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FESTIVAL Camille et Cali électrisent le Printemps de Bourges

Chuchotements, cris d’animaux, rythmiques R’n’B, transe échevelée, bruitages de cinéma et huit corps comme seuls instruments : Camille a enchanté le public du Printemps de Bourges, où elle a étrenné son nouveau spectacle. La chanteuse de 30 ans, dont l’originalité et la virtuosité vocale forcent l’admiration, a débuté sa tournée de façon magistrale dix jours après la sortie de son troisième album, Music Hole, essentiellement écrit en anglais. D’abord seule en scène, elle se présente encapuchonnée d’orange par-dessus un justaucorps noir, les deux couleurs qui fondent l’identité visuelle de ce nouveau spectacle. Elle marmonne Ta douleur, le tube de son précédent album, Le Fil, avant d’être rejointe par sept musiciens qui se placent en demi-cercle derrière elle : Sly et Ezra, tous deux « human beat box » (ils reproduisent des rythmes avec la bouche), deux choristes et trois artistes de percussions corporelles. L’un d’eux, MaJiKer, est également pianiste et son instrument est le seul présent sur scène. Tous sont vêtus de noir avec une touche d’orange. Ils entament la chanson Canards sauvages, qui donne le ton. Les sons de leur bouche et de leurs mains frappées contre leur poitrine forment un rythme de samba, leurs voix s’entremêlent dans d’impressionnantes acrobaties vocales et deux éponges agitées dans un bac d’eau figurent le bruit de palmipèdes qui s’ébrouent dans un lac. Comme l’album sur lequel il s’appuie, ce spectacle est basé sur les pulsations organiques, le mouvement, les polyphonies et les percussions corporelles. D’abord sage, le concert est construit comme une grande montée qui finit par tout emporter sur son passage, à grands coups de claquements de mains et de pieds, de feulements, de drôles de sons de gorge et de bruitages de cinéma, comme quand une simple corde orange agitée par les choristes imite le bruit du vent. Au milieu de ce maelstr?öm sonore, Camille fait rayonner sa folie douce et son rapport au corps décomplexé et quasi enfantin. Lorsqu’elle danse, on croirait que ses pieds nus foulent une terre ocre brûlée par le soleil et non la scène d’un théâtre à l’italienne tendu de velours rouge. Ses transes font penser à l’Afrique, au Brésil ou à un gospel profane. Au milieu de ses nouveaux morceaux en anglais, dont le remarquable Gospel With No Lord, Camille glisse quelques chansons du Fil, parmi lesquelles la fameuse Janine. Les deux « human beat box », eux, se lancent dans un ping-pong sonore qui laisse pantois. Le spectacle s’achève au bout d’une heure et demie par Ta douleur et Money Note, tandis que des billets d’euros modèle réduit tombent des cintres et qu’une ovation monte du public pour sceller le triomphe de Camille. Chansons pour Sophie Calle et anti-Sarkozy Autre voix, autre style. Toujours dans le cadre du Printemps de Bourges, Cali a, quant à lui, prouvé qu’il était un bateleur incomparable et qu’il savait chauffer une foule comme personne. Le chanteur a construit une bonne part de sa réputation sur ses performances scéniques ultragénéreuses et même si elles ne créent plus la surprise, elles ont toujours autant d’effet sur son public. Il traverse la scène de long en large comme un damné, enjoint au public de lever le poing ou de claquer des mains, enlace une spectatrice montée sur scène pendant le morceau Sophie Calle n° 108 (écrit pour l’artiste plasticienne qui expose actuellement à la Bibliothèque nationale de France à Paris) tout en continuant à chanter. Sous ses harangues, le public est bouillant. Le Perpignanais fait mine de se jeter de la scène, alors que sur un écran géant, on le voit se faire porter par des milliers de spectateurs lors de bains de foule antérieurs. « Tu es trop vieux pour jouer à ça, petit con », chante le presque quadragénaire (il aura 40 ans en juin), ce qui ne l’empêchera pas de rééditer son exercice favori à la fin du concert sur la chanson qui l’a révélé et est devenue un hymne, C’est quand le bonheur. Car Cali a un rapport charnel à son public et ne peut s’empêcher de tout lui donner, quitte à prendre le risque d’agacer. Dans son dernier album, L’Espoir, Cali, qui avait soutenu Ségolène Royal pour l’élection présidentielle, a voulu faire passer des messages politiques. Cette volonté se retrouve sur scène. Il dédie un Instant de mémoire à Baba Traoré, le jeune Malien sans-papiers mort début avril en se jetant dans la Marne pour échapper à un contrôle de police. « On meurt de peur aujourd’hui devant les forces de l’ordre dans le pays des droits de l’homme ! » s’époumone Cali, avant d’entamer Résistance, une chanson anti-Sarkozy à la sincérité évidente mais aux paroles naïves. Après une reprise de With or Without You de U2, Dolorosa, interprétée sur un rythme de boîte de nuit, conclut cette prestation enflammée. Le Printemps de Bourges a également accueilli Thomas Dutronc, qui a fait preuve de belles qualités de showman et dont la chanson teintée de jazz manouche a séduit le public. Il avait lui-même été précédé par la Franco-Israélienne Yael Naim, dont la carrière internationale prend un bel essor grâce au tube New Soul, mélange subtil de pop et de soul. Plus tard dans la nuit, la petite salle du 22 Est (350 places) était pleine à craquer pour le groupe anglais Foals, qui a justifié l’engouement dont il fait l’objet dans son pays grâce à son rock tendu se réclamant du post-punk, du math-rock (genre expérimental marqué par le refus de la routine rythmique) et de l’afro-beat.
Chuchotements, cris d’animaux, rythmiques R’n’B, transe échevelée, bruitages de cinéma et huit corps comme seuls instruments : Camille a enchanté le public du Printemps de Bourges, où elle a étrenné son nouveau spectacle. La chanteuse de 30 ans, dont l’originalité et la virtuosité vocale forcent l’admiration, a débuté sa tournée de façon magistrale dix jours...