajoute-t-il.
Selon Li Yingtao, « les relations Sud-Sud et les liens entre les pays en développement sont le socle de la politique étrangère de la Chine qui partage avec ces pays le même destin, ainsi qu'un passé et un futur en commun ». Malgré sa puissance militaire et économique, la Chine aime se considérer toujours comme un pays en développement, se plaçant ainsi comme le défenseur des intérêts de ces pays face aux États riches.

L'Afrique
Confirmant cette politique, le professeur Li Xiguang ajoute que « le gouvernement chinois a une politique très engagée et très positive en Afrique, qui est l'amie intime et l'alliée de la Chine ». Selon lui, son pays « doit à l'Afrique une dette. En effet, les pays africains ont été les premiers à soutenir Beijing pour obtenir un siège permanent au Conseil de sécurité de l'ONU. En retour, les Chinois ont toujours appuyé l'indépendance de ces pays face à leurs colonisateurs ».
Li Yingtao explique en outre que « le soutien chinois actuel aux pays africains n'est pas conditionné par des demandes politiques comme c'est le cas d'anciens pays colonialistes. C'est pourquoi l'aide de Beijing à l'Afrique n'est pas assimilable au néocolonialisme ».
Or de leur côté, les défenseurs des droits de l'homme critiquent souvent le régime chinois, estimant que ce dernier ne se soucie guère de la nature des gouvernements avec lesquels il collabore, n'hésitant pas à financer des dictateurs au nom de ses intérêts économiques et de son besoin de matières premières. Une remarque valable toutefois pour les pays occidentaux également.

Soft Power
Dans ce contexte, les Chinois estiment que les critiques issues des pays occidentaux sont fondées sur un modèle véhiculé par la culture et la vision occidentales. « Le monde se tourne vers les États-Unis, vers le monde occidental. Les gens vont vers la statue de la liberté. Au nom de la démocratie, des droits de l'homme, les Occidentaux exercent une forme de " Soft Power " pour influencer le monde », affirme Li Xiguang.
Selon lui, l'influence se fait à travers la culture, l'éducation. M. Li estime que les médias et les journalistes connaissent souvent la Chine à travers Taïwan, l'allié des Américains. En apprenant par exemple le Chinois à Taïwan, on est spontanément influencé par le régime taïwanais. « Pour faire face à la propagande occidentale, notre université propose désormais des cours pour les étrangers, avec des bourses financées partiellement par le gouvernement », ajoute M. Li. De ce fait, le nombre des étudiants étrangers a augmenté de 36 000 à 110 000 durant les dix dernières années. De plus, la Chine a déjà ouvert près de 200 centres culturels « Confucius » à travers le monde pour enseigner la langue chinoise (le mandarin) et pour mieux faire connaître la culture et l'histoire du pays à travers une panoplie d'activités et d'expositions culturelles tout au long de l'année. Là aussi, cette offensive a porté ses fruits puisque le nombre de touristes étrangers a augmenté, atteignant les 17 millions par an.
Enfin, le gouvernement chinois commence à investir énormément dans les médias, la guerre de l'information étant un pilier essentiel du « soft power ». Les heurts qui ont eu lieu en 2008 au Tibet avaient en effet un rôle déclencheur, montrant les carences du régime chinois en matière de communication et d'information. À cette époque, les critiques virulentes contre les autorités avaient choqué la population qui a été déçue par les réactions occidentales. Jouant sur ce sentiment nationaliste, le régime communiste a su profiter à merveille de cette situation. Sûre de sa puissance, la Chine ignore aujourd'hui les jugements de l'étranger et s'impose de plus en plus sur la scène internationale.
Malgré le fait que le régime communiste au pouvoir suscite toujours l'inquiétude, la Chine fait désormais rêver ! On est bien loin des stéréotypes nés après la révolution culturelle dans l'Empire du Milieu. Depuis une trentaine d'années, les autorités chinoises ont entamé un vaste programme de...