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Actualités - REPORTAGE

Le Pr Saad Khoury fait le point sur le dossier pour «?L’Orient-Le Jour?» L’incontinence n’est pas une fatalité

L’incontinence n’est pas une fatalité et des solutions existent. Tel un leitmotiv, ce message a été encore une fois lancé par les spécialistes en urologie et en gynécologie à l’adresse des femmes. Réunis récemment à Paris dans le cadre des travaux de la quatrième Consultation internationale sur l’incontinence, ils ont appelé les femmes à briser le silence dans lequel elles se murent et à évoquer leur problème d’incontinence avec leur médecin. «?Il est inutile de souffrir seule?», insistent-il, affirmant que la prise en charge de ce trouble a connu d’importants progrès. Qu’est-ce que l’incontinence?? Quelles sont ses causes?? Comment la traiter?? Autant de questions auxquelles répond le Pr Saad Khoury, urologue et secrétaire général de la Consultation internationale sur l’incontinence. Dans une interview accordée à «?L’Orient-Le Jour?», il expose par la même occasion les dernières recommandations pour le traitement de l’incontinence urinaire chez la femme. Perte involontaire d’urine, l’incontinence est un trouble qui toucherait à des degrés variés près de 25?% des femmes en âge moyen et jusqu’à 50?% des femmes âgées en résidence d’accueil. Ce trouble affecte également la gent masculine. Quinze pour cent des hommes âgés de plus de 60 ans en souffriraient, selon les estimations. Les spécialistes distinguent trois formes à ce trouble. L’incontinence urinaire liée à l’effort, qui «?se caractérise par une faiblesse des muscles du périnée et du sphincter urinaire qui maintiennent la vessie fermée et empêchent naturellement les écoulements d’urine?», explique le Pr Khoury. «?Lorsque ces muscles ne peuvent plus assurer leur fonction, une augmentation de la pression abdominale (toux, éternuement, effort physique, rire) peut occasionner des fuites?», poursuit-il. Cette forme d’incontinence est principalement due au traumatisme que subissent le sphincter et les muscles du périnée lors de l’accouchement. L’incontinence par impériosité se manifeste par des envies pressantes (impériosités) que l’on ne peut pas réprimer. La vessie, qui devient hyperactive, se contracte trop tôt et trop fort avec un volume de remplissage faible. «?Des envies très handicapantes d’uriner surviennent ainsi de manière intempestive?», note le Pr Khoury, précisant que cette hyperactivité vésicale peut voiler une maladie telle une infection urinaire, un polype, un calcul dans la vessie, une inflammation vaginale ou encore des affections neurologiques. «?Cette forme d’incontinence est due à une contraction prématurée et trop forte de la vessie causée par un défaut de coordination de la miction entre le cerveau et la vessie. En fait, le cerveau n’inhibe pas suffisamment la vessie qui se contracte prématurément?», signale le Pr Khoury, précisant que le vieillissement des tissus musculaires et de la vessie demeure un facteur favorisant de ces deux formes d’incontinence. «?D’autres causes interviennent, comme l’obésité ou des facteurs héréditaires?», note-t-il. L’incontinence urinaire mixte, enfin, est la plus fréquemment rencontrée chez les femmes. Elle associe l’incontinence d’effort à celle par impériosité. Fuites légères ou sévères Le traitement de l’incontinence dépend de la forme du trouble, de son intensité et de la gêne qu’elle occasionne, «?sachant qu’une femme jeune et active est très gênée par la perte d’une goutte d’urine lors d’un exercice sportif, tandis qu’une personne âgée acceptera mieux ce genre de désagrément?». En cas de fuites légères, le Pr Khoury explique qu’il suffit parfois de modifier son mode de vie et d’adopter des comportements adaptés pour préserver l’appareil urinaire et prévenir les fuites à l’effort. En cas de fuites urinaires sévères, la rééducation du périnée et du sphincter abîmés peut être proposée à tout âge et peut guérir ou stabiliser une incontinence urinaire d’effort minime ou modérée. Elle peut aussi agir sur une incontinence par impériosité. «?La rééducation du périnée doit être proposée en préventif après les accouchements?», insiste le Pr Khoury. Et de préciser que les exercices de rééducation consistent à contracter les muscles entourant le vagin grâce à une «?gymnastique?» adaptée qu’on peut faire soi-même sous le contrôle d’un kinésithérapeute. On peut aussi s’aider dans certains cas de certaines techniques?: • Le bio-feedback ou le rétrocontrôle permet à la femme de prendre conscience du fonctionnement de ses muscles au moyen d’une sonde introduite dans le vagin associée à un signal sonore ou visuel indiquant la contraction et le relâchement. • L’électrostimulation est assurée par une sonde vaginale qui envoie un léger courant électrique et occasionne ainsi des contractions rythmées involontaires. • Le fauteuil de rééducation. Cet exercice consiste à placer la patiente, toute habillée, sur un fauteuil sous lequel passe un courant magnétique déclenchant des contractions du périnée. «?Cette rééducation ne peut être effectuée que sous le contrôle d’un kinésithérapeute spécialisé en uro-gynécologie, en collaboration avec un urologue?», précise le Pr Khoury. Traitements médicamenteux et chirurgical Il n’existe pas de médicaments efficaces pour le traitement de l’incontinence urinaire due à l’effort. Après échec de la rééducation, la prise en charge de cette forme du trouble, quand l’intensité des troubles le justifie, demeure chirurgicale. Plusieurs techniques ont été développées à ce jour, toutes aussi efficaces. La plus courante demeure toutefois la technique des bandelettes sous-urétrales TVT (Tension Free Vaginal Tape) ou TOT (Trans-Obturator Tape). «?L’intervention est réalisée sous anesthésie générale ou péridurale, indique le Pr Khoury. Le chirurgien place une bandelette sous le canal de l’urètre qui le soutiendra durant l’effort et évitera qu’il ne s’ouvre. L’intervention dure près de trente minutes et nécessite une brève hospitalisation. Cette technique a déjà fait ses preuves avec un taux de réussite allant de 80 à 90?%.?» Et de poursuivre?: «?Lorsque les sphincters contrôlant l’ouverture de la vessie sont trop endommagés, on peut également envisager la pose d’un sphincter artificiel. D’autres nouvelles techniques, telles que les ballons ajustables, sont actuellement développées.?» En cas de fuites urinaires par impériosité, un traitement médicamenteux à base d’anticholinergiques pourra être envisagé. «?Ce traitement est susceptible de diminuer les contractions de la vessie, souligne le Pr Khoury. Dans les cas les plus sévères, qui ne répondent pas aux traitements habituels, on peut injecter du Botox dans la paroi vésicale avec de bons résultats. Le Botox paralyse en fait la vessie partiellement et diminue sa force de contraction. Après la ménopause, un traitement hormonal local peut être associé afin de redonner une certaine tonicité aux tissus.?» Nada MERHI
L’incontinence n’est pas une fatalité et des solutions existent. Tel un leitmotiv, ce message a été encore une fois lancé par les spécialistes en urologie et en gynécologie à l’adresse des femmes. Réunis récemment à Paris dans le cadre des travaux de la quatrième Consultation internationale sur l’incontinence, ils ont appelé les femmes à briser le silence dans...