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Actualités - CHRONOLOGIE

FESTIVAL BIPOD - « La septième vague » de Marie Brolin-Tani au Monnot (USJ) Le vent de la liberté entre marasmes, départs et partances…

Une performance exceptionnelle sous les feux de la rampe du Monnot (USJ), dans sa force émotionnelle et sa sobre beauté d’expression corporelle. Neuf danseurs de la région (quatre garçons et cinq filles entre libanais, palestiniens, jordaniens et syriens) ainsi que des Suédois et des Danois, excellemment rodés, traduisent, par une gestuelle précise, sensuelle et élégante, toutes les attentes pour un grand départ... Sous le titre La septième vague, titre chargé de poésie et d’un certain mystère, la chorégraphe Marie Brolin-Tani a signé un spectacle intense et vibrant où la danse, d’une suprême éloquence, restitue avec éclat, et en toute simplicité, au corps toute son innocence native. Première d’une œuvre d’une belle facture de danse contemporaine où, en collaboration avec le théâtre de danse Maquamat et la Coopération danoise pour la culture et le développement, la talentueuse chorégraphe a offert, aux nombreux spectateurs venus l’applaudir, un moment hors du temps, métissé d’une certaine réflexion sur le sens de la vie. Une vie où tout est éphémère et mobile. Une vie toujours en attente fébrile ou morose du vent de la liberté et de la libération qui tarde parfois à souffler… Avec La septième vague, spectacle qui s’inscrit dans le cadre du festival Bipod, la danse est une invitation à un rêve touché par la grâce de la mer. Un rêve non vaporeux ou diaphane, mais noueux et marqué par l’expérience et le vécu ardus de l’existence. Le pouvoir de l’imagination Qu’un paquebot attende le vent qui se lève et qu’un passager scrute comme un signe de délivrance le mouvement du vent pour voir la chance lui sourire et ses rêves se concrétiser, ainsi s’enclenche la ronde effrénée pour des horizons nouveaux. Ronde ouverte en cercles infinis comme nageurs en compétition pour ces personnages anonymes et silencieux en quête de bonheur et d’épanouissement… Sur une scène nue avec les seuls spots qui sculptent les volumes et les corps, l’imagination prend le pouvoir face à ces neufs danseurs debout, pieds nus et sans artifice vestimentaire, bloc inquiétant comme la proue d’un navire prêt à fendre les vagues… Cérémonial grave, lent, parfois héraldique, parfois familier, des fois aussi ludique et délibérément déconstruit, saisi comme une sculpture qui tourne sur un pivot ou un flash instantané en arrêt d’images. Images des corps surpris dans un brio de mouvements où, entre contorsion, gymnastique, acrobatie, pirouettes, entrechats, pointe à peine esquissée, glissade, main tendue, hanche désarticulée, chute de rein provocante, épaule haussée, genoux tendu, sauts et grands écarts, se crée un langage particulier, sans aucun corset guindé ou académique que l’œil capte et décode. Tendresse, violence, onctuosité ou brusquerie des mouvements pour décrire l’angoisse, les limites de la liberté, le besoin de s’évader, la soif d’aimer, l’incroyable instinct de trahir ou de haïr, les déroutes de l’incommunicabilité, les frustrations inavouées, la domination ou la soumission, les couples qui se forment et ceux qui se disloquent… Une horlogerie sans faille Ballet insaisissable de la vie devant le cri des mouettes et des goélands quand les sirènes des bateaux, entre mugissement des profondeurs et clapotis des vagues, font chavirer l’ordre des jours entre départs incertains et partances en mal de vivre pour une vie meilleure… Dans un mouvement d’ensemble d’une horlogerie sans faille, d’une impeccable précision et sans aucun faux pas (non, on ne joue pas sur les figures de style), la narration se déroule, dans une palpitante émotion et une attention prise en otage, empruntant avec un art souverain, une grâce désinvolte et sans jamais s’appesantir, à tous les courants de la danse contemporaine. On ne louera jamais assez la superbe partition du compositeur danois Henrik Munch qui donne épaisseur, force et totale adhésion à ce spectacle d’une grande richesse expressive et visuelle. Et permet, bien entendu, aux danseurs de s’exprimer avec tant de charme, de brio et de singularité séduisante. Musique baignée d’une lumineuse « orientalité » certes, mais ne cédant pas non plus à la tentation des accents d’une stridente modernité. Une musique parfois aux confins de la dodécaphonie ou de l’inspiration de Schoenberg, avec des embellies lyriques du côté de la mer et des échos des gouttes d’eau qui se répercutent au fond des grottes caverneuses et humides… Musique d’une coloration intense et variée, oscillant subtilement entre sensualité levantine (ces violons aux plaintes grasses et lascives), rythme et battements pour une fête à l’ombre des palmiers, avec un chant berbère surgi des grandes solitudes grillées par le soleil… Parce que proche des préoccupations des spectateurs et familière de l’angoisse de vivre et de la volonté d’avoir toujours une nouvelle meilleure vie, La septième vague de Marie Brolin-Tani est un spectacle absolument réussi. Réussi par la multiplicité de ses inventions expressives et corporelles ainsi que sa puissante charge d’émotion. On souhaite bon vent et bon port à cette vague qui ira bientôt des frontières de l’Orient au royaume d’Hamlet… Edgar DAVIDIAN
Une performance exceptionnelle sous les feux de la rampe du Monnot (USJ), dans sa force émotionnelle et sa sobre beauté d’expression corporelle. Neuf danseurs de la région (quatre garçons et cinq filles entre libanais, palestiniens, jordaniens et syriens) ainsi que des Suédois et des Danois, excellemment rodés, traduisent, par une gestuelle précise, sensuelle et élégante,...