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Actualités - REPORTAGE

Une nouvelle perle de culture au Qatar

DOHA - Maya GHANDOUR HERT Le ciel de Qatar s’est carrément embrasé sous une pluie torrentielle de feux d’artifice pour célébrer en grande pompe l’inauguration de sa nouvelle perle de culture, le Musée d’art islamique de Qatar. Un musée, construit sur une île artificielle à 60 mètres de la Corniche de Doha par le nonagénaire Ieoh Ming Pei (auteur de la pyramide du Louvre et titulaire du prestigieux Pritzker Prize) et aménagé par l’inévitable Jean-Michel Wilmotte, constitue une bien belle réussite architecturale. « Avec ses façades blanches, lisses et cubiques qui s’emblent s’emboîter les unes sur les autres, il ressemble un peu au palais de Aïn el-Tiné », a finement remarqué un journaliste libanais qui, a l’instar d’une centaine d’autres de toutes les nationalités, a été invité par la Direction des musées de Qatar pour admirer, en avant-première, ce magnifique écrin et ses non moins admirables bijoux, 800 en tout. Ces chefs-d’œuvre, et notamment une biche en bronze provenant de Madinat al-Zahra, la cité des Mille et Une Nuits des califes de Cordoue, en Andalousie, couvrent trois continents et treize siècles, du VIIe au XIXe. Le programme du musée est centré autour des arts islamiques considérés comme témoins d’une civilisation plus que d’une religion. Ce musée veut « mettre en relief les valeurs de la civilisation musulmane, et le rôle de cette civilisation dans le rapprochement entre les cultures et les valeurs humaines », a déclaré cheikha al-Mayassa bint Hamad al-Thani, présidente de l’Autorité des musées de Qatar, devant un parterre de têtes couronnées, de dirigeants arabes, de célébrités (Robert de Niro foulant le tapis rouge !) et d’artistes célèbres, tels que Jeff Koons et Damien Hearst, ou, sur le plan libanais, Marcel Khalifé, et Nasser Chamma, le oudiste irakien fondateur de la Maison du oud au Caire. L’islam « est une religion de tolérance, de savoir et de civilisation, et non de terrorisme. Nous voulons montrer que l’islam est une civilisation pacifique, qui a toujours appelé à la tolérance et à la cohabitation entre les peuples », a ajouté la fille de l’émir du Qatar, cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani. « Un tel musée s’insérera tout naturellement dans le circuit international des expositions en collaborant avec les autres grands établissements étrangers. D’autres musées ouvriront ultérieurement leur porte au Qatar, suivant les mêmes principes », avait déclaré dans la journée Abdallah al- Najjar, président exécutif de l’Autorité des musées du Qatar. Concernant le site du musée, l’architecte des lieux a déclaré, du tac au tac, lors d’une rencontre avec une poignée de journalistes : « Je ne l’ai pas choisi, je l’ai construit. » Pei, qui avait d’abord refusé le projet, a finalement accepté de le coordonner à condition qu’une île soit construite spécialement pour accueillir le musée. Le Sino-Américain craignait en effet que les gratte-ciel qataris ne viennent gâcher l’harmonie de ce bâtiment dépouillé, aux lignes géométriques et au dessin quasi cubiste censé capter « l’essence de l’architecture islamique ». Il semble même que quelques constructions voisines se soient volatilisées avec la pose des premières pierres angulaires du musée. La scénographie a mis l’accent sur l’esthétique, sans trop se soucier de la chronologie. Elle nous promène ainsi de l’Espagne musulmane à l’Asie centrale, en passant par l’Égypte et la Syrie, pendant un bon millénaire. De petites et grandes merveilles d’objets que l’on découvre dans la pénombre des galeries, des objets qui vont de « la terre à la soie ». C’est-à-dire des céramiques à l’ivoire, au bronze, à l’or, aux tapis et, bien entendu, à la soie. Une inauguration en grande pompe qui marque sans aucun doute une grande réussite diplomatique pour cet émirat proche d’Abou Dhabi et des Émirats arabes unis, prouvant ainsi qu’il peut très bien développer une politique muséographique ambitieuse et légitime, sans avoir besoin de louer des collections à l’étranger. Il s’agit d’une volonté affirmée du Qatar qui a choisi de constituer, depuis quinze ans, un ensemble d’art islamique dans l’objectif d’ouvrir son propre musée. Résultat : l’ensemble aurait coûté 1,6 milliard de dollars au Qatar. Mais l’émirat ne regarde pas à la dépense puisqu’il lui faut avant tout rester dans la course. Pour faire face à l’après-pétrole, les pays du Golfe préparent leur reconversion en « hub » culturel mondial et se livrent une guerre sans merci afin de décrocher les contrats les plus prestigieux. D’ici à 2013, les Émirats arabes unis auraient accueilli le Louvre d’Abou Dhabi (Jean Nouvel), une antenne du Guggenheim Museum (Frank Gehry) ainsi que des réalisations signées Zaha Hadid ou Tadao Ando. Le petit émirat de Qatar, à la superficie presque égale à notre cher pays du Cèdre, n’investit pas seulement dans le luxe et le bling-bling. C’est, aux sonorités world de l’orchestre Route de la soie de Yo Yo Ma, que les 1 000 invités de marque, happy mais pas très few, ont terminé la soirée. Au programme des manifestations accompagnant ce grand opening, un débat sur « L’architecture islamique entre tradition et modernité » et une conférence sous le thème: « Au-delà des frontières, l’art islamique à travers les cultures » avec la participation de l’ancien chef de la diplomatie française, Dominique de Villepin, également présent a la cérémonie inaugurale. Représentations officielles Les présidents syrien Bachar el-Assad, l’Émirati cheikh Khalifa ben Zayed al-Nahiane, ainsi que le roi de Bahreïn, cheikh Hamad ben Issa al-Khalifa, étaient parmi les principales personnalités présentes autour de l’émir du Qatar et de son épouse, cheikha Moza bint Nasser al-Masnad. Du Liban, c’est Raymond Audi qui représentait le chef de l’État à la tête d’une délégation comprenant des membres du comité du Musée national, dont Mona Hraoui, Ghassan Tueni et son épouse Chadia, Nehmé Tohmé et son épouse, et Jean-Louis Cordahi. Quelques chiffres – Passerelle d’entrée d’honneur et pont : 280 mètres. – Parc du musée avec la presqu’île comprise: 26 hectares. – Lustre principal dans le hall: 12 mètres de diamètre. – Superficie totale de l’édifice: 35500 mètres carrés. – Superficie totale des galeries : 3870 mètres carrés. Le bâtiment de cinq étages abrite des salles d’exposition, une bibliothèque et un pavillon dédié à l’enseignement où se tiendront des conférences sur l’art, l’histoire et la civilisation islamiques.
DOHA - Maya GHANDOUR HERT

Le ciel de Qatar s’est carrément embrasé sous une pluie torrentielle de feux d’artifice pour célébrer en grande pompe l’inauguration de sa nouvelle perle de culture, le Musée d’art islamique de Qatar.

Un musée, construit sur une île artificielle à 60 mètres de la Corniche de Doha par le nonagénaire Ieoh Ming Pei (auteur de la pyramide...