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Actualités - REPORTAGE

Patrimoine À Jiyeh, Porphyréon livre au grand jour ses secrets

May MAKAREM À proximité de la basilique byzantine découverte fortuitement à Jiyeh, en 1987, et d’une nécropole datant de l’époque romaine tardive, un grand quartier d’habitations romain et une zone industrielle ont été mis au jour par les archéologues Polonais. Au début des années 1900, les prospections archéologiques menées à Jiyeh par Ernest Renan et Georges Contenant avaient révélé l’emplacement de Porphyréon. En 1975, Roger Saïdah entame des fouilles qui seront interrompues en raison de la guerre. Une décennie plus tard, lors d’une opération d’extraction de sable, les ouvriers découvrent une basilique byzantine décorée de mosaïques dont une de 17 mètres de long. En 2003, en coordination avec la Direction générale des antiquités (DGA) et sous la conduite de Thomaz Waliszewski, l’équipe archéologique de l’université de Varsovie reprend les fouilles, livrant d’autres vestiges : un grand quartier d’habitations romain, occupé pendant la période byzantine ; deux pressoirs à huile, ainsi qu’une nécropole sur laquelle s’est greffée, au su et au vu des responsables, un complexe balnéaire. Les excavations menées chaque été depuis 2003, ont permis d’exhumer un quartier romain de 1 500m2 « composé de quelque 80 pièces appartenant au moins à une vingtaine d’habitations dont certaines, dotées d’escaliers, laissent supposer qu’elles étaient à deux niveaux », indique Thomaz Waliszewski. Bâti sur une butte qui surplombe la plage, le « village », également occupé du temps des Byzantins (jusqu’au VIe siècle), est desservi par cinq ruelles. Le sol des maisons est couvert d’un dallage de pierre ou de « mosaïques simples » (tesselles en marbre blanc). Un pavement de mosaïques composé de motifs en écailles rouges, noirs et blancs, a été trouvé dans l’une des pièces. Des sondages menés pour mieux connaître la chronologie du site ont permis de repérer, sous les fondations romaines, deux couches d’occupation datant de la période hellénistique et de l’âge du fer. Au nord du quartier, dit « zone industrielle », deux pressoirs à huile ont été dégagés, mais « il en existait plusieurs autres, car de nombreux éléments appartenant à cette industrie ont été déterrés au cours des fouilles », estime le responsable, ajoutant que « les résidus de production de poterie trouvés sur le site confirment l’existence jadis d’ateliers de fabrication ». Outre les vestiges architecturaux, des centaines de pièces de monnaies, de lampes à huile, d’amphores, de verre, de céramiques culinaires et de céramiques fines ont été recueillis. « Les produits importés sont nombreux et attestent des liens économiques entre les Porphyréoniens et l’Afrique du Nord, l’Espagne, l’Asie Mineure, l’Égypte, Antioche. Une collection d’importations de céramiques hellénistiques datant des IIIe et IIe siècles avant J-C jusque la fin du XIe siècle, a été également exhumée. » Thomaz Waliszewski signale que le site recèle aussi une quantité d’outils, de poids, de serrures, et tout un matériel de pêcheurs dont un grand ensemble d’hameçons. Toutefois, « aucune trace du port antique » n’a été découverte à ce jour ; et alors que le nom de Porphyréon est lié en quelque sorte à la production de la pourpre, « seulement trois murex ont été trouvés sur les lieux », ajoute le directeur des fouilles. Toujours côté nord, une nécropole romaine, mise au jour en 1997, renferme 28 tombes taillées dans les rochers, dont deux sont ornées de peinture. En 2003, le cimetière antique a été enfoui sans vergogne sous les constructions d’un complexe balnéaire et seuls cinq sarcophages, exposés dans le jardin du bâtiment, sont encore visibles. Plus bas, adossés à la butte, les vestiges de la basilique byzantine sont imposants. Bâtie entre le Ve et le VIe siècle, l’église à trois nefs se déploie sur 40 mètres de long et 20 mètres de large, « sans compter les dépendances ecclésiastiques encore ensevelies sous la dune », fait observer l’archéologue. Il précise que « les délimitations liturgiques ont été relevées à l’intérieur du sanctuaire en ruine, mais aucune trace d’autel n’a été repérée ». La douzaine de mosaïques, qui pavaient entièrement le sol de la basilique, ont été mises à l’abri du pillage, dès la découverte de la basilique en 1987. À la demande de Walid Joumblatt, alors ministre du Tourisme et des Travaux Publics, elles ont été démontées et conservées au palais de Beiteddine. De même, les objets (lanternes, vases, encensoirs en bronze, etc.). « D’après les récits des voyageurs du XIXe et XXe siècles, les ruines de Jiyeh étaient beaucoup plus étendues vers le Sud, et tout près s’élevait un caravansérail, le khan Nabi Younès », affirme Waliszewski, signalant que non loin des ruines, une mosquée ancienne emploie des éléments architecturaux de la basilique, notamment des colonnes. « Le démantèlement progressif du site a commencé au XIXe siècle et ce qui en reste n’est qu’un petit fragment du Porphyréon antique. »
May MAKAREM

À proximité de la basilique byzantine découverte fortuitement à Jiyeh, en 1987, et d’une nécropole datant de l’époque romaine tardive, un grand quartier d’habitations romain et une zone industrielle ont été mis au jour par les archéologues Polonais.


Au début des années 1900, les prospections archéologiques menées à Jiyeh par Ernest Renan et...