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Actualités - REPORTAGE

CORRESPONDANCE - Le metteur en scène libano-canadien à Avignon «?Seuls?» de Wajdi Moawad , ou comment dit-on mémoire en arabe??

AVIGNON, de Nayla de FREIGE Après « Littoral » en 1999, Wajdi Moawad est revenu cette année à Avignon avec « Seuls »*, donnant six représentations à guichets fermés. Pour l’édition 2009, il sera l’artiste associé du festival et l’inspirateur de la programmation aux côtés des deux codirecteurs du Festival «?in?» d’Avignon. Dans « Seuls », Wajdi Moawad, auteur-metteur en scène-acteur, seul sur scène, se recentre sur lui-même, sur son passé, son exil, sa mémoire. «?Qui sommes-nous???»,?» Où sommes-nous???»,?«?Qui croyons-nous être???»,?«?Comment dit-on mémoire en arabe???» (la phrase de la fin, la dernière interrogation du spectacle). Dans Seuls, Halwan, étudiant universitaire, exilé très jeune au Québec, termine sa thèse de sociologie sur «Le rôle du cadre comme espace identitaire dans les solos de Robert Lepage», mais n’arrive pas à trouver de conclusion… Il est toujours seul sur scène, souvent vêtu d’un simple caleçon, avec son ordinateur et son téléphone à roulettes à travers lequel il communique avec le monde extérieur, mais plus particulièrement avec son père et sa sœur (les voix, imprégnées d’accent libanais, ne sont autres que celles du père et de la sœur de Wajdi Moawad). Le réel et l’imaginaire se confondent. La recherche d’une identité, la souffrance humaine qui en découle obsèdent tous les exilés libanais, de Maalouf à Moawad, en passant par tant d’autres écrivains ou artistes émigrés sous d’autres cieux.... Les chansons de Feyrouz et de Mohammad Abdel Wahab ponctuent les scènes nostalgiques, et le jardin de la maison familiale de Deir el-Qamar symbolise tout le Liban. Ce jardin où, la nuit, Halwan regardait le ciel étoilé puis, parce que quelqu’un lui avait dit qu’il ne fallait pas pointer les étoiles du doigt, les reproduisait en couleurs sur un papier pour pouvoir enfin essayer de les compter. Il se prenait pour une étoile filante… et l’obus qui est tombé un jour dans le jardin en était peut-être une. Halwan reproche à son père de mener une vie «?banale?» au Canada, où l’on vit par moins 30 degrés, et ne comprend pas pourquoi ce père, d’une manière anodine, lui répète toujours, durant les pauses publicitaires de la télé, qu’il a tout abandonné, sacrifié, pour le bonheur de ses enfants. La première partie est sans couleurs. Les objets sont monochromes avec un lit, une chaise et des murs blancs pour tout décor. On se sent comme dans une prison, où les ombres du passé, du rêve ou du cauchemar, hantent l’écran-rideau de la fenêtre (ici, éclairage et vidéo jouent un rôle important). Suivront les scènes du coma. D’abord, celui du père, à qui il faut s’adresser dans sa langue maternelle?: les mots reviennent très lentement quand on a passé des années à l’étranger?! Puis, c’est le coup de théâtre, le coma de Halwan, qui nous plonge dans le monde de l’inconscient où tout redevient couleurs et violence?: durant la dernière demi-heure, l’acteur ne parle pas (alors que pour l’histoire de la pièce, son personnage va devenir aveugle suite à un accident dans une cabine de photomaton), mais gesticule dans tous les sens et transforme les planches du gymnase Aubanel en un grand atelier d’artiste?; il éclabousse les lieux avec des couleurs vives, du rouge, du bleu, du jaune jusqu’à peindre le tableau final qu’il transperce, et s’y engouffre pour sortir de scène. Wajdi Moawad est ovationné. Les spectateurs sortent en commentant le spectacle.?«?Ne sommes-nous pas tous aveugles???» Les festivaliers se déplacent?d’un coin de la ville à un autre, découvrant plusieurs spectacles en une journée. C’est cela Avignon en juillet, un grand théâtre avec plus de mille pièces présentées en permanence aux quatre coins de la ville, entre le «?in?» et le «?off», deux organisations totalement indépendantes, mais tellement complémentaires. Les affiches sont partout. Placardées sur les murs de la ville, accrochées aux poteaux, elles forment un vrai patchwork qui donne le tournis. Grâce à elles, j’apprends que deux Libanaises sont présentes dans la Cité des Papes, dans le cadre du Festival off?: Darina el-Jundi qui donne vingt-six représentations (jusqu’au 1er août) de sa pièce Le jour où Nina Simone a cessé de chanter. Une œuvre qu’elle avait déjà présentée à Avignon l’an dernier. Seule sur scène, elle raconte son histoire et sa guerre à travers le deuil de son père. Et Hala Ghosn qui présente?Beyrouth Adrénaline, la vie sous les bombes, reprise d’un spectacle créé en 2007. Pour cette édition 2008 du Festival d’Avignon, aux moins trois Libanais auront présenté un travail sur leur mémoire. En français. *Après Avignon, Wajdi Moawad se promènera avec «?Seuls?» : du 9 septembre au 4 octobre à Montréal?; du 14 au 18 octobre à Ottawa. Suivra une tournée en France de novembre 2008 à janvier 2009.
AVIGNON, de Nayla de FREIGE

Après « Littoral » en 1999, Wajdi Moawad est revenu cette année à Avignon avec « Seuls »*, donnant six représentations à guichets fermés. Pour l’édition 2009, il sera l’artiste associé du festival et l’inspirateur de la programmation aux côtés des deux codirecteurs du Festival «?in?» d’Avignon. Dans « Seuls », Wajdi Moawad,...