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Actualités - REPORTAGE

Programme de partenariat entre collectivités territoriales en Méditerranée De Beyrouth à el-Mina, un seul souhait : Archimède II

Malgré l’instabilité politique et la guerre qui ont prévalu en 2006 le projet Archimède a envoyé un message d’espoir aux Libanais. Archimède, un projet, qui s’inscrit dans le cadre de la coopération euromed, a été initié par le programme MED-PACT. Beyrouth, midi. Le quartier de Zokak el-Blatt commence à grouiller de jeunes. C’est la sortie des écoles. Envahissant les rues, seuls ou en bandes, les écoliers rentrent chez eux, cartables et livres en bandoulière. Dans une allée ombragée, un couple de lycéens échange, discrètement, des gestes tendres. Zokak el-Blatt comprend un chiffre record de collèges et de lycées. On compte au moins huit établissements scolaires dans ce quartier de la capitale libanaise, connu pour sa population multiconfessionnelle. Autant de raisons pour lesquelles la municipalité de Beyrouth, en coopération avec Majal, l’institut de planification urbaine à l’Académie libanaise des beaux-arts (ALBA) – Université de Balamand, ont choisi cette zone pour y réaliser un projet pilote de l’Union européenne, baptisé Archimède. Ce projet, qui s’inscrit dans le cadre de la coopération euromed, a été initié par le programme MED-PACT qui vise à favoriser les relations Nord-Sud. Il est financé à 80 % par la Commission européenne. Zokak el-Blatt n’est que la première étape d’un plan incluant, à terme, les quartiers qui entourent le centre-ville de Beyrouth. Cette ceinture, de Gemmayzé à Aïn el-Mraïssé en passant par Basta et Kantari, n’a pas été incluse dans le projet de reconstruction du centre-ville chapeauté par Solidere. Or cette zone géographique comprend un héritage inestimable, une richesse non seulement architecturale, mais également dans son mode de vie typiquement beyrouthin. «?Les promoteurs sont en train d’envahir cette région très convoitée, entraînant une destruction systématique de son patrimoine culturel varié relevant de plusieurs périodes?», affirme Rachid Jalkh, adjoint au président de la municipalité, chargé des relations internationales. Renforcer l’identité locale «?Le but de ce projet est de régénérer, de revitaliser le tissu architectural du quartier?», renchérit Serge Yazigi qui dirige Majal. Face à l’offensive des entrepreneurs avides de profit, Archimède vise «?à maintenir les habitants sur place en conservant la structure actuelle de la zone pilote et en l’ouvrant au tourisme?». L’idée centrale est donc de «?conserver l’âme du quartier et de renforcer l’identité de ses secteurs, tout en créant des projets économiques attrayants?», explique-t-il. «?Les étudiants de l’ALBA ont fait une étude sur place. Ils ont passé en revue tous les immeubles ayant un caractère architectural spécifique?», ajoute M. Yazigi qui estime que la coopération avec la ville de Venise, parrain européen de la capitale libanaise pour ce projet, fut bénéfique au niveau de la méthodologie?: «?L’échange de compétences et l’aide à la contextualisation de l’approche sont un aspect déterminant du rôle joué par nos partenaires européens. Ce que nous allons apprendre servira par ailleurs de modèle pour les autres zones.?» L’étude préparée doit ainsi mener à des actions précises pour la sauvegarde du patrimoine, la restauration des infrastructures, des réseaux et de la voirie. L’organisation d’événements socioculturels est également prévue. «?La municipalité de Beyrouth propose d’organiser une série de manifestations à Zokak el-Blatt pour renforcer son rôle?», déclare M. Jalkh. À l’occasion de la désignation, l’année prochaine, de Beyrouth «?Ville mondiale du livre?», un événement baptisé «?Le livre dans la rue?» doit ainsi être organisé dans ce quartier. Archimède fera partie intégrante de cet événement, au cours duquel il fera sa première apparition, ajoute-t-il. M. Yazigi déplore néanmoins quelques difficultés au cours de la réalisation de l’étude de faisabilité sur le terrain. «?Il fallait introduire un nouveau concept, puisque le projet ne vise pas uniquement les bâtiments?», affirme-t-il. «?Or toute décision peut être mal interprétée dans le contexte politique actuel?», renchérit M. Jalkh, regrettant en outre le fait que les lois au Liban n’ont pas évolué pour couvrir les problèmes actuels. En attendant Archimède II Les responsables du projet espèrent toutefois que la visibilité d’Archimède permettra une prise de conscience, au niveau de la société civile, des dangers menaçant le patrimoine beyrouthin, et incitera l’opinion publique libanaise à faire pression afin de moderniser la législation actuelle. «?Malheureusement, il faut du temps et nous avons sûrement besoin d’un Archimède II pour concrétiser cette vision?», espère M. Jalkh. Un appel également lancé avec insistance par Samer Annous, le coordinateur du projet Archimède pour la ville d’el-Mina, une bourgade de 60?000 habitants également multiconfessionnelle, en bordure de Tripoli, au Liban-Nord. Pour lui, le temps joue contre la réalisation du projet. «?La situation du vieux quartier d’el-Mina est catastrophique. Les vieux immeubles sont délabrés, les maisons tombent en ruines, les habitants partent, les métiers traditionnels disparaissent?», déplore ainsi M. Annous, qui enseigne également à l’Université de Balamand, et s’est vu confier l’étude de terrain par la municipalité d’el-Mina. Encourager les métiers traditionnels Malgré toutes ces difficultés, il note le bon contact des étudiants avec la population d’el-Mina. «?Il y a un côté essentiellement positif dans Archimède, estime le coordinateur du projet, c’est la réceptivité des habitants du quartier. En répertoriant les immeubles historiques, nos étudiants ont rencontré les propriétaires des sites identifiés. Ceux-ci ont pris conscience de l’importance du patrimoine d’el-Mina, et par conséquent ne le gâcheront pas?». L’autre caractéristique du projet MED-PACT consiste à créer des opportunités de travail qui inciteraient la population locale à rester sur place. «?Archimède tente d’encourager les métiers traditionnels dans le cadre d’une politique touristique globale?», affirme M. Annous. «?Au lieu de construire, par exemple, une poissonnerie moderne, nous essayons de soutenir le commerce traditionnel. Le projet Archimède prévoit en outre la rénovation de deux maisons pour les transformer en auberges (bed and breakfast), ainsi que la publication d’un guide touristique, sans oublier la création d’un “incubateur”, un centre d’affaires pour soutenir les petits entrepreneurs locaux?», explique-t-il. Un message d’espoir Alors que le soleil descend vers la mer, les ruelles pavées du vieux souk d’el-Mina commencent à se remplir de monde. Les uns sirotent un café, les autres se font raser chez le barbier du coin. Dans une impasse, les serveurs arrangent déjà les tables d’un pub ouvert récemment. «?La guerre contre Fateh el-Islam l’été dernier, à quelques kilomètres de là, fut, d’une certaine manière bénéfique pour le quartier. On peut maintenant servir de l’alcool dans nos établissements, les journalistes étrangers venus couvrir le conflit ont donné une impulsion aux petits commerces?», déclare, amusé, Samer Annous. «?Et alors que les combats faisaient rage, nous travaillions pour achever le projet Archimède. C’était pour nous un défi, un message d’espoir pour le quartier et ses habitants?», conclut-il. Nom?: MED-PACT – Programme de partenariat entre collectivités territoriales en Méditerranée. Budget?: € 1,97 million (MEDA). Durée?: 2004-2008 Partenaires méditerranéens participants?: Algérie, Égypte, Israël, Jordanie, Liban, Maroc, Autorité palestinienne, Syrie, Tunisie, Turquie. L’objectif global du programme MED-PACT est d’encourager une meilleure compréhension entre sociétés civiles du Nord et du Sud de la Méditerranée en développant la coopération, les échanges et le dialogue entre les villes. Archimède est un des 9 projets du programme. Antoine Ajoury
Malgré l’instabilité politique et la guerre qui ont prévalu en 2006 le projet Archimède a envoyé un message d’espoir aux Libanais. Archimède, un projet, qui s’inscrit dans le cadre de la coopération euromed, a été initié par le programme MED-PACT.
Beyrouth, midi. Le quartier de Zokak el-Blatt commence à grouiller de jeunes. C’est la sortie des écoles. Envahissant...