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Actualités - ANALYSE

Analyse Le Qatar, joker diplomatique de Nicolas Sarkozy

Paris a trouvé dans Doha un partenaire pour sa politique de « réconciliation ». La France et le Qatar, dont les armées sont dotées à 80 % de matériel français, entretiennent depuis longtemps des relations étroites et sont liés depuis 1994 par un accord de défense. Nicolas Sarkozy a trouvé dans les dirigeants qataris, avec lesquels il avait noué des relations dès avant son élection, des partenaires pour sa « diplomatie de la réconciliation », désireux, comme lui, de « parler à tout le monde ». Le Qatar héberge à la fois la principale base américaine de la région, al-Oudeïd, et la télévision al-Jazira, qui a maintes fois été utilisée comme un relais médiatique par la nébuleuse islamiste el-Qaëda et son chef Oussama Ben Laden. Cet État de moins de 12 000 km2 et d’à peine plus d’un million d’habitants, dont un cinquième de Qataris, est le premier producteur mondial de gaz naturel liquéfié (31 millions de tonnes en 2007) et possède près de 16 % des réserves mondiales de gaz naturel, au troisième rang après la Russie et l’Iran. Il produit aussi plus de 800 000 barils de pétrole par jour, puisés dans des réserves estimées à 15 milliards de barils. De quoi « fluidifier » les situations diplomatiques les plus rugueuses. Mais réduire la politique étrangère qatarie à une diplomatie du chéquier serait réducteur, fait-on valoir à Paris. En juillet 2007, un appel téléphonique de l’émir du Qatar, cheikh Hamad ben Khalifa al-Thani, au numéro un libyen Mouammar Kadhafi permet de débloquer les tractations franco-libyennes sur la libération de cinq infirmières bulgares et d’un médecin palestinien, accusés par la Libye d’avoir inoculé le virus du sida à plusieurs centaines d’enfants. La thèse selon laquelle l’émirat a accepté de prendre en charge les 460 millions de dollars d’indemnités demandées par la Libye pour les familles des enfants contaminés court alors. Les diplomates familiers de ce dossier estiment aujourd’hui qu’il s’agissait seulement d’aider Mouammar Kadhafi à sauver la face et doutent que ce montant ait jamais été versé. « La Libye n’a pas besoin de 460 millions de dollars », souligne l’un d’eux. L’intervention du Qatar a également été déterminante dans la conclusion d’un accord interlibanais – l’accord de Doha – en mai, pour débloquer l’élection du président Michel Sleiman. De même, les dirigeants qataris ont encouragé Nicolas Sarkozy à renouer en 2007 le dialogue avec le président syrien Bachar el-Assad, rompu par le président Jacques Chirac. « La Syrie est un pays important pour la région. On ne peut pas l’isoler, explique Mohammad al-Kuwari. Nous avons dit aux Français : “C’est le moment de parler aux Syriens.” Au début, ils étaient un peu hésitants. » L’émir du Qatar participe à la conférence de presse Sarkozy-Assad-Sleiman, le 12 juillet à Paris, puis au lancement de l’Union pour la Méditerranée, le 13 juillet. Lors de la visite de Nicolas Sarkozy à Damas, en septembre, il participe au sommet à quatre organisé par Bachar el-Assad avec le Premier ministre turc, Tayyip Erdogan. C’est alors par le truchement du dirigeant du Qatar que Nicolas Sarkozy fait transmettre au mouvement islamiste palestinien Hamas un message du père du soldat franco-israélien Gilad Shalit à son fils, détenu dans la bande de Gaza. La France compte aussi sur Doha pour convaincre Bachar el-Assad d’améliorer la situation des droits de l’homme dans son pays et de libérer des prisonniers politiques. « L’émir du Qatar aura un rôle à jouer », confie l’entourage de Nicolas Sarkozy, en marge de la visite du président français à Damas. Les messages destinés aux dirigeants politiques arabes ont parfois plus de chances de passer quand ils sont transmis par des pays frères, fait valoir l’Élysée. Paris compte également sur Doha, parmi d’autres canaux, pour faire passer des messages à l’Iran, en conflit avec les pays occidentaux sur son programme nucléaire. Cette coopération entre les deux pays dépasse aujourd’hui les frontières du Moyen-Orient. Le Qatar s’efforce ainsi de promouvoir des négociations de paix entre les rebelles du Darfour et les dirigeants soudanais, dans un conflit qui mobilise également la diplomatie française. Le président français a dépêché en septembre un de ses conseillers auprès des dirigeants qataris pour s’informer de leurs intentions et apporter un appui à leur démarche. Selon des diplomates français, le Qatar serait prêt à mettre dans la balance 500 millions de dollars pour la reconstruction et le développement de cette province soudanaise.
Paris a trouvé dans Doha un partenaire pour sa politique de « réconciliation ».
La France et le Qatar, dont les armées sont dotées à 80 % de matériel français, entretiennent depuis longtemps des relations étroites et sont liés depuis 1994 par un accord de défense. Nicolas Sarkozy a trouvé dans les dirigeants qataris, avec lesquels il avait noué des relations dès avant...