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Actualités - CHRONOLOGIE

Reportage - Le PAM a été contraint de réduire ses livraisons de nourriture en raison de la violence Les déplacés du Darfour fragilisés par la réduction des rations alimentaires

Khamissa Tafaela observe avec angoisse son malingre bébé de 10 mois, qui pleure sur ses genoux. Nabil souffre de diarrhée et de vomissements, tout comme l’enfant qu’elle a déjà perdu dans ce même camp d’Ardamata, dans l’ouest du Darfour. Minutieusement, la Soudanaise tente d’introduire dans la bouche du nourrisson un peu de la pâte gluante énergétique fournie par un médecin. Mais le petit Nabil détourne la tête, indifférent. « La nuit dernière, son état a empiré, il a pleuré toute la nuit. J’ai eu un enfant avec les mêmes problèmes, qui est mort il y a trois ans », dit Khamissa, qui vit ici depuis presque cinq ans avec son mari, maçon, et leurs cinq enfants. Elle ne sait pas pourquoi Nabil est tombé malade, mais les conditions de vie dans le camp sont dures pour les quelque 27 000 Darfouris déplacés par la guerre civile qui sévit depuis 2003. Les cases qui s’y étendent à perte de vue n’offrent qu’une maigre protection contre le soleil brûlant ou les pluies torrentielles. Et depuis deux mois, les rations alimentaires fournies par la communauté internationale ont été réduites de moitié, même si les programmes nutritionnels réservés aux enfants de moins de cinq ans comme Nabil, considérés comme les plus fragiles, n’ont pas été affectés. Dans le camp, on commence à pointer sur l’ONU un doigt accusateur. Le Programme alimentaire mondial (PAM), agence des Nations unies, a été contraint de réduire ses livraisons de nourriture en raison du banditisme et des enlèvements qui rendent tout déplacement dangereux. Le PAM espère nourrir 2,7 millions de personnes au Darfour mais, depuis le mois de mai, les rations de céréales, légumes secs et sucre ont été réduites de moitié. « Avant, la nourriture nous durait 25 jours, aujourd’hui seulement 10 jours. Nous réduisons nos repas et parfois nous nous couchons sans avoir mangé », raconte l’une des femmes assises à côté de Khamissa. « Il arrive un moment où on pleure. On est face à un problème, et on ne peut pas aider ces gens », affirme un expatrié africain dans un camp du Darfour-Sud. « Ils devraient ramener les rations à ce qu’elles étaient avant (...). L’ONU a la capacité et le pouvoir de résoudre ce problème, pour sauver nos vies », réclame cheikh Adam Abdallah Ismaïl, père de 14 enfants. « La situation se détériore. Toutes nos femmes cherchent du travail », comme la fabrication de briques, ajoute-t-il. Mais avec l’arrivée des pluies, il y a de moins en moins de travail. Les hommes estiment en outre trop dangereux d’aller chercher du travail à l’extérieur du camp, gardé par les forces de sécurité du gouvernement soudanais. « C’est impossible. Même si nous allons un kilomètre à l’extérieur, ils nous tireront dessus », affirme cheikh Youssef Haroun Adam. Hors du camp, les travailleurs du PAM ne sont pas non plus en sécurité. Depuis le début de l’année, 79 de leurs camions ont été attaqués et 39 chauffeurs sont portés disparus. Deux chauffeurs ont été tués. Les responsables affirment que les largages aériens sont quatre fois plus chers que les livraisons au sol, et donc encore moins réalisables. Les forces de sécurité et de maintien de la paix dirigées par l’ONU aident à assurer la sécurité, mais elles sont sous-équipées et à court de personnel. « S’ils n’obtiennent pas de nourriture (...), cela va devenir très dur. Et nous nous préparons à y faire face. Nous avons besoin de compenser le manque de nourriture par une plus grande protection », déclare le général Balla Keita, le commandant dans l’ouest du Darfour de la Minuad, la force conjointe de l’ONU et de l’Union africaine. Pour l’instant, le PAM se tourne vers le gouvernement soudanais, qui aide à assurer la sécurité des convois bien qu’il soit partie prenante dans le conflit du Darfour.
Khamissa Tafaela observe avec angoisse son malingre bébé de 10 mois, qui pleure sur ses genoux. Nabil souffre de diarrhée et de vomissements, tout comme l’enfant qu’elle a déjà perdu dans ce même camp d’Ardamata, dans l’ouest du Darfour.
Minutieusement, la Soudanaise tente d’introduire dans la bouche du nourrisson un peu de la pâte gluante énergétique fournie par un...