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Actualités - REPORTAGE

Des signes encourageants côté US, des tensions côté européen

La conférence sur le climat des Nations unies à Poznan, en Pologne, du 1er au 12 décembre, doit enclencher le compte à rebours vers un nouvel accord de lutte contre le réchauffement de la planète, processus qui devra aboutir fin 2009 à Copenhague. En dépit de l’absence de la nouvelle équipe Obama, Poznan doit activer la négociation du prochain accord pour la lutte contre le réchauffement climatique, alors que les émissions mondiales de gaz à effet de serre n’ont jamais été aussi élevées. La nouvelle administration américaine est cependant mieux disposée que l’administration sortante à coopérer. « La victoire de Barack Obama est une bonne nouvelle pour le climat. D’abord parce qu’elle met fin à huit années d’une diplomatie climatique visant d’abord à lutter contre tout accord international contraignant. Mais aussi parce que le programme environnemental du président élu est le plus audacieux qu’un candidat à la Maison-Blanche ait jamais défendu », estime Karine Gavand, chargée de la campagne climat de Greenpeace France. Un point de vue partagé par Kamel Bennaceur, expert sur les questions énergétiques auprès de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) qui estime que « la première annonce liée aux montants futurs des investissements américains sur les énergies renouvelables va dans le sens souhaité d’une diversification des sources d’énergie et d’une décarbonisation accrue ». Depuis huit ans, la communauté internationale tente de se mobiliser pour contenir les dérèglements du climat, mais les États-Unis ont bloqué les progrès des négociations en refusant de signer le protocole de Kyoto. « La participation active de Washington à ces négociations serait une très bonne nouvelle », affirme Mme Gavand. Les experts espèrent en outre que l’engagement américain dans la lutte contre le réchauffement climatique pourra ramener d’autres grands pollueurs, notamment la Chine, dans le droit chemin. La Chine est le premier pollueur de la planète alors que les émissions à effet de serre des pays en développement totalisent désormais plus de la moitié des émissions mondiales. Un leadership conjoint entre l’Europe et les États-Unis, capable de convaincre les autres pays, « et notamment les pays émergents, serait notre meilleure chance de succès », souligne la militante de Greenpeace France. Des premiers signes positifs sont d’ailleurs déjà observés. « Nous assistons déjà à des prises de position plus avancées de la Chine sur les émissions et sur leur rôle, conjointement avec les États-Unis, pour arriver à des approvisionnements énergétiques durables », explique M. Bennaceur. Reste que l’Europe, ces derniers temps, semble être à la peine sur le dossier climatique. L’Union européenne devait en effet conclure un paquet climat-énergie ambitieux avant la conférence de Poznan. Mais celui-ci a été remis à plus tard. « L’incapacité de l’UE à envoyer un message clair et fort dès l’ouverture de Poznan ne va pas aider les négociations », déplore Karine Gavand, qui souligne que « l’Europe aurait pu et dû assumer son rôle de leader dans les négociations ». Au-delà de la question du calendrier, « c’est surtout le manque d’ambition de ce paquet climat-énergie qui va affecter la Conférence de Poznan », insiste-t-elle. Aujourd’hui, le contenu de la feuille de route de la politique énergétique et climatique européenne n’est qu’une « pâle copie des engagements » pris par les chefs d’État de l’UE en 2007. M. Bennaceur rappelle cependant que la Conférence de « Copenhague (prévue l’année prochaine) est plus importante, et qu’à ce moment-là, il sera important que l’UE ait une position bien définie sur l’énergie et le climat et surtout que celle-ci soit unanime pour les pays membres à cette échéance ». La Conférence de Poznan est, en effet, une étape entre la rencontre, l’an dernier à Bali, des États parties à la Convention de l’ONU contre les changements climatiques (CNUCC) et la Conférence de Copenhague l’an prochain. Depuis l’entrée en vigueur de Kyoto en 2005, la négociation climatique se joue schématiquement sur deux rails, la CNUCC (qui regroupe 192 pays) et le Protocole de Kyoto. À Bali, les États membres du CNUCC s’étaient engagés à boucler un nouvel accord d’ici à décembre 2009 – le temps nécessaire à une éventuelle ratification – même si la date paraît en réalité difficile à respecter. Le nouvel accord devra donc décider d’une survie de ce protocole, modifié et élargi aux pays émergents, ou de la mise en orbite d’un « Protocole de Copenhague » englobant tout le monde et permettant notamment aux États-Unis de repartir de zéro. « Poznan est une conférence d’étape entre Bali et Copenhague, avait reconnu récemment un négociateur européen. Mais Poznan n’est pas sans enjeu pour autant : si on trébuche cette année, on n’aura aucune chance l’an prochain. » L’incapacité des Européens à adopter ce paquet climat-énergie est la conséquence des tensions qui règnent au sein de l’Europe des 27. Les petits pays sont opposés à un processus de contraintes, alors que les grands sont pour. En fait, les positions au sein de l’UE « varient en fonction des sources d’électricité et de la volonté politique », explique l’expert de l’AIE. « Certains pays ont une énergie mixte, utilisant une part importante de charbon, rappelle M. Bennaceur. Ces pays s’estimeraient lésés par des mesures contraignantes sur les émissions. » « Il n’y a malheureusement aucun “champion” de la lutte contre le dérèglement du climat au sein de l’UE, et chacun défend ses propres intérêts, grands comme petits pays », renchérit Karine Gavand. Les méthodes employées varient d’un gouvernement à l’autre, probablement en fonction du poids diplomatique de chacun. « Mais tous cherchent à protéger, plus ou moins discrètement, leurs intérêts », insiste M. Gavand. La question de la réglementation sur les émissions CO2 des véhicules particuliers est un exemple de ces divisions. La France avait sur ce terrain un avantage par rapport à l’Allemagne, les constructeurs français produisant des voitures plus petites, plus légères et donc moins gourmandes en énergie. « Mais la France a rapidement abdiqué face à l’Allemagne, qui a défendu ses propres constructeurs. Résultat, la proposition de la présidence française sur la législation visant à limiter le CO2 vide le texte de toute son ambition. Si le compromis en cours de discussion est adopté, l’UE autorisera sur le marché des véhicules émettant 166,5 grammes de CO2/km, soit presque 10 grammes de plus qu’aujourd’hui », s’indigne Mme Gavand. Cet exemple montre que les « grands » pays européens ne font pas preuve de plus d’ambition que les autres. L’Italie a choisi, elle aussi, de défendre ses constructeurs automobiles, en allégeant les pénalités en cas de non-respect de la législation. Dans ces conditions, parvenir à un accord sur un paquet climat-énergie s’annonce compliqué. C’est lors du Sommet des chefs d’État de l’Union européenne, les 11 et 12 décembre, que devraient se décider les éléments stratégiques du paquet, en parallèle au segment ministériel de Poznan, qui sonnera la fin de la conférence. K. J.
La conférence sur le climat des Nations unies à Poznan, en Pologne, du 1er au 12 décembre, doit enclencher le compte à rebours vers un nouvel accord de lutte contre le réchauffement de la planète, processus qui devra aboutir fin 2009 à Copenhague.

En dépit de l’absence de la nouvelle équipe Obama, Poznan doit activer la négociation du prochain accord pour la lutte contre...