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Actualités - REPORTAGE

Correspondance Le bois fait main qui adoucit les mœurs

WASHINGTON, d’Irène MOSALLI Martin Puryear en 46 sculptures rétrospectives. Comme l’échelle de Jacob, celle de Martin Puryear, installée à la National Gallery of Art et qui semble s’élancer à l’infini avec ses onze mètres de haut, annonce la rétrospective qui lui est consacrée. Elle donne à voir 46 de ses œuvres exécutées entre 1976 et aujourd’hui. Martin Puryear est l’un des plus grands sculpteurs américains contemporains et l’un des maîtres de l’amalgame du minimalisme et de l’artisanat du bois à l’ancienne. Toutes ses œuvres sont faites main à partir de matières naturelles, principalement le bois sous toutes ses formes. Si elles font penser aux techniques des menuisiers, des tisseurs de panier, des constructeurs de bateaux, c’est parce qu’elles sont le fruit d’une expérience des plus panachées. Après avoir fait des études d’art à l’Université de Yale avec des professeurs tels que le peintre abstrait Al Held et le sculpteur minimaliste Richard Serra, Puryear (né en 1941, à Washington) s’embarque, avec le Corps de paix, au Sierra Leone où il se passionne pour le travail artisanal du bois. Puis la Suède et son design du bois l’attirent. Le Japon aussi. Le Paris des surréalistes est également inscrit à son périple. Retour aux USA, il équilibre ces éléments qui s’opposent en principe. Et c’est là son talent. Un minimalisme élaboré Personne autant que lui n’a célébré et honoré le bois qui règne en maître absolu dans cette exposition-rétrospective. Ses sculptures rejettent les formes rigides et épurées que privilégient les minimalistes pour mieux laisser apparaître le travail du bois. Il peut le tordre pour en faire un bracelet, le tresser comme de la paille et le travaille donc en véritable virtuose du raffinement. Sciemment, il veut que l’on puisse associer ses sculptures à des créatures vivantes et même des objets du quotidien, mais ne propose pas une représentation définitive. Ainsi Self (Soi), un monolithe noir, tout lisse, suggère la vérité cachée d’une personne, aussi bien qu’une tête couverte, un museau, un rocher, ou une borne. Old Mole (Vieille taupe), faite de bandes de cèdre rouge croisées, ressemblerait à un panier, à une boule en ficelle et à une tête d’oiseau. Confessionnel a la forme d’un masque africain qui a été encastré dans un isoloir comme pour complètement l’obstruer. Ad Astra est un immense tétraèdre monté sur roues en référence aux différentes facettes de l’architecture de Pei qui a signé l’aile est de la National Gallery of Art. Chez lui le désir, Desire, est monumental. C’est la plus grande pièce qui est donnée à voir. Elle est composée d’une roue gigantesque attachée à un panier par un axe en bois de neuf mètres de long, pour dire le mouvement au-delà des frontières de l’espace. Même si l’on ne s’adonne pas à ce jeu allusif, on reste captivé par les beaux effets visuels des sculptures relevant d’un minimalisme élaboré. On a dit qu’elles pouvaient être aussi délimitées et aussi abstraites que celles de Brancusi, Noguchi et Arp, et aussi ludiques que des Calder ou des Oldenbourg. Installées dans douze pièces contiguës, ces créations de Martin Puryear sont regroupées selon les idées et les formes structurelles qui ont joué un rôle récurrent dans sa manière de travailler. En sculptant, cet artiste afro-américain a recherché la sérénité plus que l’émoi, faisant la part du géométrique et de l’organique avec un aplomb zen. Avec lui, le bois perd sa dureté pour adoucir les mœurs.
WASHINGTON,
d’Irène MOSALLI

Martin Puryear en 46 sculptures rétrospectives.

Comme l’échelle de Jacob, celle de Martin Puryear, installée à la National Gallery of Art et qui semble s’élancer à l’infini avec ses onze mètres de haut, annonce la rétrospective qui lui est consacrée. Elle donne à voir 46 de ses œuvres exécutées entre 1976 et aujourd’hui....