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EN LIBRAIRIE - « Lahza », ou 141 photos qui racontent le quotidien des enfants Les camps palestiniens loin des clichés habituels

De l’herbe qui pousse au milieu du béton. Une piscine improvisée entre les quatre murs d’une maison en ruine. Une fillette prenant la pose sur les toits. Des vêtements jetés pêle-mêle dans une armoire. Les décombres de Nahr el-Bared devant une mer bleue, trop bleue. Une tête se faufilant dans l’entrebâillement d’une porte criblée de balles. Des étalages de légumes des marchands de quatre saisons… Des instants volés, des instantanés pris par des enfants entre 6 et 12 ans dans les camps de réfugiés palestiniens au Liban figurent dans « Lahza », un ouvrage qui vient de paraître aux éditons Amers. Justement intitulé Lahza, ce premier projet de l’ONG Zakira a été initié au début de l’année 2007. Cinq cents caméras jetables avaient été distribuées à autant d’enfants qui n’ont pas encore atteint l’âge de l’adolescence dans les différends camps de réfugiés palestiniens au Liban. Les participants au projet ont été sélectionnés selon leurs capacités innovatrices et leur talent. « Chaque enfant a reçu les enseignements de base de la photographie, explique Sarah Sehnaoui, éditrice du livre et membre de Zakira. Nous leur avons ensuite demandé de documenter leur environnement et de montrer au monde la vie quotidienne à l’intérieur des camps ». Au total, 13 000 photos ont été prises. « Les enfants avaient la liberté absolue de choisir le sujet qui leur plaisait. Il s’agit donc d’une expression spontanée à travers le regard des plus innocents », poursuit la jeune éditrice. L’ONG Zakira, dont l’objectif est de promouvoir tous les métiers de la photo et de les rendre accessibles à tous, cherche notamment à créer des ponts « entre les enfants palestiniens et les enfants libanais, entre le quotidien et le passé, entre les enfants et les artistes locaux, pour créer de l’art dans une même ville ». « L’objectif n’est pas d’en faire des photographes », poursuit Sehnaoui, qui précise que ce projet s’est fait en collaboration avec l’Union de la femme palestinienne. « Elle nous a ouvert des portes, facilité l’accès aux camps, aidé à choisir les enfants. » Sehnaoui évoque la fascination des enfants palestiniens, «comme si la photo et l’appareil photo étaient interdits à l’intérieur des camps ou indiscrets. D’ailleurs, ce qui est intéressant, c’est que, à cet âge-là, les enfants se faufilent partout, ils voient la vie différemment ». Une réussite certaine Leur quotidien s’imprime sur les clichés, un quotidien qui diffère d’un camp à l’autre, d’un environnement gris et grave à Beyrouth, dans les petites ruelles du camp de Chatila ou de Borj el-Barajneh, à une ambiance plus ensoleillée dans le camp de Rachidieh, à Tyr. Des détails qui constituent autant de sources d’inspiration, autant de sujets créatifs. À la base, quelques rudiments de photographie que les membres de Zakira ont transmis à ces enfants dans toutes sortes de conditions : « soit dans des locaux prêtés par l’Union générale des femmes palestiniennes et par le Croissant Rouge palestinien, soit dans des tentes, à même le sol, ou dans les étroites ruelles des camps ». L’essentiel est de leur apprendre à développer l’œil photographique à saisir la lumière, à capturer l’ombre, à voir le détail qui fait la différence... Pour le principal cofondateur de Zakira, le photoreporter Ramzi Haidar, qui a travaillé en Irak et dans les camps palestiniens, le projet est né d’un « désir de sauver ces enfants ». Une réussite certaine : l’exemple de Mohammad, un enfant palestinien qui a perdu ses deux jambes à cause d’une bombe à sous-munitions « et qui refusait de sortir de la maison ». Progressivement, les clichés se sont succédé et Mohammad souriait. Actuellement, une ONG allemande s’est chargée de sa réhabilitation médicale: il aura bientôt des prothèses. D’ailleurs, Zakira essaie de voir plus loin, en cherchant à fonder une école de photographie, une nouvelle plate-forme artistique qui permettra de former certains de ces enfants palestiniens de manière à ce qu’ils transmettent au monde leur propre image authentique des camps. « Ce programme a une double valeur : il permet aux enfants de s’exprimer et aux artistes d’aller au-delà de leurs limites dans le domaine de leur expérience. Il s’agit d’un enrichissement mutuel ». Maya GHANDOUR HERT
De l’herbe qui pousse au milieu du béton. Une piscine improvisée entre les quatre murs d’une maison en ruine. Une fillette prenant la pose sur les toits. Des vêtements jetés pêle-mêle dans une armoire. Les décombres de Nahr el-Bared devant une mer bleue, trop bleue. Une tête se faufilant dans l’entrebâillement d’une porte criblée de balles. Des étalages de légumes...