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Actualités - CHRONOLOGIE

« La Constitution n’a jamais été autant bafouée », affirme l’ancien chef du Législatif Husseini crée un précédent et démissionne du Parlement

«Tout au long de ma vie politique et institutionnelle, je n’ai pas vu une destruction aussi systématique de la Constitution comme ce qui se passe aujourd’hui. C’est comme si on voulait un État sans institutions et une patrie sans citoyens. » C’est en ces termes amers qui expriment un rejet profond de la situation actuelle que l’ancien président de la Chambre et l’actuel député Hussein Husseini, qui avait joué un rôle important dans l’élaboration et l’adoption de l’accord de Taëf en 1989, s’est adressé à ses collègues avant de présenter sa démission au président Nabih Berry. L’annonce a suscité la stupeur au sein de l’hémicycle, d’autant que c’est la première fois qu’un tel événement se produit dans l’histoire de la République libanaise. Husseini a d’ailleurs voulu choquer ses collègues pour les pousser à arrêter ce qu’il appelle le processus de destruction de l’État. Selon lui, la classe politique, mais aussi la classe financière et l’élite intellectuelle sont toutes responsables de la situation actuelle. D’ailleurs, après avoir prononcé son discours, Hussein Husseini est sorti de la salle et le président de la Chambre a eu ce seul commentaire : « C’est une prise de position qui fait mal. Puisse-t-elle nous pousser tous à agir pour préserver le Liban. » L’ancien président de la Chambre avait dénoncé dans son discours le chemin parcouru, selon lui, à reculons, depuis la création de l’État libanais et les rares tentatives d’édifier des institutions. Il a évoqué à plusieurs reprises les positions de l’imam Moussa Sadr, qui avait défini l’identité nationale de la communauté chiite et son intégration totale dans le tissu social libanais. Le président Hussein Husseini a aussi parlé de l’accord de Doha qui a permis, selon lui, à toutes les parties en conflit de réintégrer le pouvoir, ajoutant que les appellations d’opposition et de majorité sont dépourvues de sens puisque les élections législatives de 2005 se sont déroulées sur la base d’un accord quadripartite et tout est désormais « rentré dans l’ordre », selon lui, à Doha. Husseini a qualifié la déclaration ministérielle de propos vides de sens et il s’est insurgé devant l’interdiction faite à un ministre de présenter sa démission, selon les termes de l’accord de Doha. Selon lui, il s’agit d’une violation flagrante des libertés, et comme le député a encore le droit de démissionner, il a préféré présenter la sienne. Il a encore rappelé un discours qu’il avait prononcé au moment de sa réélection à la tête de la Chambre en 1985 : « Le plus grave pour une patrie est lorsque les citoyens la considèrent comme une des régions du pays. Le plus grave pour un peuple est lorsqu’il se transforme en rassemblement et le plus grave pour une religion est lorsqu’elle devient une confession... » Husseini a ajouté que ces propos sont plus que jamais d’actualité. Il a aussi défini ce qu’il considère comme les quatre constantes du Liban : la liberté, l’égalité, la vie digne et la solidarité. Tout cela, dans le cadre d’un État unique et sur fond d’allégeance totale à la patrie. Husseini a longuement développé les diverses étapes par lesquelles est passé le Liban dans sa difficile tentative d’édifier un État ainsi que les documents qui ont été avancés à différentes périodes. Il a enfin évoqué le peu de légitimité du Parlement actuel élu sur la base d’une loi contraire à la Constitution, puisqu’elle ne consacre pas le principe d’égalité entre les citoyens, et il a finalement tiré sa révérence... avec élégance. Sleiman presse Husseini de surseoir à sa décision Le chef de l’État, le général Michel Sleiman, est entré en contact par téléphone hier soir avec l’ancien chef du Législatif, Hussein Husseini, et l’a invité à surseoir à sa décision de démissionner de son poste de député. Le président Sleiman a souligné à ce propos que le rôle de M. Husseini en tant que référence parlementaire est important sur le double plan national et parlementaire. Un communiqué de la présidence de la République indique à ce propos que le chef de l’État a rendu hommage à cette occasion aux qualités et à l’action de l’ancien chef du Législatif, soulignant que ce que ce dernier ressent au niveau des failles institutionnelles est également ressenti par les Libanais sincères qui ont hâte de voir les institutions reprendre leur rôle national normal. N. Lahoud, Chamseddine et Harb demandent à l’ancien président de la Chambre de revenir sur sa démission À l’issue du vote de confiance, les ministres Nassib Lahoud et Ibrahim Chamseddine, et le député Boutros Harb se sont rendus chez le député Hussein Husseini, et lui ont demandé avec grande insistance de revenir sur sa démission « pour que la Chambre ne perde pas l’un de ses grands hommes d’État ». « Cette démission constitue un grand choc pour tout le monde, et pour moi aussi. Nous comprenons le sens de cette démarche. Le président Husseini, grand homme d’État, sent que de grands exploits réalisés par le Liban sont menacés. Il exprime son patriotisme et sa peur réelle, surtout pour l’idée même de l’État – et non seulement le projet », a indiqué M. Chamseddine à l’issue de la visite. « Le président Husseini est, avec l’imam Moussa Sadr et cheikh Mohammad Mahdi Chamseddine, l’un des fondateurs de l’histoire politique moderne chiite au Liban. (...) Sa démission constitue une protestation contre la mauvaise gestion de toutes les affaires depuis Taëf. Cette démission rappelle le sit-in organisé par l’imam Moussa Sadr et cheikh Mohammad Mahdi Chamseddine à la mosquée Safa, à Aamiliyé, pour protester contre la violence comme moyen de résolution des conflits politiques », a noté le ministre d’État pour le Développement administratif. « Nous aimerions qu’il retourne à la Chambre. Il ne faut pas que les personnes de cette trempe laissent le champ libre exclusivement à ceux qui ne sont pas grands », a-t-il conclu. De son côté, le vice-président du Conseil supérieur chiite, cheikh Abdel Amir Kabalan, a félicité M. Husseini pour son geste. Il convient de souligner que le président de la Chambre, Nabih Berry, s’est également rendu chez M. Husseini pour discuter de la démission. Après le retrait de Hussein Husseini de la Chambre, M. Berry avait lancé : « Il a démissionné, d’accord. Mais encore faut-il qu’on accepte sa démission. »
«Tout au long de ma vie politique et institutionnelle, je n’ai pas vu une destruction aussi systématique de la Constitution comme ce qui se passe aujourd’hui. C’est comme si on voulait un État sans institutions et une patrie sans citoyens. » C’est en ces termes amers qui expriment un rejet profond de la situation actuelle que l’ancien président de la Chambre et...