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Actualités - CHRONOLOGIE

L’institution de Francfort exclut toute modification de son mandat Pour ses 10 ans, la BCE est confrontée au dilemme de l’inflation

La Banque centrale européenne fête ses 10 ans aujourd’hui avec en toile de fond une inflation sans précédent depuis sa création et un dilemme quant aux moyens d’y faire face. L’envolée des prix du pétrole et de l’alimentation a brutalement mis fin à une décennie de prix sages en Europe et dans le monde, plaçant les Banques centrales dans une situation délicate. Jusque-là, la mondialisation avait poussé à la désinflation, permettant au taux d’inflation de s’établir à 4,5 % en moyenne dans le monde ces 10 dernières années, à comparer à des taux à deux chiffres dans la décennie précédente. L’évolution semblable de l’évolution et de la croissance permettait aux banques centrales de freiner les deux en relevant leurs taux d’intérêt. L’augmentation de la demande intérieure des pays émergents, conséquence de leur expansion économique, a changé la donne et aujourd’hui les risques relatifs à la croissance et à l’inflation sont de sens opposés, comme le reconnaissait le gouverneur de la Banque de France, Christian Noyer, lors d’un colloque à Paris en mars. « La mondialisation a cessé, probablement pour une longue période, d’être spontanément désinflationniste », avait-il dit en parlant d’un « défi commun pour toutes les Banques centrales ». Leur dilemme est clair : faire avec une inflation durablement élevée, ou la combattre au risque d’étrangler la croissance, explique Peter Morici, professeur à l’Université du Maryland. « La difficulté pour les États-Unis et l’Europe, c’est qu’une bonne partie de l’inflation échappe à leur contrôle », dit-il. « Et si on essaye de faire descendre l’inflation sous 2 %, cela risque de tuer la croissance. » La BCE, établie le 1er juin 1998, a un objectif de stabilité des prix plus draconien que la plupart des autres Banques centrales puisqu’elle vise une inflation « inférieure à, mais proche de 2 % ». L’objectif n’a pas été respecté au cours des huit dernières années et a peu de chance de l’être en 2008 et 2009 puisque le taux d’inflation a culminé à plus de 3,5 % cette année. Un moyen terme qui arrange bien la BCE Jusqu’ici, la Banque centrale a réagi en maintenant son taux directeur inchangé à 4 %, son niveau le plus élevé depuis six ans, tout en surveillant les risques de ralentissement de l’activité. Certains économistes pensent que l’institution de Francfort devrait s’adapter à la nouvelle donne en soustrayant l’énergie et l’alimentation de son calcul de l’inflation – comme le fait la Réserve fédérale américaine – ou en relevant son seuil de tolérance. Mais la BCE exclut toute modification de son mandat, comme l’a redit son président Jean-Claude Trichet le 8 mai. La question de l’objectif d’inflation s’était posée au moment de la création de la BCE et encore lors de son réexamen stratégique de 2003, a rappelé Otmar Issing, son ancien économiste en chef. Or, d’une part, il n’y a pas de consensus en Europe sur la mesure d’une inflation « sous-jacente » à l’américaine, d’autre part, les 230 millions d’Européens ne comprendraient pas que la Banque centrale ne tienne pas compte des prix qui les concernent au quotidien, au supermarché et dans les stations-service. « Donner à penser que la Banque centrale ignore le coût de la vie tel qu’il est expérimenté par chacun de nous serait dangereux », fait valoir Issing. En tout état de cause, les économistes conviennent qu’il ne sert à rien de modifier l’approche de la BCE, ou de toute autre Banque centrale, en pleine tempête sur les marchés financiers. La BCE, jugent-ils, a raison de continuer d’utiliser son orientation à « moyen terme » comme excuse pour ignorer la poussée actuelle de l’inflation – et prier qu’elle se révèle passagère. « Cette définition du moyen terme est tout à fait arbitraire », notait l’économiste Angel Ubide, de Tudor Investment, dans un blog du journal allemand Handelsblatt. « La BCE peut décider que l’objectif d’inflation sera atteint dans trois ans plutôt que deux, et cela est parfaitement compatible avec son mandat. » Il reste que si l’inflation reste durablement élevée – la demande des nouvelles puissances émergentes ne donne aucun signe d’affaiblissement –, la question de la stratégie et des outils des banques centrales devra bel et bien être posée. Quand le calme sera revenu sur les marchés.
La Banque centrale européenne fête ses 10 ans aujourd’hui avec en toile de fond une inflation sans précédent depuis sa création et un dilemme quant aux moyens d’y faire face.
L’envolée des prix du pétrole et de l’alimentation a brutalement mis fin à une décennie de prix sages en Europe et dans le monde, plaçant les Banques centrales dans une situation...