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Actualités - CHRONOLOGIE

THÉÂTRE - Au West Hall (AUB), « Rihlat Hanzala… » de Saadallah Wannous Les ironiques déconvenues du citoyen arabe

Le citoyen arabe, dans sa passivité et son conformisme, est passé au crible par la plume acide et corrosive de l’écrivain syrien Saadallah Wannous. Les étudiants de l’AUB, sous la férule de Charif Abdelnour, ont mis sous les feux de la rampe, en un style off, gesticulant et burlesque, avec humour noir et une propension à la criaillerie, une œuvre dramaturgique d’une grande virulence sur la société arabe et son système répressif. Il s’agit de Rihlat Hanzala, min al-Ghaflat ila al-Yakza de l’auteur de Toukouss, al-Icharat wal Tahawoulat. Autrement dit, ce sont les aventures et les tribulations de «?Hanzala?», une sorte de figure de naïf et de simplet populaire, de l’ignorance à la prise de conscience… Entre affres existentielles et absurdes, se joue un drame humain aux contours grinçants et cocasses. Sur la scène nue du West Hall (AUB), apparaît «?Harfouche?», une sorte de djinn-clown, de sexe féminin, attifé comme Attila avec «?cherwal?», boléro et basket. Flot narquois de paroles pour présenter «?Hanzala?», le malheureux conformiste aux tribulations impensables et picaresques… Monde cruel, avec des accessoires faits de chiffons, de chaise branlante, de bric et de broc, pour tout décor, où va plonger cet anonyme citoyen arabe, mélange de Charlot et de pathétique Monsieur Tout-le-monde… Ironie, sarcasme et satire de l’univers étriqué et angoissant de cet homme ordinaire que tout dépasse et qui voudrait cependant que sa vie soit invisible, simple comme bonjour et lisse comme un miroir… Longer le mur pour éviter les tracas est la devise du triste sire?! On ne s’implique pas, on ne s’immisce pas dans les affaires du monde, on ne regarde pas autour de soi?: c’est ce que les gens bien-pensants et surtout le système (retors et dictatorial) lui ont appris. Eh bien, le monde viendra le chercher comme dans un labyrinthe kafkaïen et ses tracas pleuvent comme coups de trique et se mesurent par tonnes… Jeté arbitrairement en prison, pour moins qu’une peccadille, il saura, à son corps défendant, qu’il n’y a pas de victimes innocentes... C’est par un pot-de-vin qu’il gagnera sa libération et retrouvera sa femme. Une femme, guère une ligue de vertu, qu’il a perdue d’avance car il est vite remplacé au foyer et au lit. Pour minimiser le désastre, il tente de récupérer son poste d’employé de banque. Il saura, par les aboiements spumeux de son directeur, qu’il devra chercher fortune ailleurs…Pris de panique, il visite un jardin pour un bol d’oxygène et là, pantelant et haletant, il sera conduit, pour cause de mouton en dehors du rang, chez une femme médecin, droit sortie de Charenton, pour une opération qui devra le transformer tout en le rendant chiffe molle et loque humaine…Après tant de malheurs inutiles, le benêt finit par prendre conscience de sa lâcheté et comprendra que la vie est faite surtout d’intégration, de regard autour de soi et d’action avec les autres… Fable philosophique menée tambour battant côté histoire et texte par un écrivain inspiré qui a toujours cru au pouvoir du changement. Surtout dans le monde arabe. Un texte dramaturgique puissant, quoique parfois verbeux. Un texte dont la richesse verbale est remarquable, dans un arabe usant, en toute subtilité, formules littéraires et dialecte populaire. La mise en scène de Charif Abdelnour est davantage portée à une caricaturale parodie outrancière, allant parfois au numéro de cirque qu’à une tenue d’émotion sérieuse. Les acteurs (Abdel Latif al-Smairi, Georges Khoury, Émile Hajjar, Nadine Kanawati, Sima Ajlikin, Gida al-Hajjar) ont un jeu de scène d’amateurs (étant des étudiants venus de différentes disciplines), oubliant de poser leur voix, aux aigus souvent stridents, avec une gesticulation cédant aux exagérations les plus improbables. Reste cet admirable regard d’un dramaturge sur la société arabe avec ses dérives, ses complexes et ses souffrances. Avec un moment vibrant, bien unique, celui du derviche tourneur... Un vrai appel à la liberté et à la libération. C’est surtout de cela qu’il s’agit, le reste, c’est-à-dire la trivialité, l’incongruité ou?la provocation, on l’a déjà oublié. Edgar DAVIDIAN
Le citoyen arabe, dans sa passivité et son conformisme, est passé au crible par la plume acide et corrosive de l’écrivain syrien Saadallah Wannous. Les étudiants de l’AUB, sous la férule de Charif Abdelnour, ont mis sous les feux de la rampe, en un style off, gesticulant et burlesque, avec humour noir et une propension à la criaillerie, une œuvre dramaturgique d’une grande...