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Culture - Livre

Le poids de la plume de Schmitt pour un sumo…

Auteur à succès qui a touché avec talent et une certaine grâce divers sujets, Eric-Emmanuel Schmitt se penche aujourd'hui sur le Japon et les sumos. Récit crayeux et court, qu'on a tendance facilement à traiter de décevant, pour une parabole sur l'invisible. Derrière les nuages il y a toujours un ciel...

Le sumo qui ne pouvait pas grossir d'Eric-Emmanuel Schmitt (Albin Michel, 101 pages) est un roman qui caracole au hit-parade des succès de librairie. Opus d'allure squelettique, ce roman contestable et contesté par sa légèreté d'écriture, mais aussi par sa narration délibérément aux confins du naïf a pourtant séduit les lecteurs et certains critiques. Car avec l'auteur de Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran on ne touche pas impunément à la littérature. Par-delà les mots et les histoires, somme toute bien simples, se cachent des révélations denses et touchantes.
Révolté, désabusé et quelque peu antisocial est ce jeune adolescent Jun qui traîne son mal de vivre dans un Tokyo de carte postale avec ses corbeaux, ses immondices et l'infinie marée humaine qui submerge les artères, venelles et ruelles de la capitale nipponne.
Sur la chaussée où Jun vend des bagatelles et des bricoles, une rencontre décisive: celle de Shomintsu, maître d'une école de sumo. L'enfant malingre apprend, contre toute attente, qu'«un gros sommeille en lui...». «Je vois le gros en toi», lui affirme le maître.
Vaine résistance à cette idée incongrue et inattendue car le maître a aussi l'art de persuader. Voire celui de guérir comme un psychiatre qui démonte le passé pour mieux reconstruire le présent...
Et Jun se réconcilie avec la vie et la formation du sumo après avoir exorcisé tous ses démons. De sa mère atteinte d'une singulière maladie cardiaque, appelée le syndrome de Williams, au drame de son père absent et dépassé par les aléas de la vie, Jun finit par comprendre ce qu'il faut de courage et de force pour aimer et accepter la vie.
«Dans ce concours de saucisses qui se culbutent» (c'est ainsi que l'auteur fait parler son personnage), Jun, à dix-huit ans, qui avait tout perdu sauf la liberté, pèse alors quatre-vingt-quinze kilos et est le vainqueur non des autres, mais de soi.
Et c'est avec sérénité qu'il retrouve la belle Reiko pour fonder une famille et accepte d'être père, lui le gosse délaissé.
Grâce à une histoire au ton parfois enfantin, avec cette candeur qui est l'empreinte d'Oscar et la dame rose, mais laissant au lecteur plus d'une surprise, Eric-Emmanuel Schmitt avance par petites coudées de phrases lumineuses sur les tourmentes intérieures. Phrases nerveuses, courtes, d'une fausse innocence, qui en disent long sur l'art des silences et des non-dits.
Petite leçon sur le pouvoir salvateur de l'introspection pour un récit à la douceur et la transparence d'une estampe japonaise. Un récit mêlant entêtement de l'enfance et vertus du monde zen.
Mine de rien, sans jamais appuyer sur les mots ou les situations, avec un art d'écrire (même si parfois on a l'impression que c'est bâclé) et de conter (on ne touche pas forcément ici au réalisme), voilà un récit relativement attachant, qui effleure en toute délicatesse des abîmes de violence et de douleur. Un récit nimbé d'une impalpable spiritualité...
Le sumo qui ne pouvait pas grossir d'Eric-Emmanuel Schmitt (Albin Michel, 101 pages) est un roman qui caracole au hit-parade des succès de librairie. Opus d'allure squelettique, ce roman contestable et contesté par sa légèreté d'écriture, mais aussi par sa narration délibérément aux confins du naïf a pourtant...

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