Rechercher
Rechercher

Culture - Conférence

« Les collections de manuscrits arabes du Liban et d’Espagne » : expériences croisées

« Les collections de manuscrits arabes du Liban et d'Espagne » ont été l'objet d'une rencontre de spécialistes à la Bibliothèque orientale.

De gauche à droite : le père Faez Freijatt, Maud Stephan et Philippe Roisse.          (Michel Sayegh)

Deux objectifs prévalaient à cette table ronde (organisée par l'institut Cervantès de Beyrouth, l'ambassade d'Espagne au Liban et l'association culturelle espagnole AIDA). Partager, d'une part, les expériences croisées du Liban et de l'Espagne, deux pays dont les guerres civiles ont eu des conséquences désastreuses sur leurs fonds de manuscrits anciens. D'autant plus que l'Espagne possède au sein de ses collections plusieurs milliers de manuscrits arabes. Et, d'autre part, mettre en lumière la richesse de ce patrimoine, notamment au Liban où il reste, à l'heure de la reconstruction de la Bibliothèque nationale, très largement méconnu.  
Comme l'a démontré d'ailleurs, dans son intervention intitulée «La Bibliothèque nationale du Liban, malgré tout»..., Maud Stephan, professeur en sciences de l'information à l'UL et membre du Comité pour le suivi du projet de renaissance de la Bibliothèque nationale du Liban. «L'histoire de la BNL témoigne, dit-elle, que, depuis ses origines, cette institution culturelle est victime de tiraillements entre quelques individus qui veulent croire en la possibilité de construire des institutions d'État, et d'autres individus, au sein de ce même État, qui n'œuvrent que pour leur intérêt personnel et qui opposent à tout projet culturel une résistance passive sous forme de négligence et d'indifférence. »
Après avoir rappelé l'historique de cette institution nationale (fondée par Philippe de Tarazi en 1921) et les turbulences par lesquelles sont passées ses collections - de manuscrits notamment, parmi lesquels figurait le fameux Livre des rois (Shahnama) de Fardawsi, mystérieusement disparu -, Maud Stephan a dressé un rapide bilan de ce qui a été réalisé, depuis 1999 (date à laquelle l'opération de réhabilitation de la Bibliothèque nationale a été lancée), au niveau du nettoyage, de la restauration des ouvrages et de la formation de restaurateurs - rappelant au passage que la promesse de fonds de l'émir du Qatar pour l'aménagement du local à Sanayeh n'a toujours pas été honorée - et de ce qui reste à faire, notamment au niveau d'une numérisation de qualité des collections.
Père Faez Freijatt, en charge de la collection de manuscrits du couvent Saint-Sauveur de Joun, s'est lancé, pour sa part, dans une longue énumération des manuscrits appartenant aux fonds des patriarcats, des institutions religieuses islamiques et des bibliothèques laïques. Dans son panorama de l'état des collections au Liban, le père Freijatt a abordé la question de leur dispersion et de leur pillage au cours de la guerre et celle des tentatives - ardues et coûteuses - pour les récupérer.

Barricades...
Cette expérience est sensiblement similaire à ce qu'ont connu les Espagnols après la guerre civile, au cours de laquelle des ouvrages anciens de l'Université Complutense de Madrid ont, par exemple,  servi à ériger des barrages, a indiqué le modérateur de cette séance, Philippe Roisse, chercheur associé au Cedrac-USJ et directeur du projet «Manuscrits arabes dans les bibliothèques du Liban : la circulation interconfessionnelle du savoir ».
Traduisant les grandes lignes de la communication de Maria Jesus Viguera Molins, professeur d'études arabes et islamiques de cette même Université Complutense, qui, en raison d'une bronchite, n'a pu participer, comme prévu, à cette table ronde, Philippe Roisse a fait état, selon le rapport de Mme Viguera Molins (responsable d'un projet de catalogage des manuscrits arabes dans toutes les collections espagnoles), de l'existence de quelque 4 500 manuscrits arabes dans les collections espagnoles, réparties dans 19 villes.
À Madrid, on trouve des manuscrits arabes dans 14 institutions publiques, sans compter quelques fonds privés. Et parmi les manuscrits qui figurent dans les collections les plus importantes, celles de la Bibliothèque nationale, du monastère de l'Escorial ou encore de l'abbaye bénédictine de Montserrat, certains proviennent du Liban, indique, en substance, Mme Viguera Molins.  

Des manuscrits arabes autochtones en Espagne
L'importante particularité des manuscrits arabes d'Espagne est qu'ils proviennent en partie de fonds autochtones de l'époque maure de l'Andalousie. Du moins ceux qui auront échappé à l'Inquisition. L'autre partie étant le fait d'acquisitions, le plus souvent en provenance des pays du Maghreb, au vu de la graphie maghrébine utilisée par les copistes. «Même si les manuscrits arabes d'Espagne abordent des sujets aussi variés que le droit islamique, la médecine, la pharmacopée, l'astronomie, l'astrologie, les mathématiques, la poésie, sans oublier bien sûr le Coran, les manuscrits conservés de l'époque andalouse ne suffisent pas à rendre un témoignage complet de ce qui se passait alors en Espagne», estime le modérateur. Lequel a signalé également la délocalisation de ces manuscrits dans les villes les plus riches du pays comme Madrid et Barcelone alors que les collections des anciennes capitales arabes comme Grenade, Cordoue ou Séville n'en comptent pratiquement plus.
De nombreux autres détails intéressant spécifiquement les spécialistes ont été donnés au cours de cette conférence, clôturée par cette remarque positive du directeur de l'institut Cervantès, Edouardo Calvo Garcia: «On retiendra de cette table ronde que toutes les guerres, tous les pillages et les obstacles n'arrivent pas à empêcher la transmission des connaissances.» Et, par là, de la culture...
Deux objectifs prévalaient à cette table ronde (organisée par l'institut Cervantès de Beyrouth, l'ambassade d'Espagne au Liban et l'association culturelle espagnole AIDA). Partager, d'une part, les expériences croisées du Liban et de l'Espagne, deux pays dont les guerres civiles ont eu des conséquences désastreuses sur leurs fonds...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut