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Actualités - CHRONOLOGIE

Un peu plus de... Les hommes aussi sont des «desperate housewives»… Par Médéa Azouri HABIB

« Neswan el-furn ». Littéralement les femmes du four. Celles du coin quoi. Les femmes des salons de coiffure, celles qui feuillettent des magazines mondains, celles qui s’arrêtent devant le rayon poissonnerie sans être de vraies poissonnières. On est tous ces femmes-là. Femmes et hommes compris. On a tous quelque chose en nous d’une cancanière, d’une «gossip girl». On a tous une âme de «desperate housewive». Et que les hommes qui n’ont jamais écouté les potins dans la bouche de leurs femmes me jettent la première pierre. C’est toujours du : « hein ? quoi ? qui ? non ? !!! ». Nos hommes ne sont pas des Orson ou des Mike Delifino, non mesdames, les Libanais sont des Susan, des Bree, des Gaby et des Edie en puissance. Plus rarement des Lynette, je vous l’accorde. «Desperate» jusqu’au bout des ongles. Avec leurs manies, leurs petites habitudes et leurs crèmes antirides. Alors oui, avouons-le, tout le monde potine. Ma concierge, ma tante, mon cousin, mon coiffeur, la vendeuse chez Aïshti, l’épicier du coin et même mon fils. Tout le monde aime potiner. Et ce n’est pas une coutume purement locale. Nous sommes dans l’ère du potin. Le cancan est devenu le premier sujet de conversation des gens. Et le cancan domine le monde. Il y a dix ans, nous n’étions pas aussi voyeurs. Aujourd’hui, tout le monde s’y est mis. La presse – Voici n’est plus le seul sur le marché, Public, Closer et consorts lui font de l’œil –, la télé et l’ensemble des émissions concernant la vie privée des stars et même le président de la République française. On n’avait jamais vu ça auparavant : un président marié trois fois, époux d’une chanteuse bobo croqueuse d’hommes, flânant, sa Rolex en or qui brille au poignet, dans les ruelles de Disneyland. Aujourd’hui, tout le monde parle de tout le monde. En bien, en mal, pour rien, ça n’arrête pas. D’ailleurs, si on ne s’intéressait pas autant à la petite culotte d’Untel ou à l’amourette d’Unetelle, Paris Hilton n’aurait jamais existé. Aujourd’hui, il importe peu que la demoiselle ait accompli quelque chose. Il importe juste de savoir où elle est sortie, avec qui et comment. Le reste, on s’en fout. Mais alors, qu’est-ce qui fait qu’on en est arrivé là ? Qu’est-ce qui fait qu’on ne peut pas s’empêcher de papoter sur les uns et sur les autres ? Est-ce l’ambiance générale, voire mondiale qui pousse les gens à adorer regarder par la serrure ce qui se passe chez le voisin ? Est-ce que ce sont les magazines, les programmes de téléréalité qui aiguisent notre sens du voyeurisme, est-ce que ce sont les stars et les gens eux-mêmes qui, finalement, ne se sentent exister qu’à travers les racontars des autres ? Ou alors est-ce tout simplement par manque de sujets de conversation, par manque de culture. Si on ne peut parler de rien ou de pas grand-chose avec les gens qu’on fréquente, alors on se rabat sur les autres. Parler d’une expo, d’un film, d’une émission, d’un bouquin… on le fait de moins en moins. On parle fringues, voitures, bouffe, DS ou bijoux et gosses, surtout quand on en a. Et si on y pense bien, tout ça a un prix. Et donc régi par la grande et belle société de consommation. Et on arrive enfin à nos moutons. Si on aime parler de mode, on aime parler des marques, donc de leurs prix, donc de l’acheteur et donc on en revient à l’équation : qui a porté quoi – et surtout à combien. Encore du potin tiens. Cerise sur le gâteau ? Le potin du moment ? X et Y ont porté, lors de la même soirée, la même robe Philip Lim… Les maris de X et Y se sont poêlés toute la soirée… beaucoup moins quand, en sortant, ils ont vu qu’ils avaient la même voiture. Ça fait cher les doublons. Alors oui, les hommes aussi parlent et écoutent. Et même ceux qui jurent ne jamais l’ouvrir, le font de manière plus subversive, plus subtile. On s’ennuie, la politique nous rase (sauf quand il s’agit d’un cancan) et le fric nous gouverne. L’oisiveté est mère de tous les vices, dit-on… Je n’ai plus le temps de débattre, j’ai un vernissage à voir. Et je me demande ce que va bien pouvoir porter l’artiste et qui va faire le catering…
« Neswan el-furn ». Littéralement les femmes du four. Celles du coin quoi. Les femmes des salons de coiffure, celles qui feuillettent des magazines mondains, celles qui s’arrêtent devant le rayon poissonnerie sans être de vraies poissonnières. On est tous ces femmes-là. Femmes et hommes compris. On a tous quelque chose en nous d’une cancanière, d’une «gossip girl». On...