CONCERT - Le rendez-vous annuel a réuni samedi soir la grande famille du village Sourat, ou l’authenticité revisitée

Ils sont fidèles, les «?Amis de Sourat?». Fidèles et téméraires. Depuis la naissance de ce rendez-vous annuel , plus précisément en août 2002, ils n’ont jamais manqué à leur engagement sauf en 2006 (circonstances obligent ). Et si en 2007, la date avait été reportée jusqu’en octobre, la manifestation culturelle avait quand même eu lieu. Cette année encore, toute la grande famille était de nouveau là sous les chênes centenaires à célébrer l’amitié, la musique et, surtout, le village de Sourat. C’est une nuit bien douce. Une brise légère fait frémir les feuilles des arbres. Mais les chênes sont solides, imperturbables. C’est là, dos à l’église Mar Doumit, que la famille de Sourat, qui s’est encore élargie cette année, s’assemble. Certains sont venus de très loin et découvrent pour la première fois ce rendez-vous festif qui réunit les mélomanes, mais aussi tous ceux assoiffés d’authenticité et de paix et qui trouvent en ce lieu un havre de paix. «?Comme une pause pour se déconnecter des turbulences de la vie quotidienne?», diront quelques-uns. Ce havre de paix a pour nom magique Sourat. On y accède par la ville de Batroun en serpentant à travers les sentiers de la montagne et en s’engouffrant dans la vallée. Loin, très loin du bruit. Mais si près du ciel. C’est pour insuffler de la vie à ce village et le faire connaître que ce groupe d’amis, originaires de ce village du Nord, encouragés par le Dr Issa Farkh (cheville ouvrière du projet et lui-même grand mélomane), ont créé cette manifestation culturelle et conviviale. On peut ainsi venir tôt dans l’après-midi et faire la visite des vestiges de Kfeir-Chleimane qui remontent à l’époque païenne, ou plus tard vers 19 heures pour assister au concert et participer au banquet traditionnel. Classique et chansons traditionnelles Le programme de l’édition 2008 débutait donc ce soir par un concert classique. Deux virtuoses du violon, Manuel Porta et Claude Chalhoub, se sont rencontrés et ont fait dialoguer leurs instruments. Ils ont présenté devant l’audience hypnotisée des morceaux panachés?: Concerto pour deux violons en ré mineur de J.S. Bach, suivi d’un autre en la mineur de Vivaldi, pour finir enfin par des extraits du nouvel album de Chalhoub, baptisé Diwan. Entourés de l’ensemble Trait d’union, le jeune musicien libanais (prix d’excellence au Royal College of Music de Londres) et le violoniste espagnol (professeur de violon et chef des études au Conservatoire de Liceu à Barcelone) ont offert une performance teintée à la fois d’énergie et de douceur. Très applaudis par le public, ils se sont généreusement pliés à ses demandes avant de donner la place à un autre interprète. Encore un autre habitué. Originaire de Deir el-Qamar, Élie Rizkallah avait déjà séduit le public l’an dernier par sa voix chaude et grave. Accompagné de Rayan el-Habre au piano électrique, Ghassan Sahhab au qanoun basse, Ahmad el-Khatib aux percussions, Ziyad Sahhab au oud, Bachar Farran à la guitare et Salman Baalbaki au req, le chanteur a entamé un répertoire issu de la pure tradition libanaise. Nehana wel amar Jirane, Baadana des frères Rahbani ou La Tansani?; autant de titres qui ont ramené à l’esprit des souvenirs au goût de suranné. Une authenticité revisitée que les invités ont eu aussi à «?savourer?» une heure trente plus tard lors du banquet traditionnel où mets et boissons du terroir étaient à l’honneur. Toujours en musique. En rentrant la nuit de cette soirée unique, chacun s’est mis à rêver : «?Pourquoi pas Bijderfal, Ijdabra ou Ibrine, tous ces villages ternis par les années?? Pourquoi ne pas les refaire vivre à la manière de Sourat?? On aurait ainsi des multitudes de soirées uniques à vivre.?» Colette KHALAF