Rechercher
Rechercher

Actualités

Reportage Les petits Irakiens qui jeûnent, « héros » du ramadan

Dans un Irak de plus en plus conservateur, les enfants sont chaque année plus nombreux à se retenir de manger pendant le mois lunaire. Officiellement, les responsables religieux estiment que les jeunes garçons ne devraient pas jeûner avant 15 ans, et les filles, dont on considère qu’elles mûrissent plus rapidement, avant 9 ans. Ahmad Mohammad a beau n’avoir que quatre ans, il a décrété, à son réveil au premier jour du ramadan, qu’il voulait désormais se comporter en homme. « J’ai dit que je voulais jeûner », raconte-t-il tout sourire à l’AFP. « J’ai refusé de manger. J’avais faim et très, très soif, mais j’ai tenu jusqu’à l’iftar », le repas de rupture de jeûne pris au coucher du soleil, dit-il. Et sa famille ne s’est pas opposée, bien au contraire. « Mes parents et ma grand-mère disent que je suis un héros parce que j’ai réussi à jeûner dès le premier jour du ramadan », déclare-t-il fièrement. Sa mère, Amna, 25 ans, l’estimait pourtant trop jeune pour passer plus de 12 heures sans manger. Mais elle salue son sacrifice et sa volonté. « Je ne l’ai pas forcé à jeûner, parce qu’il est toujours un enfant, qui ne peut normalement pas se priver d’eau ou de nourriture », explique-t-elle. Cela n’a pas été sans douleur, comme en témoignent ces larmes versées face à l’épuisement nourri par la soif. Mais il a continué à refuser à boire. Pour éviter à leurs enfants un jeûne complet, et donc douloureux, de nombreux parents leur font suivre pendant les mois précédant le ramadan un jeûne allégé, dit « jeûne du cerf », appelé ainsi, car ces animaux sont, dans la région, réputés manger moins pendant l’été. Certains suivent ce régime allégé pendant le ramadan, comme Rand, 6 ans, la grande sœur d’Ahmad. « C’est ma mère et ma grand-mère qui m’ont appris » à jeûner ainsi, explique la petite fille chétive, qui ne peut s’empêcher d’ajouter qu’elle rêverait d’une crème glacée pour mieux résister à l’atmosphère brûlante de la fin d’été irakien, où les températures approchent toujours à l’occasion les 40 degrés. D’où une touffeur parfois très dure à supporter pour la plupart des six millions d’habitants de la capitale irakienne, à peine servis de quelques heures d’électricité quotidiennes. Et encore plus par temps de ramadan. Selon le docteur Hussam Mohammad, le jeûne peut avoir des effets bénéfiques sur les enfants et les jeunes, comme pour les adultes. « Les enfants peuvent mieux supporter le jeûne, car ils ont beaucoup d’énergie. Mais après la rupture du jeûne, ils doivent boire beaucoup d’eau, surtout par ces chaleurs », explique-t-il. « Le jeûne accélère la circulation du sang, qui arrive plus vite au système nerveux, parce qu’il n’est plus concentré sur le système digestif. Cela active donc le cerveau », affirme le médecin, qui conseille même aux jeûneurs « de faire du sport » et de « ne pas manger trop gras » pendant le ramadan. Gaith Mohammad, 10 ans, est heureux de jeûner comme ses parents. Même s’il ne peut s’empêcher de penser à la nourriture. « Mais mon père m’encourage tout le temps, donc je peux jeûner comme un adulte », clame-t-il. De son côté, cheikh Ali Bachir al-Najafi, un responsable religieux, encourage comme ses pairs le jeûne des enfants. « Le jeûne forge l’esprit » et imprègne les enfants du sens de la discipline, dit-il, avant de marteler : « Et c’est une obligation, l’une des bases de l’islam. » À la nuit tombée, le jeûne est habituellement rompu par du yaourt et des dattes, suivi d’une profusion de viandes, riz, légumes, fruits et pâtisseries. Mais pour les enfants jeûneurs, cela peut aussi être un festin de bonbons. Marwa SABAH (AFP)
Dans un Irak de plus en plus conservateur, les enfants sont chaque année plus nombreux à se retenir de manger pendant le mois lunaire.
Officiellement, les responsables religieux estiment que les jeunes garçons ne devraient pas jeûner avant 15 ans, et les filles, dont on considère qu’elles mûrissent plus rapidement, avant 9 ans. Ahmad Mohammad a beau n’avoir que quatre ans,...