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Actualités - REPORTAGE

Social Des cartes de vœux pour rendre plus chaleureuse la Noël des têtes blanches

Patricia KHODER Un déjeuner de gala dans un restaurant, des chanteurs, un père Noël et des cadeaux. Comme chaque année, Rifaq el-Darb, une association qui s’occupe des personnes du troisième âge, organise un important événement pour marquer les fêtes de fin d’année et rendre plus viable la solitude des têtes blanches. « Pour que Noël n’oublie personne ». Telle est la phrase inscrite sur des cartes de vœux vendues par Rifaq el-Darb, une association qui accompagne les personnes du troisième âge qui vivent dans la pauvreté et la solitude. L’association, fondée il y a quinze ans, compte une quarantaine de membres qui s’occupent d’une centaine de personnes du troisième âge habitant notamment la zone d’Achrafieh, Gemmayzé, Nabaa et Bourj Hammoud. Tout avait commencé quand de jeunes étudiants, de l’Université Saint-Joseph pour la plupart, avaient décidé de s’occuper des têtes blanches habitant à proximité du campus de la rue Huvelin. À l’époque, restaurants et pubs n’avaient pas poussé à Gemmayzé et à la rue Monnot. Aujourd’hui, les jeunes de l’association ont grandi, d’autres sont venus les aider. Joe Tawtel, président et membre fondateur de Rifaq el-Darb, indique que « l’association compte des volontaires qui travaillent à l’animation et au service des déjeuners mensuels et au déjeuner de Noël. Il s’agit de jeunes venus du Collège Notre-Dame de Jamhour, de l’ACS, de l’Athénée de Beyrouth et des scouts de Furn el-Chebbak ». « Les visites hebdomadaires à domicile sont assurées par les membres majeurs de Rifaq el-Darb et non par les élèves », souligne-t-il. Rifaq el-Darb, qui assure un repas chaud par mois dans ses locaux dans les vieux bâtiments de l’Université Saint-Joseph, met les têtes blanches en contact avec les associations qui servent des repas chauds, notamment les restos du cœur, proches de leurs domiciles ; ainsi les personnes âgées pourront manger auprès de ces associations. Une fois par semaine, un membre de l’association se rend au domicile d’une personne du troisième âge pour lui tenir compagnie, voir ce dont elle a besoin, lui faire ses courses. Bref, plus que le repas chaud ou les médicaments, c’est surtout la compagnie que Rifaq el-Darb assure aux têtes blanches qui vivent dans la solitude. Cette année, grâce aux dons collectés, Rifaq el-Darb a pu organiser quinze déjeuners au lieu des douze annuels. Pour Pâques, des maamouls ont été distribués à domicile. Deux excursions ont également été prévues. Rifaq el-Darb a repeint huit maisons habitées par des personnes du troisième âge. L’association a distribué l’année dernière pour Noël 25 parts alimentaires et 25 bûches de Noël à des familles dans le besoin. Pour Pâques, elle a distribué des plats chauds à des familles nécessiteuses. Cela a été possible grâce à une aide ponctuelle. Également grâce une aide ponctuelle, un déjeuner de Noël sera servi le 29 décembre prochain à 600 personnes appartenant à des familles nécessiteuses. Le président de l’ONG tient à remercier toute entreprise, association et personne ayant contribué à sponsoriser les activités de Rifaq el-Darb, notamment le Lion’s Club qui sera présent au déjeuner de gala de cette année. Changer une chose… l’âge Un immeuble dans une banlieue de Beyrouth. L’on peut lire sur une pancarte accrochée à l’entrée du bâtiment : « Donnons des cours d’anglais et de français ». L’homme qui donne ces cours, Ibrahim, habite avec sa sœur, Marie, au 6e étage du bâtiment. Il a 80 ans et depuis plusieurs années il a arrêté de dispenser ses cours. Ibrahim et sa sœur Marie, son aînée de deux ans, sont nés en Égypte. Ils sont rentrés au Liban à la suite de la nationalisation initiée par le président égyptien Jamal Abdel Nasser, à la fin des années 50. De retour à Beyrouth, Ibrahim a occupé des postes de direction dans des entreprises anglaises. À sa retraite, il s’est mis à donner des cours d’anglais et de français. Marie, elle, n’a jamais travaillé. Elle aidait sa mère à la maison, dit-elle. Ibrahim et Marie, qui ont passé leur jeunesse à Port-Saïd et qui parlent entre eux en italien, une langue apprise en Égypte, sortent rarement de chez eux. Marie, trop fatiguée, fait passer le temps en priant au lit la plupart de la journée, alors qu’Ibrahim passe ses heures devant la télévision. Pour rester l’un à côté de l’autre, et pour ne pas trop se déplacer dans la maison qui est assez spacieuse, Ibrahim et Marie ont installé leur lit dans l’espace consacré initialement au salon et à la salle à manger. « J’ai peur que l’un de nous parte... l’autre se sentirait totalement perdu », indique Ibrahim. Ibrahim est un homme cultivé, un homme qui a bien vécu, mais c’est un homme amer. Il ne veut pas parler de ses difficultés financières, lui qui occupait des postes de direction dans des entreprises étrangères, lui qui parle parfaitement quatre langues, l’arabe, le français, l’anglais et l’italien. Mais c’est au détour d’une phrase que l’on devine sa situation précaire. « Vous voyez, ma sœur et moi ressemblons à cette maison. Tout est vieux, le lave-linge, le frigo, les murs sont défraîchis... Si j’avais encore de la force, j’aurais repeint toute la maison. Et vous savez, heureusement que notre électroménager fonctionne encore. Tout chez nous est à 110 volts, c’est ancien, mais j’ai relié les machines à des transformateurs d’électricité », raconte Ibrahim qui est bricoleur. « Je sens parfois que le lave linge est en train d’agoniser… mais j’espère qu’il tiendra autant que nous tiendrons car il nous sera difficile de le remplacer. Pour le frigo, touchons du bois, je l’avais acheté à 750 livres au début des années soixante-dix, de marque General Electric. Je l’ai relié à un stabilisateur pour qu’il résiste aux coupures du courant, car si le moteur lâche, il nous sera quasi impossible d’acheter un nouveau réfrigérateur », indique Ibrahim qui souligne qu’il vit de ses économies. Et il semble qu’il ne lui reste plus grand-chose. S’il avait la chance de changer une chose dans sa vie, il aurait tout simplement modifié son « âge », dit Ibrahim sans hésiter. Une maison en plein chantier Une fois par semaine, Ibrahim et Marie reçoivent la visite d’une membre de Rifaq el-Darb, Colette Sayegh. Celle-ci, mère de quatre enfants et ayant perdu récemment son mari après une longue maladie, rend une visite hebdomadaire à ces deux têtes blanches. Elle arrive avec un repas chaud mais le plus important, c’est la compagnie. C’est avec elle que Ibrahim et Marie évoquent leurs beaux souvenirs, les jours heureux qui font partie d’un passé bel et bien révolu. Dans un autre quartier de Beyrouth, précisément à Gemmayzé, deux femmes vivent dans la misère absolue. Dans cette zone de Gemmayzé, plusieurs vieux immeubles ont été détruits pour que des tours soient construites à leur place. Il faut traverser plusieurs chantiers boueux pour arriver à une ancienne bâtisse de deux étages. La seule toujours debout dans le secteur. Seul le rez-de-chaussée est habité par Annie, une nonagénaire, et sa fille, Haïganoush. Ici, le sol est en béton et les murs sont humides. La pièce principale de la maison est meublée de deux canapés, d’un lit où dort Annie, et d’une petite télévision. Il y a aussi une vieille armoire et des sacs en plastique placés sur le sol. Annie connaît Rifaq el-Darb depuis 1993. Elle se rendait aux déjeuners mensuels de l’association. Aujourd’hui, elle ne peut plus se déplacer. C’est Haïganoush qui se rend tous les jours auprès des associations de la région qui servent des plats chauds. Elle mange sur place et rapporte une part à sa mère. Son rêve ? Avoir une maison. Locataires, Haïganoush et Annie seront tôt ou tard expulsées de la maison qu’elles occupent et où une tour devrait pousser. Haïganoush fera partie des personnes qui prendront part au déjeuner de gala de Rifaq el-Darb et elle rapportera – comme d’habitude – un repas chaud à sa mère. Cette année, l’association compte convier 1 000 têtes blanches venant de divers asiles et diverses associations libanaises à son déjeuner de gala qui se tiendra le vendredi 26 décembre au restaurant Zad el-Kheir à Jounieh. Toutes ces têtes blanches sont dans le besoin. Elles vivent toutes dans la solitude. Vous pouvez rendre leur Noël plus chaleureux en achetant une carte de vœux pour que « Noël n’oublie personne ». Chaque carte achetée permettra à une tête blanche de prendre part au déjeuner. Elle permettra aussi à Rifaq el-Darb de financer leurs activités pour l’année à venir. Pour une carte de 20 000 livres, vous pouvez donc offrir un Noël chaleureux aux personnes du troisième âge vivant dans le froid de la solitude. Pour plus d’information, contacter les numéros suivants : (03) 624645 et (03) 522058.
Patricia KHODER

Un déjeuner de gala dans un restaurant, des chanteurs, un père Noël et des cadeaux. Comme chaque année, Rifaq el-Darb, une association qui s’occupe des personnes du troisième âge, organise un important événement pour marquer les fêtes de fin d’année et rendre plus viable la solitude des têtes blanches.
« Pour que Noël n’oublie personne »....