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Actualités - CHRONOLOGIE

CONFÉRENCE - À l’institut Cervantès de Beyrouth Javier Reverte : de l’enfer de Sarajevo au cœur de l’Afrique… voyager pour écrire

Il y a deux genres d’écrivains : ceux qui parlent d’un espace imaginaire abstrait ou d’un univers très défini comme Kafka ou Proust et ceux qui ont besoin d’un contact concret avec la vie et avec les autres pour écrire. Javier Reverte affirme d’emblée faire partie du second camp. Cet auteur espagnol, qui a été durant une trentaine d’années correspondant de presse aux quatre coins de la planète, a certes voyagé pour couvrir les événements, mais il avoue avoir surtout «?voyagé pour écrire?». Invité par l’institut Cervantès à Beyrouth, il a égrené, au cours d’une conférence sur sa vocation d’écrivain*, ses souvenirs et anecdotes de voyage. Visage de baroudeur sous les cheveux blancs, simplicité dans le propos d’où transparaît un grand humanisme, Javier Reverte affirme avoir toujours «?aimé l’aventure, l’exploration, l’expérimentation de situations nouvelles, la découverte de l’autre, des autres...?» Cela donne le goût des voyages, forcément. «?Les déplacements géographiques mais aussi les voyages imaginaires, où nous entraînent les mots, la lecture.?» À la recherche des points communs De là à s’adonner à l’écriture voyageuse, il n’y avait qu’un pas que ce journaliste de carrière a franchi définitivement en 1996, lorsqu’il se consacre entièrement à la littérature. «?En journalisme, on est dans la rapidité, le factuel. Il faut traiter l’information rapidement afin qu’elle ne soit pas périmée, raconter les faits sans entrer dans les détails des sentiments des gens. Moi j’ai toujours été du côté de ceux qui souffrent, qui sont dans la misère, c’est pourquoi j’ai voulu écrire des livres. Pour raconter la vie des autres. Pour montrer les points communs entre les gens, les peuples. Pour évoquer ces désirs communs à tous que sont la recherche de l’amour, la construction d’une famille, l’ambition du bonheur… Parce que parfois un roman explique mieux qu’un reportage la réalité d’une situation et la rend plus claire, plus compréhensible.?» «?Welcom to Hell?» À Sarajevo, où il avait été envoyé couvrir les événements en 1992, Javier Reverte avait, dit-il, expérimenté les bombardements, la guerre «?qui peut tout tuer en un instant?». Il avait assisté en témoin horrifié aux disparitions, aux souffrances, aux privations…Sauf qu’au cœur de cet enfer, il avait également constaté, par des rencontres émouvantes, «?à quel point l’être humain est merveilleux?». De cette expérience, il a tiré un livre, Welcom to Hell, au titre emprunté à «?un tag sur un mur de Sarajevo?». Suivi d’un second roman – à succès – inspiré de cette même ville, La noche detenida (La nuit détenue). C’est le genre qui choisit l’écrivain Auparavant, dans les années quatre-vingt, il avait ramené de ses pérégrinations journalistiques en Amérique centrale (au Guatemala, au Salvador, etc.) une trilogie de guerre. «?Ma profession de journaliste, par les déplacements et les rencontres qui lui sont inhérents et même les accès à des lieux et des sites difficilement abordables dans la vie ordinaire, a beaucoup nourri mon œuvre littéraire?», reconnaît Javier Reverte. Qui soutient d’ailleurs que «?ce n’est pas l’écrivain qui choisit le genre littéraire, mais le genre qui choisit l’écrivain?». Pour sa part, s’il s’est laissé embarquer dans la littérature voyageuse, il ne s’est pas confiné, pour autant, aux seuls récits de voyage, préférant cultiver une écriture romanesque où résonnent les espérances et les aspirations communes de la race humaine. De son Espagne natale postguerre (il est né en 1944) à l’Afrique – un continent pour lequel il a, dit-il, «?éprouvé un véritable coup de cœur, où j’ai découvert la vraie solidarité?» – en passant par Londres, Paris, Lisbonne, une île isolée au large de Chypre (dont il garde un souvenir ému) ou les points chauds de la planète, Javier Reverte promène «?en toute liberté?» son regard de témoin de vie, dans toutes ses manifestations. Et puis, riche de toutes ses expériences emmagasinées, il prend la plume, pour «?recréer et continuer le voyage sur papier?»… Zéna ZALZAL * Les conférences de l’institut Cervantès sont données en espagnol avec traduction simultanée en français.
Il y a deux genres d’écrivains : ceux qui parlent d’un espace imaginaire abstrait ou d’un univers très défini comme Kafka ou Proust et ceux qui ont besoin d’un contact concret avec la vie et avec les autres pour écrire. Javier Reverte affirme d’emblée faire partie du second camp. Cet auteur espagnol, qui a été durant une trentaine d’années correspondant de presse...