Divertimento vénitien Edgar DAVIDIAN

Le temps d’un spectacle, un air de Venise, chargé de masques et de musique baroque, a soufflé sur les planches de la salle des Ambassadeurs au Casino du Liban. Libertinage, badinage et défilés de costumes sur un tempo toutefois bien morne… La cité des Doges a élu domicile sur scène. Monde coloré et aux images carnavalesques baroques de la ville lacustre faisant vivre le lustre d’une période où Casanova faisait battre le cœur de ces dames… Une quinzaine d’acteurs-figurants se sont investis sous les feux des spots pour faire revivre une tranche de l’histoire d’une ville portée par les eaux. Pour un texte anglais bavard et souvent oiseux, la trame de l’histoire, un simple chassé-croisé de deux sœurs avec deux galants verts, ne vole pas très haut. Un anglais aux accents maladroitement italianisés quand la langue de Goldoni aurait été ici parfaite et d’une savoureuse musicalité… Comme un tour de spectacle des tréteaux du Capitaine Fracasse (mais avec Gauthier il y a du talent et de l’imagination !), saltimbanques, jongleurs, acrobates et équilibristes font les zouaves sans convaincre les spectateurs de leurs maigres prouesses de jeux de quilles… Pour ce morne carnaval de scène, par-delà « arlequinade » et « colombinade », reste quelques fugaces images (bien rares) où un petit fragment des Quatre saisons de Vivaldi jette un peu d’éclat. En robes piquées de fleurs, couvertes de frimas, avec masques croulant sous des bouquets de fleurs, quatre jeunes femmes, comme de vivants tableaux d’Archimboldo, avancent sur scène au rythme des violons et épinette du Prêtre roux… Loups en mains et sur les yeux, dialogues sans consistance, quelques ritournelles, quelques pas de danse en quadrilles, des candélabres cérémonieusement allumés, des tirades en crinolines et jabots en dentelle, des tentures rouges, cela ne fait pas la gloire impérissable de Venise aux milles mirages… Mais un divertissement sans prétention !