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Moyen Orient et Monde - Rencontre

La société civile irakienne, un chantier en construction

Interdites sous le régime de Saddam Hussein, les ONG irakiennes connaissent, six ans après l'invasion américaine, un essor remarquable.

Sous le régime de Saddam Hussein, les ONG locales dédiées à la promotion de la démocratie et à la protection des droits de l'homme étaient pratiquement inexistantes. Visées par des restrictions très sévères, les organisations indépendantes étaient le plus souvent obligées de travailler dans la clandestinité à partir de l'étranger. Aujourd'hui, six ans après l'invasion américaine et la chute de Saddam Hussein, les organisations non gouvernementales font partie intégrante de la société irakienne et représentent un facteur important de redressement du pays à tous les niveaux, social, économique, sanitaire et humanitaire.
Treize ONG irakiennes étaient réunies cette semaine à Beyrouth, à l'invitation de l'Association de développement pour l'homme et l'environnement (DPNA) pour participer à un séminaire de formation sur le thème de la démocratie.
« Cela n'a évidemment pas été facile au début, raconte à L'Orient-Le Jour, Israa Hassan Abed, de l'Association des femmes de Bagdad. Nous étions considérés comme des espions par la population, et le gouvernement croyait que nous complotions contre lui. » « Les Irakiens ne sont pas familiers avec le concept des ONG. C'est pour cela que nous avons rencontré beaucoup de difficultés à nos débuts », renchérit Salah al-Badry, responsable au réseau de l'Action civique irakien. « Et le chemin est encore long », estime-t-il.
Dans un pays comme l'Irak, meurtri par la violence et la guerre, la mission des ONG locales est des plus ardues et des plus dangereuses. Le terrorisme, l'extrémisme religieux et l'incapacité à protéger les droits les plus fondamentaux constituent les problèmes les plus graves auxquels sont confrontés les humanitaires en Irak. Six ans après le début des hostilités, la situation demeure critique pour la population irakienne : plus de 95 000 civils ont été tués, environ quatre millions de personnes ont été déplacées et quatre autres millions d'Irakiens vivent, selon Oxfam, « dans une situation d'insécurité alimentaire et connaissent un besoin extrême de divers types d'aide humanitaire ». « La guerre a détruit toute l'infrastructure irakienne et a engendré des centaines de milliers de veuves et d'orphelins. La société civile travaille aujourd'hui pour redresser le pays et venir en aide à toutes les personnes dans le besoin », précise de son côté Farhoud Samir, de l'Institut irakien pour les droits de l'homme.
Hakima Hasuon, une avocate de Diwaniyah (130 km au sud de Bagdad), travaillant pour le Centre des droits de la femme et de l'enfant, connaît de très près les problèmes auxquels sont confrontées les familles irakiennes victimes des violences. « Les femmes et les enfants sont les plus touchés par la guerre et représentent la majorité des déplacés irakiens », explique-t-elle. L'ONG qu'elle représente offre des services d'enseignement et juridiques aux femmes et aux enfants dans le besoin. « En deux mois, nous avons reçu 50 femmes victimes de violence conjugale. Nous les aidons à porter plainte si elles le souhaitent et nous les défendons devant la justice », poursuit-elle, tout en déplorant la faible implication du gouvernement irakien dans les affaires humanitaires. « Le Nord est la région la plus favorisée et reçoit la plus grande partie des fonds, estime Mme Hasuon. Le Kurdistan octroie plus de 30 % de son budget aux ONG travaillant dans la région, et les donateurs étrangers leur offrent une aide 60 % supérieure à celle que reçoivent les autres organisations dans le reste du pays. »
« La compétition est très forte entre les ONG locales », confirme Adnane Bahaya de l'institut culturel Akad, basé dans la province de Babel (Sud). Selon lui, il existe aujourd'hui un peu plus de 8 000 ONG dans tout l'Irak. Le gouvernement irakien étudie à présent un projet de loi pour réguler les différentes organisations indépendantes travaillant dans le pays. Cette loi permettrait aux autorités de contrôler le financement et les activités des humanitaires. Le Comité de coordination des ONG irakiennes (qui chapeaute plus d'un millier d'organisations non gouvernementales) a sévèrement critiqué cette loi et menacé de ne pas la respecter au cas où elle serait adoptée. « Cette loi crée une entrave au travail des humanitaires en rendant plus difficile l'accès des ONG aux fonds étrangers », a récemment affirmé le comité dans un communiqué.
« Nous avons encore un long chemin à parcourir, mais, sans soutien, nous ne pourrons pas avancer, confie Hakima. Avec le retrait prochain des forces étrangères de l'Irak, nous pourrons enfin assumer notre rôle avec plus d'indépendance, dit-elle. Le gouvernement doit toutefois renforcer son autorité et la sécurité afin d'éradiquer la violence et de barrer la route aux ingérences étrangères dans les affaires du pays. C'est notre souhait le plus cher », conclut-elle, tout en affirmant être optimiste pour l'avenir de son pays.
Sous le régime de Saddam Hussein, les ONG locales dédiées à la promotion de la démocratie et à la protection des droits de l'homme étaient pratiquement inexistantes. Visées par des restrictions très sévères, les organisations indépendantes étaient le plus souvent obligées de travailler dans la...
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