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Actualités - CHRONOLOGIE

«La formation à la recherche», thème du message annuel du recteur Chamussy, pour la Saint-Joseph L’USJ, une université en quête de vérité

Comme chaque année, l’Université Saint-Joseph a célébré sa fête patronale hier, mercredi 19 mars, au campus des sciences et technologies à Mar Roukoz. Outre le RP René Chamussy, recteur de l’Université, les recteurs émérites, les RR.PP. Jean Ducruet et Sélim Abou, les vice-recteurs, le secrétaire général, les doyens de facultés et les directeurs d’instituts, cette fête a regroupé près de 1?000 enseignants et membres du personnel des différentes institutions de l’Université à Beyrouth et dans les trois centres régionaux de Tripoli, de Saïda et de Zahlé. Relevons également la présence pour la troisième année consécutive d’un certain nombre de recteurs d’universités libanaises, ainsi que celle de Mme Nayla Moawad, ministre des Affaires sociales, Bahige Tabbarah, Michel Eddé et du député Walid Khoury. La cérémonie a été marquée par une messe concélébrée par le père René Chamussy, recteur de l’USJ, et une trentaine de prêtres (enseignants et aumôniers d’étudiants). Après la messe, le public s’est retrouvé dans l’amphithéâtre Jean Ducruet pour écouter le message du recteur, placé sous le thème «?L’Université et la formation à la recherche?» et suivre la projection d’un court-métrage de l’Institut des études audiovisuelles, «?La journée de la démocratie?», relatant les élections estudiantines d’octobre dernier sur tous les campus de l’USJ. Voici de larges extraits de ce discours?: «?Nous sommes tous persuadés que la mission de notre université est de transmettre un savoir en telle sorte que de nouvelles générations puissent s’inscrire dans le processus de construction de la cité?; il doit nous importer tout autant de voir notre université se situer à la pointe de la recherche en tant de domaines qui nous concernent. Nous avions déjà abordé ce problème marginalement en 2004 en parlant des enseignants-chercheurs, mais nous souhaitons cette année l’aborder de front avec, en perspective, la formation des étudiants eux-mêmes (…). Notre université doit être une université toujours en quête de vérité, toujours à la recherche, et ce à travers tous les champs que, du fait de ses spécialités, elle traverse et tente jour après jour de faire fructifier.?» Mais qu’est-ce que la recherche et quelles sont ses conditions?? «?Chercher, a répondu le père Chamussy, c’est d’abord l’aboutissement d’une formation qui nous aura appris tant à peser le poids des choses qu’à découvrir les cheminements méthodologiques nécessités par toute quête. Chercher, c’est ensuite accepter de travailler avec d’autres. Chercher, ce doit être enfin une passion personnelle.?» L’aboutissement d’une formation «?Pour assurer le succès d’une démarche de recherche complexe et délicate, une formation rigoureuse est nécessaire?», a poursuivi le recteur, qui en définit ensuite les éléments?: «?Si l’on veut avoir des étudiants ouverts à la recherche, c’est toute une formation qui doit entrer en jeu, une formation à l’esprit critique, une formation méthodologique, une formation aussi à ce qu’un Paul Ricœur appelait “la compétence éthique”. «?Formation à l’esprit critique d’abord. Il ne s’agit pas ici de se tromper sur le sens de cette expression qui, dans la tradition pédagogique jésuite qui est la nôtre, est éminemment positive (…). Avoir l’esprit critique, ce n’est pas “tout critiquer”, c’est être à même de discerner ce qui est vrai de ce qui est faux (…) afin que la recherche puisse s’engager de façon sérieuse et ordonnée?», c’est-à-dire suivant une méthodologie. «?De façon sérieuse et ordonnée disons-nous parce que, s’il ne peut y avoir de recherche sans ce discernement essentiel, il ne peut y en avoir non plus sans méthodologie sérieuse. D’autres que nous ont souvent insisté sur ce paramètre indispensable à tous ceux qui veulent – et tous nos étudiants devraient le vouloir – se lancer dans la recherche. Qu’il nous suffise de dire combien doit nous importer, dans notre souci pédagogique, un tel apprentissage de la méthodologie. Dès les premières années de la vie universitaire, il doit aller de soi que des cours doivent être assurés qui habiliteront l’étudiant à maîtriser ses capacités intellectuelles et à fabriquer les premiers protocoles qui lui permettront de découvrir et de maîtriser les procédures essentielles à tout engagement dans la recherche. » En ce qui concerne la « compétence éthique », citant le philosophe Paul Ricœur, le recteur ajoute?: «?Il nous semble en effet important que l’apprenti-chercheur ne se lance pas dans l’aventure sans savoir où il va, pourquoi il agit ainsi (…). C’est intentionnellement qu’il fonctionne. Il est ensuite celui qui travaille en vue de vivre bien avec et pour les autres et c’est en fonction de cette “sollicitude” altruiste qu’il doit œuvrer dans sa recherche.?» Une tâche partagée Le message souligne ensuite que la recherche est «?une tâche partagée?». «?La recherche, affirme le père Chamussy, doit toujours nous contraindre à travailler avec d’autres chercheurs, avec des chercheurs d’autres disciplines, d’autres cultures.?» Certes, note-t-il, «?le travail en équipe (…) n’est pas toujours de première évidence (…), mais il devrait pourtant aller de soi. Ce n’est qu’en conjuguant ses efforts avec ceux des autres qu’un chercheur peut aboutir, qu’il peut se faire prendre au sérieux et trouver les appuis essentiels à son travail de recherche?». «?Une autre transgression du principe d’autonomie du chercheur provient du principe de l’interdisciplinarité, poursuit le recteur de l’USJ. Permettez-moi ici de laisser la parole au sociologue Edgar Morin (…) en invitant les chercheurs, non pas à cesser d’être eux-mêmes, mais à s’ouvrir à d’autres compétences. Le chantre de la complexité nous indique à coup sûr la voie qui devrait nous permettre de travailler ensemble. C’est d’ailleurs ce que découvrent ceux qui ont su, au cours de stages, vivre quelque peu en entreprise.?» «?Travail en équipe, interdisciplinarité, interculturalité, telles pourraient être les premières dimensions d’un engagement réel de notre université dans la recherche. Il va de soi que cette insistance sur le collectif ne dénie nullement sa part à la recherche personnelle.?» Une mutation «?La prise en considération de la recherche en tant que paramètre essentiel à notre université entraîne des changements dans nos habitudes de penser et d’agir?», enchaîne le recteur de l’USJ, qui n’hésite pas à parler d’une véritable «?mutation?». Jetant un regard rétrospectif sur ce qui a déjà été fait, le recteur a affirmé?: «?Certes, la recherche n’a jamais été oubliée dans nos façons de rêver et de vivre l’université?: laboratoires et centres de recherche existent depuis longtemps et sont même parfois de grande qualité. Qu’il nous suffise d’évoquer notre unité de génétique médicale qui vient d’être reconnue comme “Laboratoire Associé Inserm”, ou notre observatoire universitaire de la réalité socio-économique dont les enquêtes font date, ou nos autres laboratoires de la faculté d’ingénierie, de la faculté des sciences ou de celle de pharmacie, et il y en a d’autres encore. Quoi qu’il en soit, nous étions d’abord préoccupés par la formation professionnelle de nos étudiants et la recherche n’intervenait qu’en fin de formation et ne visait pas tous les étudiants, le 3e cycle restant un domaine trop peu habité.?» « C’est, je pense, avec la sortie de guerre et la prolifération des universités au Liban que le souci d’étoffer nos troisièmes cycles et de fonder nos écoles doctorales s’est imposé pour faire en sorte que nous conservions notre excellence. D’où la pression très forte exercée en toutes facultés sur la recherche. Mais il est clair que la prise en considération de cette dimension a induit une véritable mutation, tout autant d’ailleurs que celle induite par l’augmentation très forte de nos effectifs étudiants, ces dernières années.?» «?Cette mutation s’est traduite par l’apparition de nombre de doctorants, puis de docteurs, une population nouvelle qui avait ses exigences et allait provoquer, du côté du rectorat, la mise en place du Conseil de la recherche, puis d’institutions du type Berytech et le Pôle technologie santé, alors qu’une série d’autres exigences allaient se faire jour du côté des chercheurs eux-mêmes. Il leur fallait en effet, par-delà les acquis de leur spécialité, apprendre à gérer un travail aux paramètres multiples. Et il faut le reconnaître, il n’est pas simple de mettre en place un projet de recherche, de l’évaluer, de le situer parmi d’autres projets de recherche à l’université, hors université?; il n’est pas facile d’obtenir les subventions voulues, de prévoir les valorisations possibles, de trouver les collaborations nécessaires. Bref, il n’est pas facile de s’insérer dans le corpus des chercheurs reconnus, promotion qui implique aujourd’hui par-delà une spécialité propre des qualités de gestionnaire inédites.?» «?Mais en même temps, l’université a aussi ses responsabilités?; c’est elle, à travers ses institutions, qui doit permettre à l’étudiant de devenir chercheur. Cela suppose des structures d’encadrement et d’accompagnement très solides. Cela suppose une pédagogie de la méthodologie très sûre, une politique d’institution sur le choix des thématiques en telle sorte que l’étudiant ne se perde pas dans les balbutiements de la recherche ou ne finisse pas par assimiler à de la recherche l’étalage purement formel de données à la fiabilité des plus douteuses et de nul intérêt. L’apprentissage de la recherche tout autant que les réalisations effectives du chercheur nouvellement confirmé impliquent à coup sûr des compétences qui ne sont pas données et qui doivent être cultivées sans rémission.?» Financement et thématiques «?Dans cette perspective, a enchaîné le père Chamussy, il nous faut insister?: la recherche est un travail en soi, mais le choix des thèmes de la recherche, la recherche du financement, tout autant que l’engagement à faire valoir cette recherche, soit l’avant et l’après de la recherche sont des moments de toute première importance et qui se doivent d’être pris en considération en chaque institution de notre université.?» «?En ce qui concerne le problème des thématiques (…), il importe que chaque institution fasse en sorte que ses chercheurs en herbe parviennent à élaborer leurs sujets de recherche à l’intérieur de ces cadres spécifiques. Il est évident qu’alors la recherche fondamentale pour laquelle nous sommes moins équipés sera plus rare que la recherche appliquée, celle qui privilégie les domaines où se posent les problèmes de société qui nous taraudent aujourd’hui?: l’environnement, la gestion des risques en tous domaines, la construction de la cité dans le respect de la sécurité des citoyens, etc.?» «?En ce qui concerne par ailleurs le financement de ces recherches, il va de soi que l’université ne peut être absente en ce domaine?; il est d’ailleurs à noter que, de 1995 à nos jours, le Conseil de la recherche a pu engager plus de 6 millions de dollars sur 400 projets de différentes envergures. Et cet engagement se poursuit.?» Enfin, le recteur parle de la «?valorisation de la recherche?» comme d’un moment à ne pas négliger et dont le fruit est «?la création d’une image de marque dont l’université tout entière a infiniment besoin?». «?Tels sont les engagements auxquels nous sommes tenus, si nous voulons vivre sainement cette mutation que nous impose la recherche à l’université. Enseignants et responsables, nous sommes tous tenus de revoir nos façons de penser nos enseignements et nos exigences concernant les prestations de nos étudiants en telle sorte qu’une véritable pédagogie de la recherche soit mise en place dans une collaboration véritable de chacun avec tous?» , conclut-il sur ce point. Chercher, créer, innover Résumant son discours, le recteur de l’USJ a conclu en affirmant?: «?La mission de l’université est de permettre aux hommes et aux femmes qui l’habitent de se mettre au service des sociétés qui sont les leurs et de tout faire, en tout domaine, pour les ouvrir à des développements inédits. Cette implication appelle évidemment à un premier niveau cet engagement social, cet engagement citoyen qui permet aux uns et aux autres de découvrir le pays réel qui est le nôtre et d’agir en sorte qu’il émerge de sa misère et de ses malheurs. Il y a des gestes premiers qui sont essentiels et c’est tout le sens de ce que nous avons appelé l’Opération 7e jour. À un deuxième niveau, cette implication nous interpelle en tant que professionnels qui ont à construire, développer et faire vivre un pays ,et c’est ainsi que la poursuite de la démarche qualité doit nous permettre d’améliorer toutes nos prestations en ce domaine. Mais à un troisième niveau, c’est en tant que chercheurs que nous devons nous impliquer pour découvrir ce qui pourra nous aider à faire sauter les blocages, à transformer le monde, à innover tout simplement. Tous et chacun d’entre nous, nous pouvons nous impliquer à ces trois niveaux?; citoyens, professionnels, chercheurs, nous pouvons être tout cela à la fois?; nous pouvons être plus ceci que cela tout aussi bien, c’est évident. L’important, c’est qu’au bout du chemin, nous restions d’ardents reconstructeurs de ce pays qui n’en finit pas de traverser épreuves après épreuves, de cette région qui sait tout ce qu’elle peut attendre du Liban.»
Comme chaque année, l’Université Saint-Joseph a célébré sa fête patronale hier, mercredi 19 mars, au campus des sciences et technologies à Mar Roukoz. Outre le RP René Chamussy, recteur de l’Université, les recteurs émérites, les RR.PP. Jean Ducruet et Sélim Abou, les vice-recteurs, le secrétaire général, les doyens de facultés et les directeurs d’instituts, cette...