Rechercher
Rechercher

Actualités - OPINION

Le point Risque calculé

de Christian Merville Harcelé par la justice qui lui reproche une fâcheuse propension à confondre cassette personnelle et deniers publics, Ehud Olmert n’est plus que l’ombre du sémillant Premier ministre de ces deux dernières années, incapable même d’expédier les affaires courantes, tout occupé qu’il est à tenter désespérément de régler les siennes. Droite dans ses bottes de Madame Propre au point d’avouer son allergie à toute concession sur son agenda politique, Tzipi Livni vient de se résoudre à ce qui semblait, dès le départ, inéluctable : des élections anticipées, dans un délai de quatre-vingt-dix jours, pour tenter de sortir Israël d’une crise dont nul pour l’heure ne voit l’issue tant gargantuesques sont les appétits, nombreux les appelés et rares les élus. Tout cela dans un paysage d’où, depuis la brutale éclipse d’Ariel Sharon, n’émerge aucune figure réellement nationale, susceptible en ces temps de confusion d’imposer des choix, douloureux pour la plupart. Peu de temps avant ce dimanche soir, quand la ministre sortante des Affaires étrangères, lasse d’avoir à naviguer en eaux troubles, a abattu sa dernière carte, l’opinion publique et les observateurs étrangers continuaient à échafauder des constructions plutôt bizarroïdes. Pensez donc, Israël s’apprêtait à devenir l’unique État dont les trois grandes branches allaient être dirigées par des femmes : Dalia Itzik à la Knesset, Dorit Beinish à la Cour suprême et la (lointaine) succession de Golda Meir paraissant revenir à la candidate désignée. C’était oublier la mine placée la semaine dernière au beau milieu de la voie par le chef du gouvernement sortant. « Les Israéliens rêvent, confiait-il alors au Yediot Aharonot, s’ils croient conclure la paix avec les Palestiniens sans en payer le prix. » Et le prix, selon lui, c’était un retrait de la majeure partie de la Cisjordanie, l’abandon du secteur oriental de Jérusalem et le retour du Golan à la Syrie. C’était là un cadeau empoisonné à celle qui, jusqu’à présent, se garde soigneusement d’avancer la moindre allusion à un possible règlement et refuse systématiquement de se prêter au chantage. L’autre bombe à retardement, on la doit à Ehud Barak – qui serait mieux à sa place au ministère de la Défense plutôt qu’à la présidence du Conseil, à en croire jusqu’à ses proches collaborateurs –, qui s’est dépêché de rencontrer Benyamin Netanyahu dans les premiers jours des consultations, histoire de faire preuve d’un semblant d’indépendance vis-à-vis de son alliée au sein de la coalition au pouvoir et future numéro un et de lui montreur que son appui était loin de lui être acquis. Le troisième chausse-trappe est l’œuvre du Shass, une formation ultraorthodoxe composée de mizrahis (juifs originaires du Moyen-Orient) et dont les députés – ils sont au nombre de douze dans la présente législature – n’ont cessé ces vingt dernières années de représenter l’indispensable apport à toute majorité requise. Rappelées par le porte-parole du parti, Roy Lahmanovitch, à l’issue d’une réunion présidée par le rabbin Ovadia Yossef, leurs conditions tiennent en deux points : rétablissement de l’aide aux familles nombreuses, lesquelles représentent le gros des effectifs du parti ; refus de toute négociation sur le sort de la partie est de la capitale. Longtemps femme de l’ombre – elle a servi au sein du Mossad –, Livni n’est pas du genre à laisser traîner les choses. Elle a donc rendu son tablier, après avoir proclamé son « refus de céder au chantage » et jeté l’anathème sur « ceux qui tentent de détruire notre unité », dans une claire allusion au chef du Likoud. Les chances de celui-ci de l’emporter lors de la consultation populaire à venir ne sont pas négligeables, l’électeur pouvant être tenté de se tourner vers lui en ces temps de crise économique et de sa réputation, quelque peu usurpée, de grand argentier. Malheureusement pour lui, les défenseurs du libéralisme, principale cause de l’actuel krach, n’ont pas très bonne réputation ; de plus, nul n’a oublié les frasques de son épouse alors qu’il présidait aux destinées du pays. Résultat ? Le dernier sondage du quotidien Maariv place Kadima à quatre sièges du Likoud alors que l’écart représentait le double de ce chiffre il y a seulement deux semaines. Quelle que soit l’issue du scrutin, la principale victime en sera cet Annapolis-II, initialement prévu pour le mois prochain en Égypte, mais dont il est d’ores et déjà possible d’établir le constat de décès. En effet, la transition aux États-Unis interviendra le 20 janvier, un mois qui verra le Palestinien Mahmoud Abbas céder la place à un successeur dont, pour l’instant, on ne connaît pals l’identité. Tout comme on ne sait rien du verdict qui sortira des urnes israéliennes. La conjoncture, dirait un astrologue, n’inspire guère l’optimisme. Mais aussi c’est là un sentiment qui n’a jamais animé les deux protagonistes du plus long conflit de l’histoire contemporaine.
de Christian Merville

Harcelé par la justice qui lui reproche une fâcheuse propension à confondre cassette personnelle et deniers publics, Ehud Olmert n’est plus que l’ombre du sémillant Premier ministre de ces deux dernières années, incapable même d’expédier les affaires courantes, tout occupé qu’il est à tenter désespérément de régler les siennes. Droite...