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Actualités - REPORTAGE

Le laxisme de l’État a conduit à des aberrations, affirme Assem Salam

« Le chaos urbain est partout », affirme Assem Salam, ancien président de l’ordre des ingénieurs et architectes de Beyrouth et de la Commission de l’extension du port de Beyrouth. Ayant également à son actif 40 ans au service de l’Apsad, 23 ans d’enseignement à la faculté d’architecture de l’Université américaine de Beyrouth, 20 ans au Conseil du plan, 30 au Conseil supérieur de l’urbanisme et six ans au CDR, Salam avoue : « Je ne peux pas dire que je ne suis pas responsable de ce qui est arrivé. J’admets que je n’ai pu rien faire. L’échec est total. Le résultat est affligeant, choquant. » Il met en exergue « le laxisme de l’État qui a conduit à des aberrations et qui a fait obstacle au développement rationnel du pays. Les obstacles étaient et restent insurmontables du fait de la mentalité de nos gouverneurs, des intérêts des promoteurs fonciers et de l’incapacité de la Direction générale de l’urbanisme à relever le défi en proposant des réformes décisives ». Salam rappelle que la loi sur la construction, qui fixe les règles techniques à observer, date de l’époque ottomane et du mandat français et ne tient pas compte des contraintes d’environnement vitales pour l’avenir du pays. Quant à l’article 17 de cette loi, il est fondé sur le principe de « constructibilité généralisée ». « On peut construire sur tout le territoire, sauf dans les zones couvertes par les plans d’urbanisme. Or, celles-ci ne couvrent que 10 % du territoire libanais », relève Salam. Il indique, d’autre part, que depuis la mission Irfed, en 1960, aucune stratégie d’aménagement du territoire n’a été mise en place. « Même celle-ci n’a pas été réactualisée ou réadaptée à la progression démographique et au déplacement de la population suite aux guerres, au chômage et à la pauvreté qui ont entraîné un exode rural et, par conséquent, une densification urbaine. » « L’extension urbaine de Beyrouth, pour ne prendre que cet exemple, a été spontanée, fractionnée et irrationnelle, souligne M. Salam. Les taudis transformés en immeubles reposent sur un tissu médiéval. Pire, les investissements immobiliers et la spéculation sauvage, qui mettent en évidence les problèmes d’environnement et de bouchons, et qui créent des dépenses énormes d’infrastructure, ne semblent pas émouvoir les autorités locales. Il reste 30 à 40 % de parcelles constructibles, ce qui va aggraver encore la situation. » Assem Salam situe également le problème au niveau des promoteurs et des responsables qui essayent de « contourner les servitudes » (restriction au droit de propriété immobilière, pour une raison d’intérêt général ou d’utilité publique), sans compter « la tendance du législateur à introduire des exceptions aux règles générales, plus particulièrement sur le domaine public maritime, privatisé sur de très larges portions ». Pour conclure, l’ancien président de l’ordre des architectes et ingénieurs résume ainsi la situation : « Ce n’est pas seulement la laideur monstrueuse d’une certaine architecture qui défigure le paysage, mais c’est aussi le chaos urbanistique, la densité, résultant des lois administratives. Il aurait fallu réfléchir au devenir de Beyrouth, organiser rue par rue, perspective par perspective (...). Au rythme où l’on va, il n’y aura plus d’espace pour un seul arbre chez nous... En fait, c’est toute une mentalité libanaise qu’il faut dénoncer. Si celle-ci avait été différente, l’administration publique et les lois qui régissent la construction auraient été autrement plus positives. Nous avons fait des lois basées sur le mercantilisme. » « Ce n’est pas la densité qui est un tort en soi, mais plutôt le fait de ne pas avoir su l’organiser, la maîtriser », déplore Salam, ajoutant que le problème est très complexe et qu’il nécessite une « gestion de la part d’un État fort ». Le projet du Schéma d’aménagement du territoire, « s’il est approuvé en Conseil des ministres, fournira peut-être l’occasion de redresser la situation, de sauver ce qui reste à sauver ».
« Le chaos urbain est partout », affirme Assem Salam, ancien président de l’ordre des ingénieurs et architectes de Beyrouth et de la Commission de l’extension du port de Beyrouth. Ayant également à son actif 40 ans au service de l’Apsad, 23 ans d’enseignement à la faculté d’architecture de l’Université américaine de Beyrouth, 20 ans au Conseil du plan, 30 au...