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Actualités - CHRONOLOGIE

Une conférence USJ/Université du Sacré-Cœur (Milan) avec la participation de l’ambassade d’Italie «?Gouvernance et développement local?», diagnostic et thérapies

Le thème «?Gouvernance et développement local?» a été remarquablement abordé lundi, à l’Université Saint-Joseph au cours d’une journée de réflexion organisée conjointement par le département de sociologie et d’anthropologie de l’USJ et l’Université du Sacré-Cœur de Milan, avec la participation active du service de coopération de l’ambassade d’Italie. Une centaine d’acteurs du développement, représentant des bailleurs de fonds ou des ONG, ont enrichi les débats qui ont marqué la journée. La réflexion est partie d’un constat d’échec, résumé ainsi par Mme Annie Tabet, directrice du département sociologie et anthropologie de l’USJ?: «?À l’heure où l’Université du Sacré-Cœur de Milan s’interrogeait sur la pertinence de l’application du concept de gouvernance aux contextes moyen-orientaux et libanais, l’Université Saint-Joseph poursuivait son opération du 7e jour lancée à la suite de la guerre de juillet 2006 pour secourir les populations sinistrées du Liban et notamment du Sud?», a dit Mme Tabet. «?Cette opération, a-t-elle ajouté, s’est peu à peu transformée en vaste chantier d’aide au développement touchant à différents secteurs de la réalité sociale dans l’ensemble du pays. Elle mobilise aujourd’hui une grande partie des formations, des ressources et des compétences de l’université. Une équipe du département de sociologie et d’anthropologie s’est intégrée à l’opération du 7e jour, grâce à une recherche menée sur le “retour des déplacés forcés” dans trois localités du Chouf (FIUC). «?Cette recherche lui a permis de faire un constat d’échec des différentes politiques de développement local menées par l’État libanais, les ONG nationales et internationales depuis 1992 et qui avaient nécessité beaucoup d’investissements matériels et humains. L’intervention des instances nationales et internationales dans les sociétés locales a bien pu réhabiliter l’infrastructure, mais elle a été incapable d’atteindre le but escompté c’est-à-dire de fixer les populations de retour, dans leur village d’origine. «?Ce même constat d’échec est actuellement fait par le service de coopération de l’ambassade d’Italie, engagé dans plusieurs programmes sur le développement local dont le ROSS Emergency Program. Les responsables de ce service relèvent, en effet, le manque de coordination entre les différents bailleurs de fonds internationaux au niveau des projets mis en œuvre sur le terrain. Un même projet bénéficie très souvent de plusieurs sources de financement sans que les donneurs ne soient au courant. Ces mêmes responsables constatent par ailleurs, qu’il existe un malentendu entre les bailleurs de fonds et les bénéficiaires, concernant la définition du développement local. Les premiers entendent appliquer un plan d’action précis, bien qu’ils soient souvent pressés par un échéancier financier. Les seconds, limités par la compétence de leurs ressources humaines, ne sont intéressés que par la satisfaction de leurs besoins les plus immédiats. Ces interprétations divergentes entraînent des pratiques contradictoires, voire opposées, qui affectent la pertinence du choix des projets et menacent leur durabilité. «?La concordance des préoccupations des organisateurs de cette journée mène à dire qu’il existe un besoin pressant de lancer une réflexion et un débat autour de la question de la gouvernance et du développement local.?» La journée de réflexion s’est ouverte sur quatre exposés de MM. Vittorio Emanuele Parsi et Alessandro Quarenghi, de l’Université du Sacré-Cœur, et Loubna Haïdar et Samira Baghdadi, de l’USJ. Les conférenciers ont tenté de définir, chacun à sa manière, ce que des concepts trop utilisés mais parfois mal compris, comme ceux de gouvernance, de développement local ou de développement durable, veulent bien signifier – ou ne pas signifier - dans notre contexte régional et national. Pour Parsi et Quarenghi, de toute évidence, le contexte politique général et les clivages locaux ne sont pas étrangers au constat d’échec. Ateliers de travail La session de l’après-midi a été consacrée à quatre ateliers de travail dirigés respectivement par des représentants de l’Union européenne, du Programme de développement des Nations unies (PNUD), du Service de coopération de l’ambassade d’Italie et de l’Association libanaise de sociologues. Cette session s’est attardée beaucoup plus sur le concept du développement local. Elle a permis également d’expliciter le rôle des réseaux d’acteurs et des institutions qui y sont impliqués. On s’en doute, une bonne partie des débats a porté sur l’identification des causes des blocages. Clientélisme politique, manque de communication, défaut de «?vision?», chevauchement des projets, manque de volonté politique… les causes sont nombreuses et souvent se conjuguent pour rendre stériles les essais de développement. Pour la représentante de la FAO, Rouba Arja, la population locale «?n’arrive toujours pas à savoir ce qu’elle veut?». Mais la responsabilité de l’échec n’est pas toujours du côté de la population qu’on approche. Bien entendu, il faut tenir compte de la «?course aux projets?» qui n’est pas toujours gagnée par le meilleur, mais par le plus habile à répondre aux «?attentes?» du bailleurs de fonds. Toutefois, le fait que le développement local vient toujours «?d’en haut?» joue également comme facteur d’échec. D’où la nécessité pour le bailleur de fonds de revoir sa stratégie. D’où aussi la nécessité de mettre au point une approche permettant l’identification de «?l’acteur local?» adéquat, qui n’est pas toujours la municipalité. C’est ce que souligne le directeur de la coopération de l’ambassade d’Italie, Fabio Melloni, qui évoque un problème de «?relation?». L’État assume aussi une partie des responsabilités. L’absence d’une vision cohérente du développement, et d’un développement équilibré de toutes les régions, entraîne le naufrage de beaucoup de projets proposés, malgré toutes les bonnes volontés du monde. Dans un pays déchiré et atomisé par tant d’antagonismes et d’individualismes, certains se sont même demandé si les termes «?développement local?» gardent encore un sens. Bref, l’impact des projets n’est pas à la hauteur des fonds engagés, ou alors ils finissent par servir les intérêts de certains individus ou groupes, au lieu de servir l’intérêt général et déclencher un processus de développement durable. Pour Loubna Haïdar, l’une des conférencière, le «?développement est un processus, non?un concept?». Il faut donc y réfléchir sur le long terme, alors que tous les projets de développement portent sur un temps court de deux ou trois ans. Le directeur du service de coopération de l’ambassade d’Italie s’est demandé si une meilleure coordination entre les bailleurs de fonds, voire la création d’un fonds unique géré multilatéralement, face à un État qui saurait mieux poser un cadre de développement local et national cohérent, ne donnerait pas de meilleurs résultats que ceux qui sont enregistrés en ce moment. Une journée riche en enseignements. * * * L’Italie et l’USJ renforcent leur coopération La journée de réflexion sur la gouvernance a été introduite par quelques mots du recteur de l’USJ, le Pr René Chamussy s.j., et de l’ambassadeur d’Italie Gabriele Checchia. «?L’Université Saint-Joseph se réjouit une fois encore de voir l’une de ses institutions travailler avec l’Italie, confirmant ainsi un penchant qui semble devoir se renforcer jour après jour?», a souligné le recteur de l’USJ. «?Ce fut, il y a quelque temps, nos ingénieurs au service de villages déshérités qui ont pu s’appuyer sur l’aide de l’Italie, devait préciser le père Chamussy. C’était il y a quelques jours nos orthopédagogues qui ont bénéficié du même soutien (…)?Ce que l’on découvre en fait à travers tant d’initiatives, c’est la volonté de l’Italie de ne pas gaspiller ses bienfaits, mais de tout faire pour que la contribution apportée permette tout à la fois à une société donnée de se développer et aux décideurs de savoir (…) quels choix faire pour que le meilleur se produise.?» Ces propos ont trouvé un parfait écho dans l’allocution inaugurale, prononcée par l’ambassadeur d’Italie, qui a souligné la nécessité de «?protéger et nourrir cette coopération scientifique entre les deux universités?» et qui a remercié l’USJ pour sa contribution à une meilleure compréhension du rôle culturel et politique joué par l’Italie au Liban. Fady NOUN
Le thème «?Gouvernance et développement local?» a été remarquablement abordé lundi, à l’Université Saint-Joseph au cours d’une journée de réflexion organisée conjointement par le département de sociologie et d’anthropologie de l’USJ et l’Université du Sacré-Cœur de Milan, avec la participation active du service de coopération de l’ambassade d’Italie. Une...