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Actualités - OPINION

Lettre au père Marwan Tabet, secrétaire général des Écoles catholiques Horaires scolaires et rythme naturel de l’enfant et de la famille

Cher Père, De retour au Liban depuis cinq ans maintenant, je tiens à partager avec vous ce qui nous a le plus frappés par rapport à notre vie en France. Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas les attentats répétés, ou le chaos de la circulation, mais bel et bien le manque d’harmonie qui existe entre le rythme scolaire et le rythme naturel de l’enfant et de la famille. Force est de constater que les enfants sont exclus du rythme de la famille. Les enfants, de manière générale, à l’exception de certains établissements, commencent leurs cours entre 7h30 et 8h00, et les terminent vers 14h00. Cela suppose un passage des autocars scolaires entre 6h30 et 7h00 le matin puis entre 14h45 et 15h15 l’après-midi. L’enfant se réveille donc vers 6h00, et pour être en forme à 6h00, il se couche à 19h00. Ce rythme est, à mon humble avis, très nuisible à une vie familiale équilibrée de l’enfant, et ce pour plusieurs raisons?: 1.- L’enfant est réveillé le matin en général par un seul parent (et ne voit donc pas l’autre), en général le parent qui soit ne travaille pas ou bien celui qui se «?dévoue?» pour cette tâche bien matinale. Pire, dans certains foyers favorisés, cette tâche ingrate est souvent déléguée à un tiers (employé de maison). 2.- L’enfant prend son petit-déjeuner seul ou avec le parent qui s’est réveillé, cela quand son réveil matinal lui permet de le prendre. 3.- Il rentre vers 15h00 souvent affamé (qu’il ait déjeuné à l’école ou non, car le temps alloué au déjeuner à l’école est souvent trop court et n’excède pas 45 minutes) et très fatigué de son réveil matinal. À cette heure-là, tout le monde dans la maison (s’il y a quelqu’un) a déjà déjeuné, et souvent les parents qui travaillent ne sont pas encore rentrés à cette heure située assez tôt dans l’après-midi. Il partage donc son retour au mieux avec une personne de la famille. 4.- Pour se coucher vers 19h00, le dîner a lieu vers 18h00 (juste trois heures après son déjeuner, voir le paragraphe sur l’alimentation plus bas). À 18h00, rares sont les parents qui dînent avec leurs enfants, soit parce que certains ne sont pas encore rentrés de leur travail, soit parce que tout simplement rares sont les gens au Liban qui dînent vers 18h00. 5.- Du lundi au vendredi, l’enfant suit ce rythme, et on a donc passé 5 jours sur 7 sans un seul repas familial?: petit-déjeuner trop tôt et en général avec un seul parent, repas de midi trop tard, et repas du soir trop tôt et sans parents. À titre personnel, il est arrivé que des semaines entières passent et que ma fille ne voit pas son père qui rentre tard du travail. 6.- Les parents, qui sont obligés indirectement de suivre le même rythme que les enfants, se fatiguent considérablement, d’autant plus que ce rythme correspond rarement à leur propre rythme de travail, sauf exception (certains fonctionnaires notamment). La fatigue des parents en manque de sommeil constant se reflète sur leur capacité à faire preuve de patience et de persévérance dans l’éducation de leurs enfants. Ainsi, leur aptitude à faire face aux exigences quotidiennes d’une bonne éducation est fortement entamée par la fatigue physique et le manque de repos. Les raisons mentionnées ci-dessus sont les principales raisons qui motivent notre demande de changement des horaires des cours des enfants en décalant d’une heure le début des classes. À celles-ci s’ajoutent d’autres raisons presque tout aussi valables?: Les horaires actuels provoquent chez l’enfant une mauvaise alimentation?: 1. Rares sont les enfants qui prennent un petit-déjeuner avant leur départ en autocar. 2. Les petits-déjeuners «?à emporter?» emballés à la maison sont rarement équilibrés (un sandwich et des biscuits). 3. Les en-cas achetés sur place dans les kiosques des écoles le sont encore moins (manakish, brioches, sucreries et friandises). 4. Le repas du midi est bâclé à cause d’un manque de temps, et nombre d’écoles ne servent pas de repas chauds. Ces repas semblent par ailleurs insuffisants car nombre d’enfants rentrent de l’école affamés. Le rythme scolaire ne suit pas le rythme naturel de l’enfant?: 1. Première preuve de ce postulat?: en vacances, l’enfant se lève et se couche rarement à l’heure de l’école. Il se lève en moyenne une heure plus tard et se couche une heure plus tard. 2. Durant les week-ends, pour profiter de leurs enfants, notamment à l’heure des repas, les parents couchent leurs enfants plus tard et les réveillent plus tard. Le rythme de l’école est donc cassé. 3. Si vous visitez les sites de la «?American Academy of Pediatrics?» www.aap.org/healthtopics/Sleep.cfm et du Conseil français des médecins pédiatres, tout réveil avant 7h00 du matin pour un enfant est considéré comme un réveil «?au milieu de la nuit?» qui prive l’enfant du sommeil dit paradoxal, indispensable à son développement intellectuel. En conclusion, il convient de dire que le rythme scolaire actuel ne suit pas le rythme naturel de l’enfant, qu’il s’avère être un obstacle à une vie familiale équilibrée qui réunit toute la famille autour de moments-clefs que sont le réveil et les repas. Il inflige aux parents, dont le rythme est rarement en accord avec celui de l’école, un stress supplémentaire qui les rend moins patients à l’égard de leurs enfants. Enfin, le rythme des repas, leur fréquence et leur contenu est la directe conséquence du rythme de l’école. Si l’enfant se levait ne serait-ce qu’une heure plus tard, il pourrait prendre un bon petit-déjeuner en famille. Il n’a donc plus besoin d’en-cas le matin. L’école peut alors prendre le temps de servir un bon déjeuner, l’enfant peut goûter à son retour (16h00) et dîner en famille à une heure normale (19h00/19h30). Nous nous tenons à votre disposition pour tout éclaircissement de notre position ou même pour mener une étude plus approfondie de la question auprès d’un échantillon plus large de parents. En attendant, nous vous prions d’agréer, cher Père, l’expression de notre considération. Robert et Hala FADEL Parents de Marie-Diane, 6 ans, scolarisée au Collège Notre-Dame de Jamhour et de deux autres enfants en voie de scolarisation dans ce même établissement
Cher Père,
De retour au Liban depuis cinq ans maintenant, je tiens à partager avec vous ce qui nous a le plus frappés par rapport à notre vie en France. Contrairement aux idées reçues, ce ne sont pas les attentats répétés, ou le chaos de la circulation, mais bel et bien le manque d’harmonie qui existe entre le rythme scolaire et le rythme naturel de l’enfant et de la...