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Actualités - OPINION

En Cisjordanie, le tourisme sert le patrimoine, mais aussi la cause nationale

«Je veux vous faire connaître les réalités de la vie quotidienne des Palestiniens », déclare le guide palestinien aux touristes visitant Hébron. En Cisjordanie occupée, le tourisme sert aussi la cause nationale. Or, ces réalités sont sombres dans ce haut lieu de tension entre les Palestiniens et l’armée israélienne, qui protège quelques centaines de colons juifs installés au cœur de la ville. « Quand vous retournerez chez vous, racontez ce que vous avez vu », poursuit le guide, Ziad Abou Hassan, conduisant le petit groupe de touristes européens et américains. Dans les venelles de la vieille ville d’Hébron (Sud), les touristes peuvent voir des fils de fer barbelés qui coupent les passages vers les habitations du quartier juif, alors que le sol est jonché de bouteilles, briques et autres débris jetés, selon les résidents, par les colons dont les maisons surplombent les ruelles. Plus loin, des soldats israéliens d’à peine 18 ans armés de fusils automatiques bloquent une rue pendant un quart d’heure, avant de laisser le passage aux Palestiniens et aux rares touristes. « J’avais une idée de la situation (des Palestiniens), mais pas de ce que j’ai pu constater de mes propres yeux. C’est effarant », confie Bernard Basilio, venu de Californie en compagnie de sa mère et de sa tante. Les violences à Hébron ont culminé en février 1994 avec le massacre de 29 fidèles musulmans par un colon au Caveau des patriarches (Mosquée d’Ibrahim), lieu saint musulman et juif. Aux termes d’un accord avec l’Autorité palestinienne, Israël avait évacué 80 % d’Hébron en 1997, occupant une enclave au milieu de 170 000 Palestiniens. À Naplouse (Nord), il n’y a pas en revanche de présence israélienne, bien que l’armée ait effectué ces dernières années de nombreuses incursions dans cette ville autonome. Mais les touristes ne se pressent guère pour visiter la ville, théâtre d’affrontements sanglants au début de la seconde intifada. Sur le site de l’antique cité de Sichem, dans les faubourgs de Naplouse, l’archéologue palestinien Adel Yahya guide un petit groupe de visiteurs européens. Aucun gardien n’est posté à l’entrée du site jonché de bouteilles de plastique et protégé par une simple chaîne. « Il y a là des vestiges d’un temple (cananéen) vieux de 4 000 ans, remontant à l’époque des pyramides (...). Voilà ce que le conflit fait à notre patrimoine qui est celui de toute l’humanité », s’indigne l’archéologue qui préside une association palestinienne de conservation du patrimoine. Pour lui, Israël est le premier responsable de cet abandon, car « sans occupation israélienne, il n’y aurait pas eu l’intifada » et le cortège de violences qui a découragé les visiteurs. La situation est meilleure à Bethléem, ville de la naissance du Christ selon les Évangiles, où se rendent la plupart des touristes et pèlerins visitant la Cisjordanie. Toutefois, pour accéder à la ville située à 10 kilomètres au sud de Jérusalem, il faut franchir un imposant barrage militaire près de l’impressionnante barrière de six mètres de haut qui coupe Jérusalem-Est annexée de la Cisjordanie, et « transforme Bethléem en une véritable prison », selon son maire Victor Batarseh. Cette barrière, qualifiée de « mur de l’Apartheid » par les Palestiniens et présentée par Israël comme une « clôture antiterroriste », est devenue un site touristique. Aux étrangers, des agences spécialisées dans le tourisme « alternatif » offrent des visites du « mur », y compris, pour les plus motivés, d’une canalisation d’égout qu’empruntent des Palestiniens dont le village est coupé en deux. Au cours des trois premiers mois de 2008, le tourisme en Cisjordanie a enregistré 184 000 entrées, soit le double par rapport à la même période de 2007, selon des données officielles. Dans le même temps, 647 000 touristes sont venus en Israël, soit 44 % de plus que l’année précédente. Beth O’CONNELL (AFP)
«Je veux vous faire connaître les réalités de la vie quotidienne des Palestiniens », déclare le guide palestinien aux touristes visitant Hébron. En Cisjordanie occupée, le tourisme sert aussi la cause nationale.
Or, ces réalités sont sombres dans ce haut lieu de tension entre les Palestiniens et l’armée israélienne, qui protège quelques centaines de colons juifs...