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Actualités - CHRONOLOGIE

Concert Lâchez les brides et libérez les arpèges !

Colette KHALAF Inclassable ! Indéfinissable, mais simplement génial ! Bernard Lavilliers à Beyrouth après deux rendez-vous manqués : une soirée hors du temps où le chanteur a interprété avec générosité ses meilleurs tubes et chanté plus particulièrement ce « samedi soir à Beyrouth » qu’il avait vécu comme un rapport intime avec ce port au corps de femme…Cette courtisane voilée et dévoilée. À son entrée en scène (venu de haut, venu de dos…venu d’ailleurs, peu importe), le public devine déjà que le concert ira dans tous les sens. Pas linéaire, voire en trois dimensions, c’est un corps-à-corps physique que l’ancien boxeur interprétera sur le ring du Music Hall dardé de rais de lasers foudroyants. Après avoir remercié la Mission culturelle française qui a permis ce voyage, la famille Éleftériadès qu’il voudrait bien déloger pour s’approprier lui-même la salle mythique au lourd rideau pourpre du Starco, l’artiste s’adresse au public : « Nous sommes ce soir réunis pour chanter un certain samedi soir à Beyrouth et conjurer le sort. J’étais supposé être parmi vous un 11 mai. Nous sommes là, loin du 11 mai, mais près du cœur. » Et c’est parti ! Envoyez la musique Durant plus de deux heures, sans le moindre arrêt ni relâche, le chanteur poète emmène le public, d’abord tétanisé puis survolté, dans un périple musical aux gammes débridées. Lavilliers avance en survolant presque le sol, glisse comme un reptile et bondit comme un fauve. Toutes griffes dehors. Huit musiciens géniaux l’accompagnent. Xavier Tribolet au clavier (et à l’accordéon), Thierry Fanfant à la basse, Dominique Milletti au violon, Mar Agouleste au saxo, Olivier Bodson à la trompette, Vincent Faucher à la guitare, Gil Gimenez à la batterie et Thomas Ostrovieski aux percussions. Mais sont-ils vraiment huit ? Il semble plutôt qu’ils sont des dizaines. Se balançant en toute souplesse et changeant à loisir d’instrument, ces « men in black », musique dans les veines, assiègent les planches. Oyez oyez bonnes gens ! Pas de répit pour les passionnés, semble clamer ce trapéziste du geste, ce jongleur du mot. Ce trouvère de haute voltige. Et les batteries se rechargent illico ! De Kingston à Memphis, et du reggae jamaïcain à la soul américaine, ce ne sont que des variations sur tempos avec perfusions de oud et d’accordéon. Bernard Lavilliers porte en lui tous les chants du monde, les larmes des enfants et les sanglots des femmes. « La musique est un cri qui vient de l’intérieur » et ce cri, il le hurle, le chante et le transmet à celui qui veut l’entendre. Léo Ferré, Bob Marley et Nelson Mandela, ceux qui ont clamé, dansé et fustigé la bêtise humaine et crié les horreurs des pouvoirs criminels se retrouvent soudain avec celui qui se fait appeler le « contre-pouvoir permanent ». Comme si Bernard Lavilliers, en accordant ses gammes aux harmonies du monde, devenait le temps d’un soir l’écho de nos mémoires. Envoûtante et lascive, suave mais jamais sucrée, sa musique est cette mixture de « sweet and sour », de peines et de joies. De Bosse à Stand the Ghetto, en passant par On the Road Again et Betty ou Noir et Blanc, le reggae-roots de Lavilliers se boit comme un punch à l’effet tonique et dynamisant. Occupant les lieux, envahissant les prémisses, l’artiste largue les amarres avec Les mains d’or et met toutes voiles dehors. Entre la scène et le bar américain du Music Hall où il s’est lancé avec un trio de musiciens, le public est pris entre deux feux. C’est le règne de la musique. Un baroud d’honneur s’empare de l’audience et la libère de tout lien. Ce dimanche soir à Beyrouth, la musique de Bernard Lavilliers, de n’importe quel pays et de n’importe quelle couleur, avait réellement des accords majeurs.
Colette KHALAF

Inclassable ! Indéfinissable, mais simplement génial ! Bernard Lavilliers à Beyrouth après
deux rendez-vous manqués : une soirée hors du temps où le chanteur a interprété avec générosité
ses meilleurs tubes et chanté plus particulièrement ce « samedi soir à Beyrouth » qu’il avait vécu
comme un rapport intime avec ce port au corps de...