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Actualités - CHRONOLOGIE

CORRESPONDANCE Dans l’objectif de Richard Misrach à la National Gallery of Art Une mer étale, plus pasqualienne que bergère d’azur

WASHINGTON, d’Irène MOSALLI Sur les cimaises de la National Gallery of Art à Washington, la mer étend son immensité dans des photos de grandes dimensions (2m de haut x 3m de large), portant la signature d’un artiste américain de renom, Richard Misrach. Ces vues, une vingtaine, développant le thème « À la plage », le photographe les a prises de l’étage élevé de son hôtel à Hawaï. La mer est calme et d’un beau bleu, le sable brille sous le soleil et les baigneurs s’adonnent aux plaisirs aquatiques ou s’occupent à parfaire leur bronzage. Bref, des moments idylliques que l’on va habituellement chercher dans cette île du Pacifique. Sauf que ces images ont été prises le lendemain même du 11 septembre 2001. Misrach, connu pour traiter les relations tendues du monde contemporain avec la nature, spécialement de l’Ouest américain, n’a pas pu soustraire ce drame de son objectif. Ainsi, il opère à partir d’un point élevé, comme pour des photos aériennes, et saisit la mer dans son étendue illimitée dans laquelle les baigneurs semblent comme des formes infiniment petites parsemées ça et là. Les unes flottent calmement dans l’eau, les autres s’ébattent. Et il y a celles qui sont piquées côte à côte sur le sable. Une foule livrée à elle-même face à la nature et à ses imprévus, et au danger dans l’absolu. Atome dans l’immensité / Minute dans l’éternité. Un paradis précaire après le 11-Septembre C’est ce que le photographe, Richard Misrach, a voulu exprimer après qu’un sentiment de vulnérabilité physique et psychologique ait prévalu dans la conscience américaine, suite à la secousse du 11-Septembre. « À présent, a-t-il dit, je crois ferme que la beauté peut être le véhicule d’idées difficiles. » Né en 1949 à Los Angeles, il a été marqué par l’activisme politique qui avait régné au début des années 70 sur le campus de l’Université de Berkeley où il poursuivait ses études. Les photographes de l’Ouest américain, Ansel Adams et Edward Weston, ont été une inspiration pour lui. Durant les trois dernières décades, il a été avec sa caméra à la recherche des complexités des environnements. Dans ce contexte, sa série, intitulée Desert Cantos, témoigne de son grand amour pour les paysages de l’Ouest et de son engagement à les préserver. Ses œuvres révèlent aussi son désir d’être impliqué dans le débat sociopolitique et culturel. De cette série de la mer, il dit : « J’ai été impressionné par la fragilité et la gracieuseté des silhouettes devant moi tout en ayant à l’esprit la vision des individus et des couples en train de tomber des World Trade Towers, et par le film sur la guerre froide, On the Beach (où le seul survivant atomique sur une île du Pacifique voit l’arrivée du nuage nucléaire). Le paradis peut devenir un lieu précaire. Ainsi, la mer sublime encadre notre vulnérabilité et la nature même de la vie. » Avec lui, la mer est bien loin de celle de Charles Trenet, « Bergère d’azur/Infini/qui a bercé mon cœur pour la vie ». Elle est cette pensée pasqualienne, l’« immensité des espaces que j’ignore et qui m’ignorent ».
WASHINGTON, d’Irène MOSALLI

Sur les cimaises de la National Gallery of Art à Washington, la mer étend son immensité dans des photos de grandes dimensions (2m de haut x 3m de large), portant la signature d’un artiste américain de renom, Richard Misrach. Ces vues, une vingtaine, développant le thème « À la plage », le photographe les a prises de l’étage élevé de son hôtel...