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Actualités - ENTRETIEN

Entretien Sarkozy condamne l’offensive israélienne, mais aussi la « lourde responsabilité » du Hamas

« Celui qui ne prend pas le risque d’échouer se prive également de la chance de réussir ». Cette phrase de Nicolas Sarkozy, qui montre toute la détermination du président de la République française de jeter toutes ses forces dans une tentative de mettre fin à la guerre de Gaza, résume aussi bien le personnage, un passionné imprégné de l’esprit de l’histoire, dont la volonté est toute entière tendue vers le succès de ses actions, qu’une certaine idée faite de prestige, de grandeur, de noblesse, d’ambition et d’esprit d’initiative ; une idée plusieurs fois millénaire de la France. La France, qui n’a jamais épargné aucun effort pour une paix juste et équitable au Proche-Orient, et qui a toujours pris la défense des peuples opprimés. Dans un entretien accordé à L’Orient-Le Jour, ainsi qu’à nos confrères d’an-Nahar et d’as-Safir à la veille de son passage demain au Liban dans le cadre de sa tournée régionale pour tenter de mettre fin à la violence, Nicolas Sarkozy met une fois de plus en évidence sa volonté de « prendre tous les risques pour aider à trouver une solution et faire renaitre l’espoir de paix dans la région ». Et si l’actualité a relégué quelque peu au second plan le contentieux libano-syrien, le président français ne manque pas, tout en se félicitant de l’avancée des relations entre les deux pays, de rappeler qu’il « n’est pas naïf » pour autant et qu’« il reste encore de nombreuses étapes à franchir ». M. H-G. L’ORIENT-LE JOUR - Monsieur le Président, vous avez décidé, il y a quelques jours, d’ajouter à votre visite au Liban une tournée au Proche-Orient afin de répondre à l’urgence de la situation à Gaza. Cette tournée a-t-elle encore un sens après le lancement, samedi soir, de l’offensive terrestre israélienne ? Quels sont vos objectifs désormais ? Pensez-vous réellement parvenir à faire cesser les combats ? Nicolas Sarkozy - Ce n’est pas parce que c’est plus compliqué que cela a moins de sens. Au contraire, le lancement de l’offensive terrestre israélienne rend la nécessité de parvenir à un cessez-le-feu plus urgente encore. Cette offensive, nous l’avons condamnée avec nos partenaires européens parce qu’elle éloigne encore un peu plus les chances de la paix, et parce qu’elle rend plus difficile l’acheminement de l’aide aux populations de Gaza. Je redirai d’ailleurs aux autorités israéliennes qu’il est absolument essentiel qu’elles laissent passer l’aide humanitaire à Gaza. Mais je veux redire ici que nous condamnons avec la même fermeté la poursuite des tirs de roquette qui sont une provocation inadmissible. Le Hamas, qui a décidé la rupture de la trêve et la reprise des tirs de roquette sur Israël, porte une responsabilité lourde dans la souffrance des Palestiniens de Gaza. Aujourd’hui, l’urgence, c’est de faire cesser les violences. Il faut trouver le moyen de parvenir le plus rapidement possible à un cessez-le-feu et permettre la reprise du processus de paix. C’est pour cela que je suis ici aujourd’hui, pour aider à trouver une solution. Et c’est dans et esprit que je rencontrerai, outre le Président Abbas et le Premier ministre Olmert, le Président Moubarak et le Président Assad, parce qu’ils peuvent jouer un rôle déterminant pour mettre fin à cette escalade. La France, parce qu’elle a su construire un lien de confiance et d’amitié avec l’ensemble des parties, a une responsabilité particulière : celle de prendre tous les risques pour aider à trouver une solution et faire renaitre l’espoir de paix dans la région. Est-ce que cela marchera ? Est-ce nous parviendrons à faire taire les armes ? Je n’en sais rien. Tout ce que je sais, c’est que celui qui ne prend pas le risque d’échouer se prive également de la chance de réussir. Et franchement, qui pourrait me reprocher de tout tenter pour mettre enfin un terme à tant de souffrances ? L’OLJ - Il s’agit de votre seconde visite au Liban en six mois, la première ayant eu lieu quelques jours après l’élection du président Michel Sleiman. Quel message portez-vous aux Libanais ? N.S - Mon message au peuple libanais est très simple : continuez ! Continuez les efforts engagés, continuez à avancer sur le chemin du dialogue et de la réconciliation, continuez à construire ensemble le Liban libre, démocratique et souverain auquel tous les Libanais aspirent. Tous ensembles, vous êtes en train de réussir quelque chose d’extraordinaire : vous êtes en train de faire revivre le miracle libanais. La communauté internationale, et la France en particulier, sont à vos côtés pour vous y aider. La dernière fois que je suis venu au Liban, au mois de juin, le Président Sleimane venait tout juste d’être élu et le Liban commençait à peine à sortir de la crise politique profonde dans laquelle il était plongé. J’avais alors tenu à venir accompagné des dirigeants de principaux partis politiques français afin de dire au Président Sleimane et à l’ensemble du peuple libanais que le soutien de la France n’était ni une affaire de partis, ni une affaire de personnes, mais que c’était le soutien de la Nation française toute entière. C’était il y a seulement six mois, et regardez le chemin parcouru depuis : le gouvernement d’union a été mis en place, les institutions libanaises fonctionnent, il y a maintenant un Président élu, un gouvernement qui travaille et un parlement qui est redevenu le lieu naturel des débats entre Libanais. Les tensions se sont apaisées, la situation sécuritaire s’est améliorée, il y aura bientôt des élections législatives. Et puis je n’oublie pas le dialogue national, engagé sous la conduite du Président Sleimane, qui doit mener à terme à une véritable réconciliation nationale, notamment en permettant aux Libanais de s’accorder sur une stratégie de défense nationale. Les prochaines élections législatives devront se tenir dans la plus grande transparence et dans un esprit démocratique, en dehors de toute violence. C’est fondamental car elles seront une étape décisive dans le processus de réconciliation, et un moment de vérité pour la démocratie libanaise. En venant aujourd’hui, je veux à nouveau témoigner de l’amitié profonde de la France, et de mon affection personnelle, pour votre pays et pour le peuple libanais. Je veux féliciter le Président Sleimane et tous les responsables libanais pour tous les progrès accomplis depuis l’accord de Doha et les encourager à aller toujours plus loin, avec notre soutien, pour que le Liban puisse enfin connaître la paix et la stabilité. Mon voyage aujourd’hui concerne d’ailleurs un aspect très concret de cet engagement. Je viens en effet encourager nos troupes, déployées au Sud-Liban dans le cadre de la résolution 1701 des Nations Unies et des forces de la FINUL. J’ai choisi cette année de venir présenter mes vœux aux armées à partir de ce théâtre d’opérations. C’est vous dire l’importance que j’attache au soutien de la France à cette mission essentielle pour la stabilité de la région et la paix dans le monde. L’OLJ - Les élections parlementaires libanaises sont prévues au printemps 2009. Quelle est leur importance selon vous, sachant que certains craignent qu’elles ne s’accompagnent de troubles sécuritaires, ou d’un retour des ingérences étrangères ? N.S. - Je vous l’ai dit, ces élections sont absolument fondamentales. L’enjeu, c’est d’aller au bout du processus de réconciliation engagé depuis six mois par l’ensemble des parties libanaises. L’enjeu, c’est que les Libanais décident ensemble, librement et pacifiquement, de leur destin. L’enjeu, c’est de faire revivre pleinement l’esprit de diversité, de pluralisme et de tolérance qui est au cœur du miracle libanais. C’est pourquoi la France est tellement attachée à la tenue, dans les délais prévus par la constitution, d’élections libres, exemptes de toute violence, transparentes et démocratiques. La responsabilité première du bon déroulement de ce scrutin incombe aux Libanais eux-mêmes. C’est à eux qu’il revient de se montrer unis, de rejeter la violence, et de décourager toute provocation et toute tentative d’ingérence extérieure. Pour accompagner cette étape importante, la France a fait savoir qu’elle était disposée, comme en 2005 et si les autorités libanaises le souhaitent, à apporter son concours au bon déroulement des élections, aux côtés de ses partenaires de l’Union Européenne et de la communauté internationale. L’OLJ - La Russie a récemment annoncé un don de 10 chasseurs Mig 29 au Liban, et les États-Unis ont promis de lui livrer des tanks. La France compte-t-elle également doter l’armée libanaise d’armements sophistiqués ? N.S. - Depuis la guerre de l’été 2006, la France a apporté à plusieurs reprises son soutien matériel à l’armée libanaise, par la livraison de munitions et d’équipements divers, notamment en remettant en état la totalité du parc des VAB de l’armée libanaise. Des livraisons d’armement et d’une vedette française pour la marine sont prévues au cours du premier trimestre de l’année 2009. J’ajoute que le budget de la coopération de défense pour le Liban a été maintenu, en dépit des contraintes budgétaires très fortes qui pèsent sur notre pays. Il nous permettra de poursuivre les actions de formation que nous menons depuis longtemps déjà, et qui sont je crois particulièrement appréciées de nos amis libanais. Et puis, bien sûr, la France participe, avec 1615 soldats et 447 marins, à toutes les composantes de la FINUL. Nous contribuons ainsi à l’entraînement des forces armées libanaises, notamment de la marine. Quant à la fourniture d'équipements, les demandes exprimées par les autorités libanaises sont toujours examinées avec la plus grande attention. L’OLJ - Votre ouverture sur la Syrie a conduit à la résolution d’un des problèmes qui minent les relations libano-syriennes, et ceci à travers l’établissement de relations diplomatiques entre les deux pays. Croyez-vous pouvoir amener Damas à résoudre les autres dossiers litigieux, à commencer par la délimitation des frontières entre les deux pays ? N.S. - En rétablissant le dialogue avec Damas, j’ai pris un risque personnel, que j’assume totalement, notamment auprès de mes amis libanais. Les avancées que nous venons d’évoquer, tout ce qui s’est passé au Liban depuis six mois aurait-il été possible si nous n’avions pas pris ce risque ? Je suis convaincu que non. Mais ce dialogue – je l’avais dit dès le départ – se devait d’être ferme, exigeant et de déboucher sur des avancées concrètes. C’est ce qui s’est passé et je suis content aujourd’hui de voir que les choses progressent. L’établissement de relations diplomatiques entre le Liban et la Syrie, et l’échange, prévu dans les tous prochains jours d’ambassadeurs, marquent une étape historique et irréversible dans le processus de normalisation entre vos deux pays. Je ne suis pas naïf pour autant. Je sais bien qu’il reste encore de nombreuses étapes à franchir. Mais qui aurait cru, il y a seulement six mois, que nous en serions là aujourd’hui ? Le Liban et la Syrie sont désormais engagés dans la voie d’un vrai dialogue qui doit permettre aux deux pays de reconstruire des relations basées sur la confiance et sur le respect de la souveraineté de chacun. Ce n’est pas simple, mais je veux croire que vous y parviendrez. Sachez en tout cas que je montrerai la même détermination dans l’avenir, pour suivre la réalisation des autres engagements pris lors du sommet entre le Président Michel Sleimane et le Président Bachar el-Assad, notamment en ce qui concerne la délimitation de la frontière ou le règlement de la douloureuse question des disparus. L’OLJ - Le tribunal international pour le Liban démarrera le 1er mars 2009. Respecterez-vous le verdict, quelques soient les accusés, libanais ou étrangers ? N.S. - La France est l’un des pays les plus engagés en faveur de la justice internationale et de la lutte contre l’impunité. Nous avons largement contribué à la création de la commission d’enquête et nous avons depuis soutenu sans réserve ses travaux Nous avons accueilli avec beaucoup de satisfaction l’annonce de l’établissement du tribunal spécial pour le Liban au 1er mars 2009. J’ajoute que nous avons une confiance totale dans les travaux de la commission et que nous respecterons bien sûr les décisions que le tribunal pourrait être amené à prendre.
« Celui qui ne prend pas le risque d’échouer se prive également de la chance de réussir ». Cette phrase de Nicolas Sarkozy, qui montre toute la détermination du président de la République française de jeter toutes ses forces dans une tentative de mettre fin à la guerre de Gaza, résume aussi bien le personnage, un passionné imprégné de l’esprit de l’histoire, dont...