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Actualités - CHRONOLOGIE

« La souveraineté du Liban, une préoccupation bien ancrée à Washington », souligne l’ICG

NEW YORK, de Sylviane ZEHIL Le dernier rapport de l’International Crisis Group (ICG) intitulé « Dialoguer avec Damas ? Les leçons de l’expérience française » vient de paraître, quelques jours avant l’investiture du nouveau président américain, Barack Obama, et la mise en place de la nouvelle administration américaine. Le document tire des leçons pratiques à l’intention du nouveau président américain, tout en proposant à Paris des idées créatives pour consolider ce qui reste une initiative ténue. Selon ce rapport paru le 15 janvier, l’un des premiers gestes de Barack Obama serait probablement de s’engager dans le type de diplomatie régionale longtemps rejetée par son prédécesseur et qui a pour thème « Dialoguer avec l’ennemi ». Mais comment devrait-il concrètement approcher Damas ? « Alors que l’administration Obama examine sa politique concernant la Syrie, l’expérience française offre des leçons qui incitent à méditer », explique Peter Harling, directeur à Crisis Group du projet « Irak, Syrie, Liban », basé à Damas. « Déterminé à engager le dialogue mais prêt à le rompre, créatif dans son approche tout en l’insérant dans un cadre clairement défini, Nicolas Sarkozy a aussi su saisir des opportunités imprévisibles quand elles se présentaient », souligne Peter Harling. Et d’ajouter : « Le rapport indique que l’expérience française est toujours en cours, mais son issue demeure inconnue à ce jour, alors que la France cherche à en mesurer la portée à Gaza, sur le conflit israélo-arabe, la souveraineté libanaise, la lutte contre le terrorisme ou encore le dossier nucléaire iranien. Elle ne deviendra pleinement valable, et donc pertinente aux yeux des États-Unis, que si elle démontre clairement en quoi la Syrie peut devenir un partenaire crédible et un facteur de stabilité dans la région. » Le rapport poursuit : « Cela étant, les succès et les limites de l’expérience française – toujours énergique, souvent intuitive, parfois contradictoire – sont déjà riches en enseignements pour l’administration américaine. Suite à une longue interruption des relations – un point commun des mandats des présidents Chirac et Bush –, il est nécessaire de prévoir une phase assez longue d’observation réciproque, d’examen des possibilités et de reconstruction de relations de confiance. En d’autres termes, il ne faut pas s’attendre à des résultats rapides. Il faut également être autant patient dans la phase de négociations que rapide dès qu’une opportunité se présente. » Le rapport note ensuite que « pour que le dialogue ait une chance de réussir, il doit se faire sur la base de buts clairs et constants, et non pas en fonction d’une liste fluctuante de souhaits ». « Il ne faut pas hésiter à rompre le dialogue si les évènements le justifient, tout en maintenant des lignes de communication, de façon à réagir rapidement dès que les conditions d’une ouverture sont à nouveau réunies. La prochaine administration américaine pourrait s’inspirer d’une démarche dans laquelle tout progrès est clairement reconnu et récompensé, et tout recul sanctionné. » Le rapport remarque enfin que « certains aux États-Unis rêvent d’une rupture dans les relations syro-iraniennes ». « Elle ne se produira pas, du moins dans les circonstances actuelles. Mais en jouant la carte du rapprochement avec la France, la Syrie a montré son souhait d’élargir son portfolio d’alliances stratégiques. Le rapprochement franco-syrien deviendra vite intenable s’il n’entraîne pas avec lui les États-Unis », prévient Robert Malley, directeur du programme Moyen-Orient/Afrique du Nord de l’International Crisis Group et ancien conseiller du président Clinton pour les affaires israélo-arabes. « À supposer que Washington, suite à un dialogue stérile avec Damas, revienne à une logique d’isolement et de pressions, il deviendra difficile pour le gouvernement français de faire cavalier seul », a-t-il prévenu. Comment engager ce dialogue ? Est-ce un nouveau tournant que souhaite prendre la communauté internationale, puisque le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, avait déclaré à L’Orient-Le Jour, avant son périple moyen-oriental, que son message au Liban sera d’encourager le peuple libanais et le gouvernement à consolider l’unité nationale du Liban et à améliorer leurs relations avec la Syrie ? Faut-il ou non engager le dialogue avec la Syrie ? « Ce débat a déjà été tranché par l’équipe Obama, répond Peter Harling à L’Orient-Le Jour. Et d’ajouter : « La question qui se pose aujourd’hui, c’est comment l’engager, avec quels objectifs, et à quel prix ? Préserver la souveraineté libanaise, par exemple, est une préoccupation désormais bien ancrée à Washington, au Congrès et ailleurs. Ce rapport de Crisis Group s’inscrit dans une réflexion visant à donner des réponses concrètes à ces interrogations », a encore affirmé le directeur de l’International Crisis Group à partir de Damas. Dialoguer avec Damas signifie-t-il aussi mettre une sourdine au tribunal international pour juger les responsables de l’assassinat de Rafic Hariri ? Quel impact aura ce dialogue avec la Syrie sur le tribunal ? Ce tribunal qui entamera ses travaux le 1er mars « condamnera-t-il les coupables par contumace, tandis que la Syrie rendrait sa propre justice », comme l’a promis le président Bachar el-Assad, en jugeant d’éventuels responsables – voire boucs émissaires – pour « haute trahison », comme vous l’avez noté dans Le Monde du 2 juin 2007 ? « Il n’y a pas lieu d’engager le dialogue sur la question du tribunal. Celui-ci renvoie à un processus judiciaire qui doit justement, pour demeurer crédible, rester aussi indépendant et dépolitisé que possible. D’ailleurs, ce processus, né d’une décision du Conseil de sécurité de l’ONU, a depuis acquis une vie propre, et il serait difficile à l’administration américaine de l’entraver, même si elle le souhaitait un jour. La position de Crisis Group, exprimée dans nos rapports et tribune, a toujours été en faveur de la poursuite d’un processus juridique dépolitisé », a expliqué à L’Orient-Le Jour Peter Harling. Fondée en 1994 par George Soros, l’International Crisis Group est une organisation multinationale, à but non lucratif, basée à Bruxelles, dont la mission est de prévenir et de résoudre les conflits meurtriers grâce à une analyse de la situation sur le terrain et des recommandations indépendantes. Les équipes de ce groupe de réflexion effectuent des évaluations et récoltent des informations dans les pays sensibles afin de prévenir les crises. Des comptes rendus sont régulièrement rédigés afin de toucher les décideurs internationaux. L’ICG travaille en collaboration avec les gouvernements et d’autres ONG afin d’attirer leur attention sur les conflits possibles et d’anticiper les crises. Ce groupement est financé par 21 gouvernements.
NEW YORK, de Sylviane ZEHIL

Le dernier rapport de l’International Crisis Group (ICG) intitulé « Dialoguer avec Damas ? Les leçons de l’expérience française » vient de paraître, quelques jours avant l’investiture du nouveau président américain, Barack Obama, et la mise en place de la nouvelle administration américaine. Le document tire des leçons pratiques à...