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Actualités - OPINION

LE POINT Amis-ennemis Christian MERVILLE

Imprévisible Irak ! Dans la localité de Aouja, un groupe d’irréductibles saddamistes célébrait hier le 71e anniversaire de leur héros, pendu à la fin de l’année 2006 pour l’exécution de 148 chiites qui auraient comploté contre lui près d’un quart de siècle auparavant. Il représentait l’unité du pays, ont dit les uns. Nous voulons exprimer notre rejet de l’occupation, ont prétexté d’autres. Simple nostalgie d’une époque que, le temps aidant, on se prend à parer de vertus que l’on était loin de lui reconnaître alors ? Il y a cela sans doute, mais comme il est difficile d’éviter le parallèle avec une actualité propre à désespérer les plus optimistes. C’est ainsi que le tyran sanguinaire d’hier devient un preux chevalier dont on évoque le souvenir à coups de poèmes et de chants. Paradoxal Irak ! De Bassora, les hostilités se sont transposées dans la capitale même, à portée de roquettes de la Zone verte qui abrite les chancelleries étrangères et les services officiels. Elles mettent aux prises miliciens de l’Armée du mahdi et troupes gouvernementales, aidées par les Américains de la coalition internationale. Mais depuis quarante-huit heures, les hélicoptères AH-64 Apache sont cloués au sol, empêchés d’effectuer des missions en raison de violentes tempêtes de sable. Qu’importe, cela fait partie des aléas de la guerre, surtout dans cette partie du monde, éminemment compliquée où il convient de ne pas débarquer avec des idées simples. Aux dernières nouvelles, Moqtada Sadr a fait savoir qu’il rejetait les quatre propositions de Nouri Kamal al-Maliki pour mettre fin aux attaques dont ses hommes sont l’objet : remise à l’État de l’armement lourd, interdiction de toute immixtion dans la bonne marche du travail officiel, liberté d’action pour les forces de sécurité, livraison des personnes recherchées. Non, a déclaré le chef radical, le Premier ministre n’a pas le droit de faire tout ce qu’il veut ; de plus, nous sommes les seuls visés par ces conditions et l’on cherche à nous éliminer avant les élections régionales d’octobre prochain. Bien vu. Ainsi donc, le contact semble rompu entre les deux parties et les sunnites peuvent dormir tranquilles, maintenant que les chiites s’engagent, dans la pratique, à continuer à s’entre-tuer. Pas du tout, a souligné Salah el-Obeidi, représentant du courtant sadriste, car il existe un espoir : celui de voir se concrétiser la médiation entreprise par Jalal Talabani, chef de l’État, kurde, représentant d’une région qui réclame sa part du gâteau pétrolier et l’autonomie pour sa province nord. Mais qui n’en reste pas moins éminemment fiable et garant de tout accord à venir, alors que les précédentes tentatives de règlement n’avaient pas été suivies d’effet. Étonnant Irak ! Hier encore considérés comme les grands ennemis des chiites, inconsolables depuis la disparition de l’ancien despote, amers parce que convaincus d’avoir été dépossédés de ce qui fut leur, plus de trente ans durant, les sunnites donnent l’impression d’être revenus à de meilleurs sentiments. Ils sont prêts à réintégrer la formation Maliki, après une bouderie de neuf mois, estimant avoir obtenu satisfaction sur un certain nombre de points, ainsi que l’a relevé en fin de semaine Adnan el-Doulimi, chef du Tawafok, principale formation de la communauté, citant entre autres l’amnistie, récemment décrétée, dont bénéficient les hommes de l’ancien régime, la tentative en cours pour mettre au pas des trublions, enfin la chasse aux hors-la-loi. Il ne reste plus, pour que tout rentre dans l’ordre, qu’à régler quelques points litigieux, dont la répartition des portefeuilles ministériels considérés comme « régaliens » : Culture, Plan, Enseignement supérieur, Condition féminine, secrétariat d’État aux Affaires étrangères. L’ennui à ce propos est que, si l’on en croit le dicton éternel, « le diable – ou, pour peu que l’on veuille se référer à Flaubert, le Bon Dieu – est dans les détails ». Inquiétant Irak ! David Petraeus, commandant en chef depuis le « surge » décrété par George W. Bush des troupes US engagées dans le pays, s’apprête à quitter le poste pour prendre la tête du Central Command (le fameux Centcom dont, curieusement, le quartier général se trouve à Tampa, en Floride), qui couvre les opérations au Moyen-Orient, en Afrique et en Asie. Robert Gates, secrétaire à la Défense, estime que le général à quatre étoiles a mené à bien la mission qui lui avait été confiée, il y a près d’un an, sur le double plan militaire et politique. Petit rappel qui donne à réfléchir : son prédécesseur, l’amiral William Fallon, avait été poussé vers la sortie après avoir suscité l’ire de la Maison-Blanche en privilégiant l’option diplomatique dans le bras de fer engagé avec la République islamique sur le dossier nucléaire. Incontestablement « the right man in the right place ». Mais le choix du moment et des objectifs reste discutable.
Imprévisible Irak ! Dans la localité de Aouja, un groupe d’irréductibles saddamistes célébrait hier le 71e anniversaire de leur héros, pendu à la fin de l’année 2006 pour l’exécution de 148 chiites qui auraient comploté contre lui près d’un quart de siècle auparavant. Il représentait l’unité du pays, ont dit les uns. Nous voulons exprimer notre rejet de...