INCENDIES - Les pompiers éteignent les derniers foyers à Kartaba Les pertes des derniers feux de forêt se chiffrent à plus de 10 millions de dollars

Les terribles incendies qui ont ravagé mardi (et les jours précédents) des forêts dans deux belles régions du Liban, Kartaba et Aley, ont laissé leurs traces hier : alors que le feu, qui avait été combattu avec succès la veille, semblait définitivement éteint à Aynab, dans la région de Aley, la vigilance était toujours de mise, de crainte d’une reprise des flammes à n’importe quel moment. Quant à Kartaba, l’incendie monstre a été circonscrit dans la vallée de Janna et de Mar Sarkis, mais les pompiers continuaient à surveiller étroitement la région, de peur, là aussi, d’une recrudescence des flammes. Par ailleurs, des foyers restaient allumés dans la montagne de Nemroud (Kartaba), ce qui a requis, hier, une nouvelle intervention des hélicoptères de l’armée et d’un appareil venant de Chypre, dès 6h, pour les éteindre complètement. Un premier bilan de ces derniers incendies a été présenté hier par l’Association de conservation et de développement des forêts (AFDC), qui exécute, entre autres, un programme national pour l’amélioration des moyens de lutte contre le feu, sous l’autorité du gouvernement. Selon l’AFDC, l’incendie de Kartaba a commencé à 20h30 le 1er août, et s’est poursuivi durant cinq jours, détruisant une superficie de 3,2 millions de mètres carrés de chênes et de pins fruitiers. Les chênes ont été perdus dans une proportion de 70 %, et les pins à 30 %. Le coût des dégâts est estimé à 5,5 millions de dollars (coût du bois). Ces terrains appartiennent dans leur majorité à des wakfs religieux ou sont des terrains municipaux. Les premiers éléments de l’enquête suggèrent que le feu a commencé dans la vallée de Janna. Toujours selon le rapport de l’AFDC, l’incendie de Aley a touché Sarahmoul, commençant à al-Bassatin, Aynab, Qabrechmoun, Mouanassé et Aïn Anoub. Le sinistre s’est déclaré dans la nuit de lundi à mardi, et a été combattu par dix voitures de la Défense civile et deux hélicoptères de l’armée. La superficie touchée est de 1,4 million de mètres carrés de pins et de différents petits arbres forestiers, sans compter des terrains agricoles. Les chênes ont été le plus touchés, ainsi que les pins, la plupart se trouvant sur des terrains privés. La perte est estimée à 4,5 millions de dollars. Ainsi, le total de la superficie brûlée, après les incendies de grande envergure d’il y a quelques semaines et ceux de cette semaine, est de 660 hectares en moins d’un mois et demi, sachant que la moyenne annuelle est de 1 200 hectares. Par ailleurs, l’AFDC a annoncé hier avoir lancé, en partenariat avec le ministère de l’Environnement et le comité administratif de prévention contre les feux de forêts au Liban, un projet financé par l’Union européenne, sous le thème du « développement et de la mise en place d’une stratégie nationale pour la gestion des incendies de forêts au Liban ». Dans le cadre de ce projet, trois sessions de formation ont déjà été organisées pour améliorer les compétences des membres de la Défense civile, des officiers de l’armée et des gardes forestiers, au centre de l’association à Ramlieh et au siège de l’Institut d’océanographie de Batroun. Quelque 27 membres de la Défense civile, 28 officiers et 32 gardes forestiers en ont profité. Les sessions ont été données par un expert espagnol. Quatre principes fondamentaux, selon le LEP Pour sa part, dans une intervention à la Voix du Liban, le député Akram Chehayeb, président de la commission parlementaire de l’Environnement, a abordé le sujet des incendies, et plaidé une fois de plus pour la création d’une institution nationale pour les forêts, le plus tôt possible. Il a jugé extrêmement grave que les incendies aient déjà détruit 660 hectares cette année, alors que la moyenne annuelle ne dépasse pas les 1 500 hectares, rappelant que les incendies monstres de l’année dernière avaient anéanti 4 000 hectares de forêts. « Il faut donner aux volontaires de la Défense civile un véritable rôle par la création d’une unité verte, a-t-il insisté. Il faut aussi penser à la sensibilisation et à l’application de la loi, espérant que cela mettra un terme aux incendies qui ravagent les forêts libanaises. » Délimitation des responsabilités, prévention, surveillance et planification : ces quatre principes fondamentaux d’une lutte efficace contre le feu ont été énumérés hier par le Parti libanais de l’environnement (LEP), dans un communiqué publié par son président, Habib Maalouf. Le communiqué s’attarde sur la nécessité de donner aux sujets écologiques la priorité, demandant au nouveau gouvernement de former une commission ministérielle dont la mission urgente serait de mettre au point un plan global, fondé sur ces quatre principes fondamentaux. Le premier de ces principes est, selon le LEP, la délimitation des responsabilités, remarquant qu’« il n’est pas normal que cette responsabilité reste floue au sein de l’administration libanaise ». « Si le ministère de l’Agriculture est la partie responsable, légalement, de la gestion des forêts et de l’adoption de plans de lutte contre les incendies, il doit donc assumer ses responsabilités, et définir, dans le cadre d’un plan, le rôle des autres ministères », souligne le texte. La prévention est le second principe, visant à limiter la naissance de foyers dans les forêts. Quant au troisième principe, il s’agit de la surveillance, suivant la logique qui dit qu’un incendie vite repéré est plus facile à éteindre. Pour cela, le LEP suggère la construction de tours d’observation et l’aménagement de lacs artificiels dans les régions sensibles, et propose qu’un plus grand nombre de gardes forestiers et de volontaires soient engagés à cette fin, et que les responsables soient pénalisés en cas d’échec. Enfin, M. Maalouf estime que pour mettre en application un plan de lutte efficace sur base de ces principes, il n’est pas nécessaire de dépenser des sommes énormes pour l’achat d’avions, sachant que les hélicoptères de l’armée peuvent être équipés pour lutter contre le feu.